La démocratie, de Périclès à Bouteflika

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Conseil des ministres présidé par Abdelaziz Bouteflika le 5 juin. D. R.

Par El-Hadi – Il faut, peut-être, une certaine inconscience pour écrire sur la démocratie. Le facteur qui devrait décourager toute tentative est, bien sûr, l’extraordinaire profusion de la littérature qui lui est consacrée. Il y a vingt-cinq siècles, elle se trouvait déjà au cœur des discussions politiques dans le monde grec. Elle l’est encore de nos jours, et même bien davantage.

Les lendemains du totalitarisme ont relancé la question éthique, favorisant une réactualisation de l’idée démocratique ; et, comme la plupart des régimes contemporains se réclament de ce mode de gouvernement, elle est devenue indissociable d’une réflexion sur l’action politique.

Profusion mais aussi confusion – celle qui résulte immanquablement de la diversité des discours tenus dans des contextes non comparables, avec des préoccupations peu compatibles.

Déjà, le magnifique éloge de la démocratie prononcé par Périclès, au début de la guerre du Péloponnèse, n’avait pas le même statut que les considérations philosophiques d’un Platon. Il en va de même aujourd’hui.

Le mot démocratie appartient, en effet, à divers univers de langage. Et d’abord, à celui de la vie politique quotidienne. L’usage constant qui en est fait révèle sans aucun doute la volonté d’affirmer des convictions : mais il s’inscrit aussi dans des luttes tactiques. Là où la référence démocratique fait l’objet d’un consensus à peu près unanime, il est habile, en effet, d’en faire un argument de combat pour embarrasser un rival, légitimer un programme de réformes, contester les méthodes du gouvernement en place.

En outre, l’époque n’est pas si éloignée où la revendication de «démocratie réelle» signifiait rien moins que l’attente d’une révolution sociale. Parallèlement, la démocratie est érigée en concept théorique par l’analyse savante : celle des philosophes, celle aussi des juristes, des sociologues ou des politistes.

Pour les premiers, elle constitue souvent un moyen privilégié d’introduire la préoccupation des valeurs dans la méditation sur le politique. C’est à travers la question de la démocratie qu’est posé le problème de la justice et, plus largement, celui du «bon gouvernement» de la société.

La préoccupation des seconds est plutôt d’identifier les formes institutionnelles de la démocratie de façon à la distinguer clairement d’autres catégories de régimes politiques : autoritaires ou totalitaires.

Quant aux sociologues et aux politistes, ils partagent une ambition globale d’éclairer le phénomène démocratique dans toutes ses dimensions : juridiques et politiques, sans négliger la part du travail symbolique qui lui donne sens.

Enfin, dans cet espace intermédiaire entre discours d’acteurs et discours savants, se glissent des myriades d’essayistes généralement moralistes, qui déplorent et dénoncent les corruptions de l’idéal, proposent les moyens de progresser vers «plus de démocratie». Leur influence sur le façonnement des représentations sociales ne saurait être sous-estimée, car ils alimentent en arguments ou en formules le débat médiatique et, parfois, la réflexion des dirigeants. Les thèmes qu’ils abordent, la confiance ou le pessimisme qu’ils expriment, pèsent sur la manière dont nombre de citoyens perçoivent le régime politique auquel il leur est demandé d’adhérer, voire de participer.

Il existe donc diverses manières de parler de la démocratie, toutes légitimes, selon le point de vue à partir duquel on se place.

E.-H.

Comment (6)

    Salim Medjkoune
    9 juillet 2018 - 17 h 12 min

    @Hakikatoune , c’est absolument vrai et exact ce que vous dîtes, j’ai vu la vidéo de l’interview et c’est littéralement et textuellement , mot à mot , ce qu’il a dit , et je ré-écris à mon tour de mon côté ce qu’il a déclaré :

    « Si je n’ai pas un soutien franc et massif du peuple algérien, je considère qu’il doit être heureux dans sa médiocrité et après tout je ne suis pas forcé de faire son bonheur bien malgré lui ! »

    Anonyme
    9 juillet 2018 - 16 h 07 min

    Pourquoi aller chercher au loin ce qui est né chez nous.
    Si tu veut comprendre le sens de la démocratie, fait un stage dans une tajmaat de nos montagnes où la parole est aux sages et les décisions dans l’intérêt de la collectivités et si tu veut une démocratie qui frôle l’angélisme, fait toi traduire et médite les parôles du philosophe national LAM et notamment celle où il clame « wi vghan atsegam, issegm imanis », c.a.d celui qui veut que ça change dans le bon sens qu’il commence par sa petite personne.

    Hakikatoune
    9 juillet 2018 - 15 h 22 min

    Voici comment Bouteflika voit la démocratie en Algérie et comment il juge « son » peuple s’il ne vote pas pour lui à 99,99 %. Je me souviendrai toujours de cette déclaration qu’il a faîte lors d’une interview à la télévision française (France 2) à la veille de son élection en 1999. Voici textuellement ce qu’il a déclaré à l’époque. C’est vérifiable et « visionnable » encore sur YouTube.

    « Si je n’ai pas un soutien franc et massif du peuple algérien, je considère qu’il doit être heureux dans sa médiocrité et après tout je ne suis pas forcé de faire son bonheur bien malgré lui ! »

    Voilà comment parle « notre » Bonaparte ! Quel mépris pour les algériens !

    Slam
    9 juillet 2018 - 13 h 12 min

    il n’y a que dans nos beaux pays pseudo-démocratiques qu’on DISCUTE de la démocratie.
    Narguée par des totalitarismes Religieux ou Trabendistes, qui lui trouvent quand même des inconvénients.
    Dans les pays démocratiques, on VIT la démocratie.
    Toute la nuance est là.

    LOUCIF
    9 juillet 2018 - 12 h 14 min

    Monsieur El-Hadi , il est vrai comme vous dîtes « qu’il existe diverses manières de parler de la démocratie, toutes légitimes, selon le point de vue à partir duquel on se place » , mais pour le cas de notre pays, si au moins le pouvoir ne continuait pas à refuser la création de parti politique, s’il n’emprisonnait pas des citoyens ou des journalistes pour leurs opinions ou leurs idées, si la justice était vraiment impartiale, si des citoyens avait l’autorisation administrative de s’exprimer dans la rue tout en respectant l’ordre, si le Président Bouteflika ne se prenait pas pour Bonaparte ad vitam æternam, si ses laudateurs ne font pas dans l’excès de zèle, si la société civile, les associations et les syndicats n’étaient pas traqués et menacés, s’il y avait de la transparence dans la gestion et la distribution de la rente et des autorisations d’importations, si on laisser des entrepreneurs privés dynamiques et patriotes faire leur travail , je pense que les citoyens algériens s’en foutraient éperdument que le pouvoir soit entre les mains de Bouteflika, d’Ouyahia , d’ Ould Abbès , de Gaid Salah , du DRS ou de ammi ali ! Ce n’est une question de personne, mais une question de système politique, de gouvernance !

    La démocratie est un éco-système : Etat de droit, justice sociale, indépendance de la justice, liberté de presse, liberté de savoir, de dire et de dénoncer, liberté d’opinion, liberté de culte. Ce n’est surtout pas seulement les élections, ou seulement la légitimité sortie des urnes, loin de là ! Et c’est cet éco-système « minima » que recherchent le plus les vrais démocrates et les vrais progressistes ! Ce sont certes des valeurs difficiles à acquérir mais chaque fois qu’une victoire sur l’un de ces éléments est acquise, c’est la démocratie qui avance !

    CITOYEN
    9 juillet 2018 - 12 h 06 min

    Nous n’avons de cesse de revendiquer la Démocratie synonyme du pouvoir du peuple . En effet depuis les antiques grecs ou bien même depuis la nuit des temps peut être tout en cherchant à trouver la recette miracle pour la concrétisation de cet idéal pour le bien être de tous parce qu’en filigrane c’est le bien être qui est l’aspiration essentielle à cette quête de Démos kratos mais en vain .Winston Churchill le premier ministre Britannique à l’époque de la seconde guerre mondiale écrivain et penseur de son état disait bien que c’était le moins mauvais système politique que l’on connaisse ce qui sonne de cet aveu au gout amer comme une déception ou tout le moins un constat d’échec . Depuis Platon donc les politique et les philosophes se sont attelés à définir des formes de représentations diverses en invoquant des procédés tout aussi divers dans lesquelles les populations serons entièrement impliquées . Platon à même émis l’idée d’un tirage au sort par le biais duquel tous citoyen aurait la chance de pouvoir accéder à l’exercice du pouvoir et gérer les affaires de la cité au moins une fois durant sa vie . De nos jour le suffrage universel est considérer comme la panacée mais sans qu’il y est concrétisation dans la réalité d’ou l’aveu au gout amère de Churchill .Parce qu’a bien regarder le suffrage universel renvoie au sacro-saint principe que l’idéal humain s »est depuis toujours forger de l’égalité des chances donc au principe de l’équité et par voie de fait de JUSTICE , il convient donc par conséquent de revendiquer la justicratie ; comprendre la justice par le peuple et pour le peuple ; puisque la démocratie lui est subordonnée . Mais pour que le peuple puisse produire la justice il faut d’abord qu’il sache ou es le juste donc le savoir est primordial pour le discernement du juste de l’injuste mais non suffisant car en plus le peuple doit aussi vouloir traduire le savoir acquis du juste sur le terrain social donc il doit être animé de valeurs morale de conscience et de soucis de l’intérêt publique donc la justicratie ne peut s’accommoder de MEDIOCRATIE ;comprendre médiocrité du peuple ( gouvernants et gouvernés , élites et masses confondus ) ; qu’il faut combattre en toute priorité …

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