Une Algérie pour tous

Par Ismaïl Zanoune – Nous sommes devant des années de vaches maigres et nous y sombrerons inéluctablement. Aujourd’hui, nul ne peut nous montrer une sérieuse échappatoire, or, nous pouvons toujours espérer pouvoir diminuer le nombre de ces années durant lesquelles l’Algérien pourrait s’imaginer en train de manger la viande coriace de son voisin. Avant d’avancer quoi que ce soit, je dois me défendre contre une «accusation» que je vois déjà suspendue sur ma tête : non, je n’adhère à aucun parti politique ni à une quelconque association. Je ne suis qu’un simple jeune Algérien qui a décidé de matérialiser le fond de sa pensée en un humble article. S’unir ! Là est le réel début. Mais derrière qui ? Le drapeau algérien ? L’Algérie est à présent trop faible pour pouvoir nous prendre tous en tant qu’Algériens sous son aile, avec toutes nos différences, nos croyances qui ne cessent de diverger et nos absurdités à chacun. L’islam ? Sait-on déjà ce qu’est l’islam ? Nous sommes aujourd’hui dans l’obligation de trouver l’homme qui pourrait contenir tout cela. Mais qui ? En attendant de le voir apparaître, j’ai jugé bon de lui faire parvenir dès maintenant mon modeste avis sur la situation. Tout au long de ma vie, il y avait toujours quelqu’un, quelque part, pour nous rappeler que l’Algérie était un grand pays, qui a offert de grands hommes ! La seule pensée répartie entre pouvoir et opposition parce que cela les arrangeait indubitablement. Lorsqu’on transcende les choses, on en conclut que les pro-pouvoir le disaient pour justifier leur incompétence, comme pour dire qu’avec d'immenses richesses naturelles, même les plus stupides de la Terre pouvaient réaliser quelque chose, et les rêveries des hommes à idées révolutionnaires ne nous mèneraient qu’à un aventurisme hypothétique. L’opposition chantait la gloire de ce pays faisant croire que l’Algérie à cause de ses dirigeants a raté son rendez-vous avec le progrès et aurait pu être une puissance mondiale ! Un jeu malhonnête, véreux, principalement de l’opposition puisque la masse populaire se voit négligée et se demande où va l’argent ? Il n’y en a pas assez ou du moins pas pour tout le monde, et notamment pas assez pour tout construire. Je suis regrettablement amené à croire que l’Algérie a toujours été un modeste pays dont les femmes n’ont jamais pu offrir des héros. On ne me fera jamais croire que nous avons raté quoi que ce soit, avec les moyens que nous avions, et surtout avec les hommes qui se sont succédé et au pouvoir et à l’opposition. Même avec un baril à 150 dollars, et zéro corruption, la recette pétrolière ne peut construire tout un pays aussi grand géographiquement qu’est le nôtre. L’acharnement contre la corruption n’est donc en fait que fantasmagorique. Parce que l’on aime s’attaquer à un ennemi qui ne peut rétorquer. Le gouvernement a dépensé depuis l’an 2000, 800 milliards de dollars ! Une somme qui paraît importante, mais qui cesse de l’être lorsqu’on apprend que le PIB annuel des états unis uniquement en 2015 était de 17 000 milliards de dollars ! C’est uniquement par fausse conception de l’honneur que le peuple continue de se croire grand. C’est uniquement par fausse conception de l’honneur, que le peuple continue de croire qu’il vit dans un grand pays. Trop fières pour l’admettre, nous nous forçons à nous satisfaire du peu qu’on a, à partir du moment que l’on mène une vie meilleure à celle de nos voisins arabes. Une Algérie vraiment «grande» n’a jamais existé et ce n’est pas pour demain matin. Cependant, rien ne nous empêche de continuer à la vouloir si forte, si constante, si solide. Ce chemin peut être emprunté à n’importe quel moment. Or, les premiers palpables fruits de cette démarche ne verront le jour que dans quinze ou vingt ans. Ne soyons pas égoïstes et préparons-la pour ceux qui naissent aujourd’hui. Et parallèlement à cela, il incombe au gouvernement d’améliorer le niveau de vie du citoyen quitte à vider les caisses de l’Etat. Cela dit, il faut prendre des décisions risquées qui flirtent avec l’aventurisme. Des décisions dont l’application devra être menée d’une rigueur sans précédent.
Le plus fort n'est jamais assez fort pour être toujours le maître (J.-J. Rousseau)
Je ne suis pas en train de donner raison au pouvoir en place, qui d’ailleurs est le même depuis ne serait-ce que 1999 ! Seize ans déjà ! Bon à savoir. Nous vivons dans un monde dont la nature est gouvernée par des lois. Toutes ses lois sont entachées des notions de l’équilibre et du changement. Le règne de Boutflika mène l’Algérie vers l’inconnu, certes, mais ce n’est pas une raison valable pour réclamer sa résignation ! Il n’y a pas de recette magique, et même si le plus digne des opposants se voyait désigner président, l’Algérie connaîtra un avenir similaire auquel nous aurait menés Bouteflika. Nous refusons de grandir parce que nous nous croyons déjà grands. Vouloir comprendre et élucider tous les drames qui ont secoué l’Algérie est un devoir qui nous dépasse, nous la jeunesse algérienne. En tant que jeunes Algériens, nous devons faire preuve d’insouciance positive, et partageons cette charge avec les générations futures. Prenons choix que toutes les décisions ont été prises de bonne foi, ainsi, nous allons nous épargner tant de faux débats et surtout tant de haine qui serait un facteur anticatalyseur du progrès. Cela peut ne pas paraître logique, puisque ça heurte les principes de l’Etat de droit, mais dans de pareilles situations, ce qui est logique n’importe peu, ce qui importe, c’est ce qui fait avancer les choses. Cessons d’attendre le miracle qui s’incarnerait en une seule personne ou un groupe qui viendrait mettre tous les corrompus en prison et récupérer tout l’argent qui aurait pu être volé. Ajoutons à cela qu’avec la dérisoire Charte de réconciliation nationale, des terroristes ont pu savourer à nouveau la liberté et jouir d’un statut social. Voler, piller n’est qu’une bêtise d’enfants à côté de l’assassinat des hommes. Cette démarche prend sens lorsqu’on décide d’ouvrir les yeux sur la triste vérité qu’est la suivante : les opposants, en manque d’arguments tangibles, essaient de faire passer l’argent dilapidé pour des sommes mirobolantes en dinars et même en centimes, comme si cet argent aurait pu changer le destin de l’Algérie s’il avait été bien géré. Foutaise. A titre de comparaison, le stade d’Arsenal a coûté près de 500 millions d’euros. Il va falloir donc trouver 40 affaires semblables à celle de Chakib Khelil pour dire que l’Algérie a perdu la possibilité de construire deux grands stades de football ! Ridicule. D’où s’explique le malaise populaire grandissant. Qu’attendons-nous d’un peuple à qui on a fait croire qu’il peut connaître une Algérie meilleure rien qu’avec l’écartement des gens corrompus ?
Pour le vieil homme, chaque colline est une montagne
Il est vrai que le régime basé sur une légitimité historique a trop duré. Et cela constitue un point qui de jour en jour affaiblit la position de l’Algérie à l’international. Des hommes qui restent longtemps attachés à leur place commettent des erreurs et font l’objet de plusieurs scandales qui, en coulisse, deviennent une arme utilisable contre nous, débouchant ainsi sur des accords loin d’être inclus dans des relations d’égal à égal avec les firmes étrangères et les multinationales. Et c’est ce qui a conduit à la très stupide forme du 51-49. Cette loi est l’aveu d’échec de nos dirigeants qui la justifient par la fameuse rengaine : nous ne vendons pas le pays ! Mettons fin à la politique émotionnelle. Economie en faillite, zéro savoir-faire, et nous voulons imposer aux investisseurs étrangers cette loi insensée. Pourquoi ? Parce que l’on a admis qu’ils étaient plus malins que nous et que cette loi pourrait nous sortir indemne d’un éventuel mauvais coup. On part de l’idée que nous sommes impuissants, mais nous aimons exiger une relation d’égal à égal ? Alors que les Occidentaux ont pour devise : nous ne nous associons qu’avec nos égaux. Il est indigne de voir tant d’efforts fournis rien que pour rester là où nous en sommes. Aujourd’hui, l’image vaut plus que les hommes. Placer des ministres de moins de trente ans serait un bon début de négociations avec les investisseurs étrangers. Ces derniers semblent détenir une des clés conséquentes qui visent la création d’emploi. Le changement viendra. Sera-t-il bénéfique ? Je n’en sais fichtre rien. A qui la faute si un énorme effroi s’est installé rien qu’à cause de la chute du prix de pétrole ? Cette infamie est à mes yeux partagée entre plusieurs. L’Occident déjà, puis nos dirigeants qui se laissaient faire, s’accrochant non pas poussés par une conviction de pouvoir réaliser quelque chose, mais uniquement parce qu’ils sont persuadés que leur engagement éviterait à l’Algérie d’autres tragédies. Et dernièrement, une opposition toujours en dessous des attentes. Une opposition beaucoup trop individualiste pour accepter de coopérer avec le cercle de décision en Algérie. Il est vrai que Bouteflika a laissé s’instaurer en Algérie une république de camarades, seulement, si on essaie de guérir le mal par le mal, l’on aboutit à des résultats diamétralement opposés aux nobles objectifs préalablement fixés.
Une Algérie de tout le monde
Nous assistons aujourd’hui à l’émergence de tant de mensonges et de fausses vérités. Les prédicateurs de l’islam tentent de nous persuader que notre religion est en danger à cause d’une pseudo-dégradation des mœurs. Tandis qu’il y a mille fois plus de mosquées que de bars. Cent fois plus de chaînes de télévision à caractère islamique que de sites à contenu pornographique. L’Algérie de demain est celle dans laquelle le pratiquant n’irait pas enquiquiner son concitoyen uniquement parce qu’il vient de sortir d’un bar. Une Algérie dans laquelle la femme voilée ne montrerait pas son nez à la télévision pour insulter les femmes qui n’ont pas jugé salutaire de sortir exagérément habillées. Une Algérie qui interdirait d’accepter sur son territoire la présence d’un mufti saoudien qui déclare illicite le jeu d’échecs. Tellement peureux d’autrui, on expose aujourd’hui la présence des étrangers sur notre territoire comme une menace. Rappelons-nous seulement que l’âge d’or de l’islam c’était sous le règne des Abbassides. Bagdad a régné fièrement pendant 700 ans. Jamais les musulmans n’ont constitué la majorité à Bagdad. Bagdad a renoncé à ses origines, qu’en est-il advenu de Bagdad aujourd’hui ? Et là, un vrai dialogue d’identité s’impose. De nos jours, lorsqu’une personnalité algérienne (artiste, écrivain, etc.) se trouve au beau milieu d’une affaire scandaleuse (viol, par ex.), c’est toute l’Algérie qui doit porter le déshonneur, et tous les médias lui collent dans le dos l’étiquette de traître ! Il faut dissocier Algérie et Algériens. L’Algérie telle qu’on se borne à nous l’imposer est quelque chose qui doit être dépassé. Nos imams s’attaquent aux jeunes Algériens qui aiment se coiffer bizarrement et qui parfois se comportent de façon excentrique. Parce qu’imiter les «gwar» était proscrit dans l’islam. Tous nos lois et règlements sont importés d’Europe. Là est l’imitation proscrite. Rendons-nous service, et arrêtons de parler d’islam. Même la pluie lorsqu’elle se refuse à nous, le peuple se torture avec l’idée qu’il n’est pas sur le droit chemin et qu’il subit la colère de Dieu. Jusqu’à quand continuons-nous à nous moquer de nous-mêmes ?
Ismaïl Zanoune
24 ans, Maghnia

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