Mustapha Bacha : recueillement et enseignements
Par Nordine Aït Hamouda – Forgé dans la lutte pour l’idéal démocratique, Mustapha Bacha a toujours incarné la rigueur et la discipline associées à un sens d’organisation hors pair. Il était différent, mais tout en lui faisait que nous soyons tous les mêmes. Durant les années de plomb, il était toujours engagé et fougueux, toujours disposé et disponible à donner l’exemple. Il considérait que notre génération, même privée d’un repère de lutte, n’avait pas le droit à l’erreur. Son rôle primordial dans les événements du printemps berbère d’avril 80 a contribué à porter le mouvement par la masse ouvrière, lui qui était un syndicaliste assumé. Il était la cheville ouvrière et le pivot de l’organisation et de la tenue des assises du Mouvement culturel berbère, et c’était à lui qu’est revenu l’honneur d’annoncer la création du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) en ce mois de février 1989.
Du militant engagé, Mustapha est vite passé au responsable politique déterminé et inébranlable. Il a su par sa force de conviction et d’arguments à structurer le parti et lui donner une dimension digne des grandes formations politiques en un laps de temps. L’histoire lui témoignera que de tous nos hommes et cadres politiques, il fut le seul à avoir pensé à former le militant de base en concevant et éditant le «Manuel du militant». Face au terrorisme intégriste, Mustapha a su conjuguer son engagement militant pacifique en patriote républicain prêt à défendre sa patrie et l’idéal démocratique et républicain. Il était parmi les premiers à rejoindre et structurer les premiers noyaux de la résistance citoyenne. Il était l’artisan et l’organisateur principal de la marche du 29 juin 1994. L’attentat tragique qui a coûté la vie à deux de nos militants et blessé une vingtaine d’autres l’avait beaucoup endeuillé.
Mustapha traînera ce chagrin jusqu’au jour fatal du 8 août de la même année où il fut emporté par un AVC. En cette journée commémorative de sa disparition physique, la présence de tous ses frères et amis de combat nous donne des enseignements et des leçons à tirer : les grands, les sincères ne meurent jamais. De l’au-delà, Mustapha a réussi à nous rassembler comme il savait si bien le faire, il a su encore une fois nous donner la force de transcender tous nos différends et toutes nos divergences pour aller dans le sens de la construction. Dans le sens de tagmat (fraternité), tadukli (l’union), tugdut (démocratie) et tilelli (liberté).
Repose en paix Mustapaha, tu seras toujours parmi nous.
N. A. H.
Ex-député, vice-président d’APC, membre fondateur du RCD
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