Oxygène pollué

L’historien de demain sera comme le cosmonaute du siècle passé. Un «cosmonaute» a atterri ce matin au cosmodrome du forum du journal Liberté qui était exigu en la circonstance. Certains, debout, ont écouté un maestro de l’histoire de l’Algérie accompagné d’un effet larsen discontinu. Non, ici, le forum de Liberté n’est pas le sujet, mais juste un brin de l’histoire du sujet. A mon humble avis, personne de sensé ne peut s’attaquer de front aux Novembristes, et pourtant au forum de Liberté, c'est ce qu'a fait l’invité l’historien Benjamin Stora. J’apprends que son livre sur Messali relevait de circonstances conjuguées à ses études, au moment, au milieu et à des personnes qu’il fréquentait, et qui possédaient des archives de premières mains. Dans la genèse de l’histoire de son premier livre, qu’il nous relate, son mémoire de thèse révèle que c’est une opportunité qu’il a saisie d’abord en tant que militant politique. La question découle de source : est-ce cela seulement ? Et dans la salle lors du débat, un intervenant qui va jusqu’à l’accuser de travailler pour l’Etat français. On sait maintenant qu’on peut travailler pour les Services ou pour l’Etat à son corps défendant. La question n’est pas là. La question primordiale est de savoir pourquoi des historiens anticolonialistes s’en prennent aux vainqueurs de la colonisation française en détaxant ceux qui avaient ouvert des maquis parallèles entraînant des morts entre Algériens, des drames et autres suspicions sur la conduite de la guerre, et qualifié cela de politique sans préciser que c’était en ces temps une politique certes, mais une politique criminelle. Si on ajoute les personnalités mises en exergue, on constate que l’historien a une préférence pour les ennemis de Novembre ou ceux étrangers aux 1er Novembre 1954. La salle était acquise à l’historien qui sait être convaincant, avec des arguments et une méthode presque scientifique de l’histoire. Sa connaissance gargantuesque de l’histoire de notre pays (le sien aussi), complétée par le vide laissé par nos historiens lestés par la politique de la pensée unique pendant des décennies et la pratique de la gomme en histoire, faut-il rappeler aussi que jusqu’au siècle passé dans les pays dits arabomusulmans, l’histoire comme l’image ont toujours été taboues, font qu’écouter un historien d’une telle envergure est comme prendre une bouffée d’oxygène. Un peu polluée à mon avis. Gageons aujourd’hui alors qu’avec les images produites par les smartphones et l’internet aidant, nous surmonterons rapidement ces handicaps impropres à l’ère actuelle. Si pour beaucoup la critique reste encore un tabou, il est déconseillé d'occulter la force et l'intelligence de l'ennemi d'une part et la faiblesse de son propre camp, de l’autre, dans l'écriture de l'Histoire. Des historiens comme Harbi et Stora nous révèlent parfois ce que nous ne savons pas avec une pédagogie que je trouve exquise, mais pourquoi vouloir jeter la suspicion sur ces hommes qui «s’ils ne sont pas à la mesure de la paix, ils ont été à la mesure de la guerre. Ils ont osé ce que nul, parmi les plus intelligents, les mieux informés du train politique, n’aurait osé à leur place. Et cela leur sera toujours compté à gloire», affirmait le 16 février 1960 Jean-El Mouhoub Amrouche, car personne ne peut faire mieux que le FLN de 1962 à nos jours, le plus souvent à son corps défendant, pour nuire au FLN historique, et particulièrement aux Novembristes. Certains vont jusqu’à penser que les méfaits de la colonisation concernent seulement les ex-colonisés et on comprend mieux pourquoi les crimes de la colonisation ne sont jamais portés au bilan de l’œuvre française, qui avec le temps ont qualifié le colonialisme, y compris le colonialisme de peuplement, de civilisationnel.
Saâdeddine Kouidri
 

Commentaires

    mohend
    22 janvier 2014 - 11 h 30 min

    en afrique il y’a trois
    en afrique il y’a trois vérités: ta vérité, ma vérité et LA vérité. Harbi et le courant comploteur qu’il représente(ait ahmed, Benbella et autres)sont les artisans d’une construction aristocratique de l’histoire, ils font tout pour glorifier leurs familles. souvenez-vous que ce même harbi a envoyé CHABANI à la mort à travers son journal de l’époque ECHAAB. voilà que Benjamin stora, lui aussi adepte de l’histoire aristocratique et ami de harbi essaie de faire son mea culpa. mais l’histoire, la vraie, est ecrite sur les rochers, sur les murs et même sur le cul d’une vache.

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