Le discours d’Abdelkader Bensalah va à contre-sens des attentes du hirak
Par Karim B. – Finalement, Abdelkader Bensalah n’a rien annoncé. Son discours à la nation, la veille des manifestations de vendredi, risque plutôt d’attiser la colère des citoyens qui réclament son départ ainsi que celui du Premier ministre, Noureddine Bedoui.
L’intervention du chef de l’Etat, ce jeudi, vient en écho à l’appel lancé par le chef d’état-major dans son dernier discours pour un dialogue visant à trouver une solution consensuelle à la crise politique qui va en s’enlisant. Un dialogue que la rue rejette en bloc car considéré comme une tentative de contourner les revendications du hirak et d’entretenir le statu quo.
Abdelkader Bensalah, qui a paru affaibli, semble prendre sur lui la lourde responsabilité de poursuivre sa mission constitutionnelle contre son gré. Non qu’il y soit forcé par l’institution militaire, mais parce que, comme il l’a précisé, le contexte dicte qu’il continue d’assurer la fonction suprême jusqu’à l’élection d’un nouveau président de la République qui aura toutes les prérogatives nécessaires pour conduire les réformes. L’occupant provisoire du palais présidentiel d’El-Mouradia laisse entendre, ainsi, que rien ne sera fait tant que les urnes n’auront pas tranché.
Or, les conditions sont loin d’avoir été réunies pour convaincre les citoyens de voter, ces derniers considérant que le chemin vers les élections devra être balisé par une personnalité qui ne se serait pas rendu «complice» du régime Bouteflika et de son aréopage, accusé d’avoir accaparé les richesses du pays, ou d’une instance indépendante qui regrouperait plusieurs membres répondant aux critères exigés par les manifestants qui se préparent à occuper la rue en grand nombre ce vendredi en guise de réponse à ce qu’ils pourraient juger comme une nouvelle provocation du pouvoir.
Les critiques à l’égard du chef d’état-major de l’ANP risquent d’être acerbes également car les opposants aux solutions proposées jusque-là estiment que toutes les offres faites par la hiérarchie militaire ne correspondent pas à leurs demandes formulées à travers les slogans brandis chaque semaine depuis le 22 février dernier.
Rien n’est encore réglé. Pire, la sortie de Bensalah pourrait, le harassement aidant, attiser les tensions entre les manifestants et les services d’ordre. Quoi qu’il soit, nous connaîtrons la réponse de la rue dans moins de vingt-quatre heures.
K. B.
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