Marketing touristique : quelle politique ? (I)

Par Kamel Bouslama – Dans l’optique du marketing d’une manière générale, le tourisme est fondamentalement un produit comme un autre. En ce sens, sa promotion et sa «vente» devraient tout naturellement obéir aux règles essentielles d’une démarche marketing. Pour ne considérer que le noyau de celle-ci, une double interrogation tombe fatalement sous le sens : quelles sont les attentes des diverses clientèles et quelles prestations touristiques seraient les plus adéquates ? En d’autres termes et sur une plus grande échelle, quelles démarches marketing faudrait-il adopter au plan sectoriel ? Et, par là même, quelle politique définir et pour quel développement touristique ?

La visibilité qu’on peut avoir d’un pays, quels que soient les cas de figure sous-tendus, est généralement indissociable de l’identité visuelle que ce pays se donne de lui-même. Dans le cas de l’Algérie par exemple, la situation présente, celle d’un pays en développement, constitue une donnée incontournable ; donc à prendre nécessairement en compte dans tout effort de promotion, notamment touristique.

Elle souligne la nécessité d’intégrer la production et la diffusion du/ou des message(s) envisagé(s) – à caractère publicitaire, promotionnel ou autre – dans une stratégie de l’image de marque du pays à court, moyen et à long terme. Il y certes, depuis peu, une amélioration de la situation sécuritaire et politique en Algérie, laquelle a franchi des étapes déterminantes.  Ce qui, depuis quelques années déjà  – et exception faite de quelques coups de main commis de façon résiduelle et destinés surtout à une exploitation médiatique outrancière –, commence à être perçu de manière assez positive, ici même et à l’étranger.

Donner de l’Algérie une visibilité forte, doublée d’une image positive

A présent, les institutions financières internationales admettent les quelques avancées enregistrées tant au plan du retour de la paix que celui des réformes entreprises dans notre pays, quand bien même celles-ci sont encore balbutiantes. En quelques années, le paysage économique a connu quelques modifications notables, même si celles-ci ne sont pas encore tout à fait parvenues à la hauteur des attentes de la population. L’adoption et la mise en œuvre du code des investissements et de la loi sur la monnaie et le crédit, ainsi que la poursuite vaille que vaille des réformes bancaires et le règlement prévu du problème du foncier – pour ne citer que ces instruments de libéralisation – ont presque entièrement ouvert le champ à l’initiative privée, sans pour autant, il est vrai, la libérer totalement.

Néanmoins, et pour diverses raisons essentiellement d’ordre subjectif, il existe toujours un décalage, pour ne pas dire un hiatus criant, entre la perception d’informations concernant un fait, un changement donné, et son intégration durable dans un système d’opinion déterminé. Ce phénomène, quoiqu’universel, se trouve, dans le cas de l’Algérie, exacerbé de façon récurrente par la production et la diffusion de discours plus ou moins passionnels, négatifs, tenus tant au nord qu’au sud de la Méditerranée, et relayés par certains milieux médiatiques – étrangers et même nationaux – connus pour être hostiles à notre pays. Or, rien de tel, à l’opposé, qu’une volonté affirmée, et partant affichée, de donner à l’Algérie une visibilité forte, doublée d’une image positive : celle d’un pays stable, émergent, avec des problèmes conjoncturels comme partout ailleurs certes, mais résolument engagé dans de profondes réformes économiques et sociales. Il s’agira en l’occurrence de susciter, chez nos vis-à-vis du Nord comme du Sud et ceux des autres régions de la planète, l’intérêt et le désir de découvrir, de mieux connaître, de s’engager. Et enfin d’entreprendre, y compris par l’investissement direct.

Cependant, et on ne le répétera jamais assez, il ne faut pas perdre de vue que le passage à l’acte d’entreprendre, qui se trouve être la finalité de tout investissement, soit-il à caractère humain, matériel et/ou financier, reste grandement conditionné – en dehors des facteurs de coût et de qualité – par l’image générale qu’on a du pays, ici l’Algérie. Et, prioritairement, par les paramètres sécuritaire et politique qui, le cas échéant, sont autant, sinon plus persuasifs – ou dissuasifs, c’est selon – que la notoriété des seuls gisements en hydrocarbures et autres potentialités que le pays recèle (sites naturels et monuments historiques, culturels, etc.).

Les véritables critères d’attractivité d’un pays sont des critères non touristiques

Autrement dit, pour rendre l’Algérie attractive et son tourisme compétitif, de nombreux arguments autres que touristiques et/ou culturels vont paradoxalement – et là c’est une condition «sine qua non» – devoir être mis en exergue. Pourquoi ? C’est simple et compliqué à la fois : selon les experts et spécialistes du tourisme mondial, les véritables critères d’attractivité, non édictés, d’un pays donné sont – contrairement aux idées reçues – des critères non touristiques, comme (j’en cite quelques-uns par ordre de priorité) :

1. la politique étrangère de ce pays qui doit être modérée ;

2. la sécurité des personnes et des biens qui doit être assurée sur son territoire de jour comme de nuit ;

3. le marché national qui ne doit pas être tendu, voire qui ne doit confiner ni à la pénurie ni à la limitation horaire ;

4. les réseaux de communications – et forcément celui des télécommunications – qui doivent être denses tous azimuts et réguliers H24 et 7 jours/7 ;

5. les tarifs hôteliers et les autres prestations de service – en l’occurrence la billetterie des transports – desservant le pays qui doivent être bas, ou tout au moins abordables, non prohibitifs ;

6. un bon climat des affaires et un environnement humain favorable – ou tout au moins non hostile – à la chose touristique et à ses corollaires tels l’hôtellerie, les loisirs, etc.

En définitive, on voit bien que les critères d’attractivité exclusivement touristiques et culturels ne viennent qu’en septième, voire en huitième position… Partant de ces critères non touristiques, je résumerai, à travers l’assertion ci-après : «le tourisme, c’est comme la démocratie : il a besoin d’une mer d’huile et d’un vent de demoiselle» ; autrement d’un calme plat au plan sécuritaire assorti, tout au plus, d’une légère «brise» politique. Il va sans dire, donc, que ce n’est pas le tourisme qui conduit au développement véritable, mais bien le développement général du pays, ainsi que sa stabilité, qui rendent le tourisme profitable tant pour les touristes que pour les sociétés qui les accueillent.

Le développement général du pays, condition première de l’éclosion d’un tourisme de qualité

Car le temps, en effet, n’est plus où le tourisme international était considéré comme une forme «d’exportation déguisée», un moyen rapide et commode d’assurer le progrès économique des pays en développement comme l’Algérie, riches en soleil, sable, sites archéologiques et monuments historiques. Une tout autre lecture s’impose, qui ferait plutôt du développement général du pays la condition première de l’éclosion d’un tourisme de qualité, profitable tant pour les touristes que pour les pays qui les accueillent. Ce que malheureusement les pouvoirs publics, notamment les responsables en charge de la promotion touristique de la destination Algérie, semblent n’avoir pas encore compris, eux qui s’échinent chaque fois à ne mettre au-devant de la scène médiatique que les seuls atouts touristiques, dans un degré moindre culturels, comme si ces atouts, aux demeurant insuffisants et mal valorisés, pouvaient à eux seuls rendre attractive la destination Algérie.

Aujourd’hui, pourtant, nombre d’études et d’expériences illustrent les difficultés, voire les contraintes et, par voie de conséquence, les problèmes liés à l’essor fulgurant, voire spectaculaire de ce phénomène qui, au cours des trois dernières décennies, passait pour la clef du développement. De nombreux économistes et urbanistes ont, à ce titre, analysé les avantages économiques incertains du tourisme de masse aussi bien que ses effets socioculturels ambigus, comme la nécessité d’importer ou de confier à des mains étrangères les éléments essentiels de l’infrastructure touristique – les grands hôtels et leur approvisionnement en l’occurrence, ou les moyens de transport –, la création d’emplois qui tendent à renforcer les rapports de dépendance et de domination économique et culturelle entre pays industrialisés et pays en développement.

Il est difficile, certes, de faire un bilan. Le tourisme de masse a bien souvent suscité des politiques culturelles admirables, favorisé la recherche archéologique, aidé à restaurer – entre autres éléments de patrimoine – des monuments historiques et à ressusciter l’artisanat et autres traditions culturelles. Mais il a aussi amené à privilégier – au détriment des identités culturelles et de l’authenticité des traditions – ce qui pouvait être vendu aux tour-opérateurs et à leur clientèle.  C’est ainsi, notamment, que des communautés entières ont été – et le sont toujours –  amenées à travailler dans un secteur saisonnier, vulnérable, et offrent aux voyageurs un spectacle stéréotypé – illusion dans les deux sens –, puisque le touriste lui-même projette souvent une image fausse de la vie dans les pays industrialisés.

K. B.
Journaliste, consultant en édition et communication

Comment (7)

    Bougamouss
    11 octobre 2016 - 7 h 16 min

    Il ne faut pas attendre que l
    Il ne faut pas attendre que l’Algérie soit numéro 1 mondial pour « commencer à penser à peut-être un jour débuter »
    à faire la publicité sur l’Algérie!!!:.
    – Il faut commencer tout de suite à faire de la pub pour la destination Algérie.Et ce, dans l’Europe entière et surtout en France, car c’est là où se trouve les émigrés Algériens.
    – On peut directement commencer justement par les émigrés(Nous sommes 10 millions en Europe), pour 2 raisons.
    °En général, ils ont déjà où « dormir », en attendant la construction des hotels nécessaires.
    °Ils (nous) ont une attache trés importante vis-à-vis de l’Algérie.
    – Et ainsi de suite:de fil en aiguille, on arrivera facilement à avoir 5 ou 10 ou 20 millions de visiteurs annuels.
    Bonne chance

    zarkemi
    7 octobre 2016 - 18 h 28 min

    Le point essentiel: changer
    Le point essentiel: changer les mentalités……ça peut prendre un sacré laps de temps

    Kamel Bouslama
    7 octobre 2016 - 14 h 19 min

    @ karim (non vérifié) – 06
    @ karim (non vérifié) – 06 oct 2016 – 15 : 26
    Tout ce que vous venez d’écrire, je vous le concède volontiers. J’en ai d’ailleurs fait état dans la deuxième partie de ma contribution qui n’a pas encore été publiée. Ce que je vous invite néanmoins à décrypter, surtout dans cette deuxième partie -à venir- , c’est que je soutiens le principe fondamental suivant : c’est le développement intégral, véritable, d’un pays donné tel le notre qui ferait de l’Algérie une destination touristique affirmée -comme partout ailleurs dans les pays développés- et non l’inverse. Parce que c’est ce développement intégral qui, entre autres finalités, est censé induire un changement radical des mentalités. Dans le bon sens, c’est tout au moins ce que moi-même souhaite vivement. Salutations.

    nekkaa
    7 octobre 2016 - 10 h 27 min

    Le succès de toute stratégie
    Le succès de toute stratégie touristique est lié a la compétence du responsable en charge de sa gestion, en ce qui me concerne et au vu des différentes actions concrètes réalisées ayants changées le visage malheureux de la capitale, Monsieur ZOUKH, est la personne la mieux indiquée pour cette mission sensible pour promouvoir l’image de l’Algérie touristique, en interne et outre mer. Bonne continuation M. ZOUKH et a très bientôt a la tete du portefeuille du tourisme.

    momo
    6 octobre 2016 - 19 h 01 min

    qu on arrete de nous prendre
    qu on arrete de nous prendre la tete avec soidisant touriste.sa na jamais exister et sa n existera jamais.le petrole nous a bouffer la tete.

    Karim
    6 octobre 2016 - 14 h 26 min

    Et les toiltettes ? Et si
    Et les toiltettes ? Et si quelqu’un voudrait prendreune biere ? Tout est fermé et les villes sont mortes a 20 heures du soir. Comment bouger en bus ?
    Impossible de faire du tourisme avec une mentalité medievale ou en dehors d’aller a la mosquée, il y a rien a faire.
    Je vous dis le tourisme est IMPOSSIBLE en Algerie. Meme un match de foot transmis en direct est interrompu pour l’appel a la priere. Dite moi ou ca se fait tout ca ? Je souhaite que ce meme arret de transmission se fera quand les verts vont tirer un penalty en coupe du monde ! Amine !

    Ain El Berda
    6 octobre 2016 - 12 h 04 min

    Mr BOUSLAMA J ADMIRE TON
    Mr BOUSLAMA J ADMIRE TON COURAGE D ANALYSE! EFFECTIVEMENT LE TOURISME EST UN PRODUIT OU PEUT ETRE AUSSI UN ENSEMBLE DE PRODUITS..PEUT IMPORTE..MAIS POUR POUVOIR FAIRE DU MARKETING IL FAUT UNE STRATEGIE ET UN PLAN DE TRAVAIL QUI VA AVEC..DONC POUR FAIRE DU MARKETING IL FAUT DEJA SAVOIR QUEL PRODUIT AVONS NOUS ET QUI EST CONCERNER PAR SES PRODUITS ET OU SONT SES CONCERNER PAR SES PRODUITS…QUEL TYPE DE MARKETING ET COMMENT LE FAIRE..VOILA MA CONTRIBUTION… SALAM DE AIN EL BERDA…JE VAIS ENFIN DEMENAGER DE AIN EL BERDA VER EL REFDA DANS UN GOURBI QUI TIENDRA LA ROUTE POUR AU MOINS 7 MOIS ET APRES ON VERRA…

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