Gaspillage des denrées alimentaires : des chiffres farfelus

Les autorités, à travers le ministère du Commerce et le mouvement associatif (Union générale des commerçants), mènent depuis plusieurs jours une campagne de sensibilisation contre le gaspillage alimentaire. Jusque-là quoi de plus normal, surtout que l’opération intervient à l’occasion du Ramadhan, une période connue pour être propice à tous les excès alimentaires. Mais là où le gouvernement et ses relais se perdent complètement, c’est lorsqu’ils se sentent contraints de nous servir un argumentaire des plus farfelus basé sur des chiffres abracadabrants. L’Union nationale des commerçants et artisans algériens se targue même d’avoir réussi à chiffrer le gaspillage alimentaire en Algérie, qui dépasserait, selon elle, 500 milliards de centimes cette année. Toujours d’après les chiffres de l’UGCAA, sur les 10 millions de quintaux de légumes consommés pendant le mois sacré, 500 000 seraient jetés à la poubelle.120 millions de baguettes de pain seraient gaspillées sur les 4,1 milliards de baguettes produites durant le mois sacré. Concernant le lait, ce sont 12 millions de litres qui seraient jetés sur les 150 millions de litres achetés, en moyenne, durant ce mois. Là, on est donc très précis dans les chiffres que l’on donne comme si l’Algérie disposait d’un organisme ou d’un système de calcul qui permettrait de calculer la quantité de denrées alimentaires achetée par les Algériens et celle non consommée et jetée à la poubelle. Une question s’impose : quelle est cette méthode miraculeuse qui permet à l'Etat de savoir combien de litres de lait les citoyens renversent dans leur évier ? Les citoyens forcés de se lever très tôt le matin pour obtenir deux ou trois sachets de lait à cause de la pénurie peuvent-ils se permettre de le jeter ? L'Etat ramasse-t-il le pain jeté par les citoyens pour le peser ? Bien sûr que non. Ce pain est heureusement récupéré par des ramasseurs qui le revendent aux éleveurs (de volailles, d'ovins, de bovins, etc.), donc, la majeure partie de ce pain est réutilisé. Faire une campagne contre le gaspillage reste une très bonne chose, mais encore faut-il trouver des arguments convaincants et basés sur des chiffres proches de la réalité. Si le gouvernement tente de sensibiliser l’opinion nationale sur l’importance d’éviter le gaspillage de produits importés à coup de milliards de dollars, c’est que la facture alimentaire commence à peser lourdement ces dernières années sur les finances de l’Etat. Et pour cause. L’Algérie importe l’essentiel de ses besoins alimentaires et demeure dépendante des marchés étrangers dans ce domaine. La facture d’importation des produits alimentaires pour le premier trimestre de l’année en cours a, d’ailleurs, enregistré une hausse de 13,6% par rapport à la même période de l’année précédente, selon les statistiques des Douanes algériennes. L’Etat algérien assume seul cette situation, lui qui n’a pas réussi à booster la production locale de sorte à limiter aujourd’hui l’impact des importations sur son budget. Une situation qui met notre pays en péril, car cette dépendance vis-à-vis de l’étranger est porteuse de danger pour la sécurité nationale. L’Etat est de ce fait le premier gaspilleur, puisqu’il continue de dépenser plus qu’il n’en faut pour couvrir les besoins alimentaires des Algériens ?
Amine Sadek
 

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