Marketing touristique : quelle politique ? (II)

Par Kamel Bouslama – Dans le cas de figure et la problématique qui nous intéressent, à savoir comment faire pour que notre pays devienne un marché véritablement captif, il ne faut pas perdre de vue, chaque fois que de besoin, cette réalité palpable, à la limite cinglante, et ce, à plusieurs titres : l’état actuel de nos potentialités humaines, matérielles et financières, ainsi que la panoplie de mesures dites incitatives – notamment aux plans législatif et réglementaire – ne sauraient, à eux seuls, contribuer à séduire les partenaires et investisseurs nationaux et étrangers dans les secteurs touristique et hôtelier. Il faudra donc aller plus loin dans la démarche qui consiste à convaincre. Convaincre, en l’occurrence, jusqu’aux plus réticents. Pour ce faire, réussir à faire admettre que le partenariat et/ou l’investissement direct dans le secteur touristique et hôtelier sont des formules gagnantes en Algérie.

Mais convaincre comment ? Et comment procéder ? Faudra-t-il, tel le roi grec de l’antique Sisyphe et son mythologique rocher, se contenter chaque fois de reconduire cette sempiternelle démarche qui consiste à ne mettre en exergue que les seuls patrimoines naturel, archéologique, historique et culturel du pays, et ainsi croire et faire croire que nous disposons là d’un certain nombre d’atouts «majeurs» dont nous pourrions – aux plans socioéconomique et culturel – nous suffire comme autant de facteurs d’attractivité touristique ? Que non.

Chaque message, chaque thème devraient faire l’objet d’une piste de réflexion approfondie

L’Algérie est certes au cœur même du Bassin méditerranéen, lequel, de nos jours, est classé première destination touristique au monde. Elle est certes la porte nord de l’Afrique, le pivot du Maghreb, le proche voisin du sud de l’Europe. Elle entend certes donner sa place – même si elle ne s’y attelle toujours pas avec sérieux et détermination – au tourisme normé, compétitif. Sa position géographique centrale, son étendue qui confine à la sous-continentalité, l’importance de ses infrastructures maritimes et aéroportuaires, ainsi que la densité de son réseau routier, tout comme sa main-d’œuvre jeune et à bon marché lui confèrent certes d’excellents arguments de proximité et de compétitivité.

C’est pourquoi, s’agissant des acteurs principaux du secteur, ce sont surtout le style et le ton des manifestations événementielles et campagnes promotionnelles bien ciblées et soutenues qui, entre autres effets, vont générer – sans pour autant verser dans la publicité mensongère et/ou la propagande – l’impression voulue de sécurité et de confiance retrouvées dans notre pays (*). Ces éléments importants, voire précieux, car appelés à occuper une place grandissante dans notre vie quotidienne, vont devoir transparaître à travers le caractère serein, original et offensif des images et textes de toutes natures contenus dans les messages publicitaires en question. Chaque message, chaque thème devrait, en ce sens, faire l’objet d’une piste préalable de réflexion approfondie menée par des spécialistes, de vrais spécialistes es qualité, du ou des thème(s) à examiner.

Réflexion, par exemple, à partir d’un diagnostic objectif, sans complaisance aucune, censé avoir été déjà établi – mais qui ne l’a toujours pas été de manière exhaustive, totalisante – sur la politique et les moyens à mettre en œuvre pour arrimer solidement le tourisme algérien au tourisme mondial. Réflexion donc, sur les devenirs des stratégies – si tant est qu’on puisse parler de stratégies – jusque-là adoptées par nos dirigeants, à travers une vision critique et une prospective lucide, portées résolument sur un changement radical, je dis bien radical, des mentalités.

Se départir une bonne fois pour toutes de l’approximation et du système «D» locaux

S’agissant, de fait, du soubassement économique et financier de l’activité touristique et hôtelière du pays, les institutions en place vont, en toute lucidité, devoir mettre l’accent sur l’énorme retard accusé par le pays dans la mise en place d’une industrie touristique performante. Autant dire aussi énorme retard dans l’amélioration et l’optimisation de ses capacités d’accueil existantes, dans la mise en valeur, la protection et l’exploitation intelligente des patrimoines naturel, historique, culturel et civilisationnel, lesquels pourtant, et sans contredit, constituent autant de richesses touristiques non négligeables.

Enfin l’autre aspect, et non des moindres, qui ne devrait pas manquer d’être soutenu est celui de la formation, du perfectionnement et du recyclage professionnels, sans oublier la sensibilisation des personnels, volets dont, de toute évidence, l’importance et l’urgence ne sont plus à souligner. D’autant que dans ce domaine très sensible, toutes les activités liées à la chose touristique – et, par extension, à l’hôtellerie, la restauration, l’artisanat, l’organisation des voyages, etc. – toutes ces activités obéissent, ou du moins sont censées obéir à des normes et standards internationaux stricts, rigoureux.

Et, par voie de conséquence, devraient se départir une bonne fois pour toutes de l’approximation et du système «D» locaux, voire des comportements et mentalités rétrogrades : autant d’éléments négatifs, faut-il le souligner, qui de facto constituent de lourdes entraves au développement touristique, car ils sont caractérisés, dans bien des cas qui sont légion, par le bricolage, l’indiscipline, le laisser-aller, l’indifférence, la surenchère moraliste, voire l’intégrisme religieux, pour ne pas dire par l’incivisme pur et simple qui n’a de cesse de causer un préjudice incommensurable à l’environnement naturel d’une manière générale, à la biodiversité sous toutes ses formes en particulier.

D’où l’impérieuse nécessité d’accorder la priorité – dans l’urgence – non seulement à la formation, au perfectionnement et au recyclage des personnels, mais aussi et surtout à une sensibilisation de tous les instants, à tous les niveaux hiérarchiques, des familles d’activité en question – y compris et principalement en matière de management et marketing touristiques. En veillant, bien sûr, à apporter les informations indispensables, il s’agira surtout d’éviter la recherche du beau pour le beau et du style monographique, autrement dit la recherche de l’exhaustivité simpliste et désuète, pour développer plutôt des arguments percutants, qui vont s’adosser essentiellement à des termes simples, sans concession. Et, pourquoi pas, vont s’appuyer sur un effet iconographique et/ou audiovisuel puissant.

C’est bien le développement général du pays qui rend le tourisme profitable

Au moment où s’élaborent les bases d’une globalisation féroce, et dans le contexte de crise et de redéploiement stratégiques des sociétés multinationales, il importe pour les pays en développement comme le nôtre de maîtriser les enjeux et de se donner des moyens nouveaux pour mettre en œuvre leurs propres options de développement. Il s’agirait ainsi, sans plus tarder, de faire préalablement la lumière sur un point capital et, d’ailleurs, on n’aura de cesse de le répéter : ce n’est pas le tourisme qui conduit au développement véritable – même si l’industrie y afférente est considérée à maints égards comme structurante, et le secteur en question comme un facteur d’harmonisation des autres secteurs d’activité –, mais bien le développement général effectif du pays qui rend le tourisme profitable pour les touristes et pour les sociétés qui les accueillent.

Car, tout compte fait, ni les uns (les touristes) ni les autres (les pays récepteurs) ne peuvent, dans le fond, se permettre de perdre la moindre parcelle du trésor que recèle le patrimoine culturel, historique et naturel de notre planète, au titre duquel figurent, ne l’oublions pas, de nombreux sites archéologiques et réserves algériens de biosphère, classés et/ou en cours de classement. Pour tout dire, le plus grand service qu’on puisse rendre au tourisme algérien est, d’une part, de se retrousser résolument les manches et, d’autre part, se remettre courageusement et au plus vite à cette vaste entreprise qui consiste tout simplement à développer le pays de façon effective, durable, sur tous les plans, sans en négliger aucun.

Autrement dit, pas seulement sous l’angle sectoriel en question. Sans quoi nous ne saurions même pas envisager, à moyenne et longue échéance, ne serait-ce qu’un embryon d’industrie touristique et, bien évidemment, tout ce qui lui est corollaire.

K. B.
Journaliste, consultant en édition et communication

(*) Je peux citer, à titre d’exemple, quelques vecteurs ou opportunités de promotion tels que : les leaders d’opinion ; les émissions télévisées à caractère ludique et culturel ; les émissions audiovisuelles liées aux thèmes de l’évasion, de la découverte, de l’exotisme touristique ; les compétitions à caractère sportif ou para-sportif ; le cinéma et la vidéo ; la presse spécialisée et la publicité rédactionnelle ; les manifestations culturelles et autres aspects connexes ; le événements divers (l’événementiel) ; les éductours et incentives, etc. Et la liste n’est tout au plus qu’indicative.

 

 

 

 

Comment (5)

    anonyme
    9 octobre 2016 - 16 h 13 min

    Il faut d’abord assurer la
    Il faut d’abord assurer la sécurité des biens et des personnes.
    Préparer le cerveau des algériens au tourisme et aux touristes.
    Nettoyer nos villes de la saleté.
    et enfin …..

    kouiddr
    9 octobre 2016 - 13 h 00 min

    Avant de parler de tourisme
    Avant de parler de tourisme en algerie, il faut changer de mentalités des algerie, on fait 35 ans pour la détruire, il nous faut 1oo ans pour la re-travailler,. Commençons tout d’abord par nettoyer nos cités , aprés on verra.

    kadda
    8 octobre 2016 - 21 h 13 min

    RIH FE RIH

    RIH FE RIH
    Lorsque ce peuple sera éduqué et formaté de fond en comble c’est à partir de ce moment qu’on parlera de ça

    tadou
    8 octobre 2016 - 19 h 29 min

    c est toute une mentalite d
    c est toute une mentalite d abord qu il faut changer. je vois mal un couple de touristes ou la femme est obligee
    de se mettre en hijab pour pouvoir se baigner. tous les restaurants sont fermes durant le ramadan un etranger
    ne peut meme pas prendre un verre d eau ou un sandwich.en tunisie et au maroc les restaurants restent ouverts
    pour les touristes. il y a encore mille et un point que ne souleve pas ici.le travail pour lr demarrage et la reussite
    de ce secteur est colossal.

    aqil2
    8 octobre 2016 - 17 h 11 min

    Merci pour la réflexion O
    Merci pour la réflexion O combien dans les cœurs de beaucoup de nos compatriotes qu’ils veulent voir les merveilles de notre pays. Et c’est on commencé par ne pas faire n’importe quoi. Pres de chez moi un hôtel de 4 étoiles qui se dit 5****, affiche 172 euros la nuit sans le petit déjeuner; les tour-opérateurs étrangers affichent pour les mêmes catégories d’hôtels moins de 600 euros huit jours et sept nuits en all exclusive, transport et transfert compris…oui pour le patriotisme mais non pour l’arnaque.

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