Par Kamel M. – Un ancien officier de l’Armée de libération nationale (ALN), sollicité par Algeriepatriotique, a répondu aux affabulations d’un journaliste et écrivain français sur la bataille de Souk-Ahras. Manuel Gomez, qui fut engagé par Albert Camus au quotidien Alger Républicain, a affirmé, dans un récent article paru sur un site nostalgique de l’Algérie française, qu’«une unité de jeunes appelés métropolitains» aurait été «sacrifiée» par De Gaulle en Algérie au moment des négociations d’Evian.
L’auteur de J’accuse De Gaulle raconte que «dix jours avant la signature des accords d’Evian, l’armée française allait commettre, sur ordre de De Gaulle et de son gouvernement, la plus odieuse forfaiture de son histoire», accusant «le chef de l’Etat français» d’avoir «laissé massacrer une unité d’infanterie composée essentiellement de jeunes appelés du contingent, basée non loin de Souk-Ahras, dans l’Est algérien, face au village tunisien de Sakiet Sidi Youssef». Selon cet ancien chef de rubrique au journal colonial La Dépêche, le gouvernement français qui cherchait à «amadouer les dirigeants nationalistes», c’est-à-dire le FLN, aurait «décidé, quelques jours plus tôt, un cessez-le-feu unilatéral» et aurait donc donné ordre aux soldats français stationnés en Algérie de rester l’arme au pied.
«C’est complètement faux !» rétorque l’ancien officier de l’ALN. «Il est vrai, néanmoins, que les combats ont continué et se sont intensifiés du 6 au 13 mars 1962, particulièrement dans la zone nord commandée par Abderrahamane Bensalem, secondé par Abdelkader Chabou et Ahmed Ben Ahmed Abdelghani». Notre source explique que la zone nord comprenait la région de Souk-Ahras comprise jusqu’à El-Kala, ajoutant que lui-même a perdu, durant cette période précisément, près de soixante hommes dans le secteur appelé «Bec de canard», face à Bouhadjar, prouvant ainsi que l’armée française n’a jamais reçu ordre de cesser le combat.
L’ancien officier de l’ALN dément une autre allégation de Manuel Gomez. «Jamais au grand jamais le territoire tunisien ne fut utilisé comme théâtre de combat ; l’ALN faisait un point d’honneur de n’agir qu’à partir du territoire algérien», a-t-il confié.
«La bataille de Souk-Ahras s’est déroulée au courant du mois de mai 1958, tandis que l’auteur de ces balivernes parle de 1962», corrige notre source, qui indique que «l’ALN avait déclenché des attaques tout le long de cette zone» et que si les Français se sont mal défendus, «ce n’est pas faute d’interdiction de réagir de leurs responsables mais par manque de combativité». «Les soldats français avaient le trouillomètre à zéro», ironise notre source, qui explique que «cela se comprend» car «ils venaient, tout au long de ces années, de recevoir une raclée et de perdre l’Algérie».
«Le prétexte de cet écrivaillon est un abus de faiblesse de sa part», conclut l’ancien officier de l’ALN.
K. M.




article publié le 8 mars 2017
Cet épisode de la guerre d’Algérie a été soigneusement occulté par le gouvernement français et par tous les médias, (mais l’ont-ils su ?).
Dix jours avant la signature des « accords d’Evian » l’armée française allait commettre, sur ordre de De Gaulle et de son gouvernement, la plus odieuse forfaiture de son histoire.
Voici comment le chef de l’État français avait décidé de refaire un nouveau Dien Bien Phu, en laissant massacrer une unité d’infanterie, composée essentiellement de jeunes appelés du contingent, basée non loin de Souk-Ahras, dans l’Est algérien, face au village tunisien de Sakhiet-Sidi-Youssef.
(Rien à voir bien entendu avec le fameux bombardement de ce même village le 2 février 1958 qui mobilisa toute la presse internationale et attira l’opprobre de nombreux pays contre la France)
Depuis le lever du jour de ce 9 mars 1962, une pluie d’obus tirés par l’artillerie lourde de l’ALN, installée en Tunisie, pleut avec une intensité sans précédent sur cette unité composée de jeunes recrues, des appelés pour la plupart.
Le commandant de l’unité n’a pas les moyens matériels de riposter car ses hommes ne sont équipés que d’armes légères.
En effet, sur ordre du gouvernement on lui a retiré quelques jours plus tôt son artillerie lourde plus un régiment de la Légion étrangère et une demi-brigade de blindés.
Ordre bien singulier puisque les services secrets avaient signalé une concentration inhabituelle de forces adverses en territoire tunisien, juste en face de ce secteur.
Sans cesse le commandant demande par radio à sa hiérarchie basée à Constantine et à Bône, l’appui de l’aviation pour le dégager.
La situation devient désastreuse à l’aube du 10 mars. Les tirs redoublent de violence.
Puis c’est le silence.
-« Je vous en prie, réagissez ! Nous risquons une attaque massive des fellaghas ».
De son poste d’observation le commandant constate, à l’aide de ses jumelles, qu’à moins d’un kilomètre plusieurs brèches ont été ouvertes dans le barrage électrifié qui délimite la frontière entre les deux pays. Sur les collines environnantes des milliers de combattants de l’ALN progressent à découvert dans sa direction.
Ils sont à moins de deux kilomètres à vol d’oiseau. Il sait qu’il ne pourra pas résister à une attaque de cette envergure et que tous ses hommes vont se faire massacrer. Il se demande pourquoi on ne lui envoie aucune aide.
Ce qu’il ignore c’est que l’état-major militaire a reçu l’ordre de ne pas intervenir.
Pour quelles raisons ?
Des négociations sont engagées avec les nationalistes algériens et Louis Joxe discute en ce moment même à Evian avec les représentants du GPRA.
Pour amadouer les dirigeants nationalistes, le gouvernement français a décidé quelques jours plus tôt un «cessez le feu unilatéral ».
Ainsi l’ALN (Armée de libération Nationale) peut agir en toute impunité et tenter une opération spectaculaire afin de négocier dans de meilleures conditions.
Et c’est pour cette raison que De Gaulle va sacrifier sans aucune pitié, sans aucune émotion, quelques centaines de jeunes soldats appelés du contingent dans le seul but de démontrer à la métropole la nécessité urgente de terminer cette guerre quel qu’en soit le prix.
Informé de tout cela, le lieutenant-colonel Lisbonis, commandant la base aérienne 213 de Bône, hésite à intervenir.
Un an plus tôt, au moment du putsch des généraux, il était resté fidèle à De Gaulle.
Mais sa conscience le tenaille et il ne peut concevoir de ne pas se porter au secours de ces jeunes soldats français sacrifiés au nom d’une odieuse politique d’abandon.
Dès le lever du jour il donne l’ordre aux escadrilles de décoller.
En quelques heures la victoire change de camp. Les pilotes des T-6 arrosent de leurs mitrailleuses les fellaghas, surpris par une attaque aérienne qu’ils n’attendaient pas, et les A-26 franchissent la frontière, les poursuivant et lâchant leurs bombes sur les positions de l’artillerie adverse.
Les soldats du contingent et la population civile sont sauvés.
Quant au lieutenant-colonel Lisbonis, il s’envole pour Paris.
Non pas pour être félicité mais par mesure disciplinaire.
Le gouvernement lui reproche d’avoir enfreint les ordres et d’avoir gravement compromis les pourparlers d’Evian, même au prix de la vie de quelques centaines de jeunes soldats français.
Le 14 mars 1962, le commandant de la base aérienne de Bône-les-Salines est mis aux arrêts pour avoir riposté aux attaques de l’ALN contre le barrage et sauvé quelques centaines de jeunes soldats et de civils français.
Manuel Gomez