Quand l’image aiguise les couteaux

couteaux
Les enfants d'Octobre 1988 auraient pu y arriver n’était le pouvoir de Chadli qui a cédé aux islamistes. D. R.

Par Saadeddine Kouidri – Dire que l’Algérie n’est pas un enjeu entre Algériens semble une vérité de La Palice. Dire que ses richesses sont un enjeu de tous les riches et que les plus riches sont états-uniens est une autre évidence.

Mais rappeler que nous vivons dans un monde capitaliste qui se distingue en premier par la propriété privée n’est pas seulement une vérité, mais tout ce qui fait l’actualité car les Américains considèrent l’économie de marché comme le seul mode de régulation de la production et des échanges et, de ce fait, leur accessibilité à la propriété privée de n’importe quelle richesse de par le monde ne doit jamais être entravée. Ils y travaillent tout le temps et partout.

Quand on parle de la nouvelle loi sur les hydrocarbures, c’est de cette règle du capitalisme qu’il est question ! Une mise à niveau en quelque sorte pour lever toute trace de l’option socialiste, ou toute autre option de la propriété des nations et des Etats. Comment lever cette entrave de l’Algérie au capitalisme mondial et particulièrement états-uniens sinon par une nouvelle loi ? Si la tentative a échoué par deux fois, elle est aujourd’hui actualisée par le nouveau Premier ministre et s’apparente à une constante de la politique du pouvoir, qui profite de la crise du dinar pour l’imposer.

L’option du gaz de schiste n’est rien d’autre que la revendication de cette autre étape de la privatisation des terres et du sous-sol. La revendication des bourgeois va crescendo. Hier les terres étaient nationales, aujourd’hui elles sont étatiques, demain elles seront privatisables.

Avilir les hommes pour pouvoir avilir leur terre et la rendre accessible au dollar, au dinar symbolique, est toujours un rôle dévolu aux forces de la réaction. Pour illustrer, quoi mieux que l’image de cette «caméra cachée» pour faire surgir la «caméra officielle» et attribuer aux victimes du terrorisme islamiste le rôle de trophée ? Les imams cathodiques d’hier semblent des enfants de chœur devant le discours politique dominant, avec cet inconvénient, ce bémol : sa faible audience contrairement à leurs chouyoukh. Pour pallier ce manque de popularité, on fait appel à une grande puissance !

A ces images de propagande de la terreur diffusées par la TV nationale, nous suffira-t-il d’écrire ou de dire sur ces images que les acteurs de ces massacres ont été non seulement amnistiés, mais qu’un de leurs chefs a été élevé au rang de «personnalité nationale» pour avoir la vérité vraie et un reflet du visage du système politique actuel, que le peuple des Patriotes des années 1990 et son armée avaient vaincu.

Il reste que le rappel de ces images est insupportable pour deux raisons, dont la plus importante est l’image suggérée, celle de nous rappeler comme un défi que les assassins et leurs commanditaires sont toujours en liberté, sans jugement. Ce montage d’images d’archives des victimes du terrorisme et de la promotion de la réconciliation nationale – un court-métrage de presque 34 minutes intitulé Pour que nul n’oublie !, diffusé il y a quelques jours – de la direction de l’information de la Télévision algérienne a été réalisé et commenté par Lotfi Cheriet, membre de l’Arav. Oui, nous n’oublierons pas que ce film est un discours politique qui attribue aux victimes du terrorisme islamiste le rôle du trophée.

Le plus pénible n’est pas de voir les victimes en images, mais leurs bourreaux en liberté. De voir presque tous les jours les images de leurs traces que suggèrent leurs armes que l’ANP découvre et surtout le discours de leurs politiciens, leurs larbins, imams ou autres charlatans qui pullulent dans la société politique pour avilir le peuple tout entier. Quand d’autres politiques pratiquent l’économisme qui est spécifique aux gouvernants et impropre à l’opposition.

La particularité de ce film est dans le rôle qui lui est attribué : tenter d’élever la peur, à l’image d’un couteau qui ne serait plus mis au niveau de la gorge, mais au niveau de la tête.

Quant à nous, il nous suffit d’imaginer que «les bourreaux de ces victimes ont été amnistiés» et de transformer le couteau en une plume à la Kamel Daoud et son Zabor, ce héros moderne, pour nous guérir de la peur et non de tous nos maux. Les enfants d’Octobre 1988, bien avant Zabor, auraient pu y arriver si ce n’était le pouvoir de Chadli qui, la peur au ventre, a cédé aux islamistes pour se préserver de la démocratie, il y a 29 ans.

S. K.

 

Comment (2)

    Mello.
    10 octobre 2017 - 16 h 20 min

    Mr Kouidri, de votre article, nous avons le sentiment d’un pays que tout le monde cherche a s’accaparer. Du terroriste egorgeur et tueur du peuple au trabendiste de haute facture, la donne reste le meme, a savoir s’enrichir par tous les moyens en ce siecle de finance et d’economie liberale. Le sous -sol Algerien est plus riche que le sol qui supporte tous ces vautours du nouveau genre, alors il est attaque et agresse par tout moyen d’exploration pour en faire sortir toute la richesse. S’enrichir oui, mais jusqu’a quand, jusqu’a combien ? . Le syndrome de Hollande nous guette malheureusement, les futurs generations , enfant et petits enfants d’Algerie n’auront que des rochers a manger. Les rapaces de tout especes sont passes par la. Quant aux images de la TV d’Etat , elles ne font que regenerer cette folie meurtiere dans les petits cerveaux de nos jeunes enfants , deja traumatises par un systeme qui a tout verrouille et cadenace pour permettre a tous les charognards de depecer leur proie.

    karimdz
    7 octobre 2017 - 12 h 06 min

    Ces images n auraient pas du être diffusées de telle manière, quand bien même cela a été la triste réalité des années 90 et elles font partie de notre histoire contemporaine. S agissant des criminels, sont ils encore en liberté Dieu seul le sait, et il est pas dit, qu ils étaient algériens. Notre pays a subit le premier printemps sioniste, des mercernaires étrangers avaient été envoyés dans notre pays.
    La réconciliation nationale a t elle été une mauvaise chose, je dirai au contraire, elle a permis au pays de retrouver la paix et de se remettre sur les rails.

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