Perdant dans la normalisation entre Rabat et Tel-Aviv : Macron drague Alger
Par Nabil D. – Le plus grand perdant dans le pacte de normalisation entre le Maroc et Israël, imposé par Donald Trump en échange d’une hypothétique reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental – un pas que même Netanyahou n’a pas osé franchir –, est sans doute la France. Elle perd, en effet, son protectorat et tous les avantages dont elle tire profit depuis l’«indépendance» accordée par de Gaulle au royaume chérifien en 1956 pour se concentrer pleinement sur l’Algérie.
En poussant le Maroc dans les bras d’Israël, les Emirats arabes unis escomptent le plus grand dividende du plan de reconfiguration de la carte du Moyen-Orient et du Maghreb. Si Abu Dhabi s’est empressé d’ouvrir un consulat dans la ville occupée de Laâyoune, ce n’est pas pour y faire de la figuration et encore moins pour les beaux yeux de Mohammed VI et du Makhzen. L’objectif est éminemment économique et les Emiratis comptent bien exploiter à leur profit leur rôle d’entremetteurs dans le dégel des relations entre un certain nombre de pays arabes et l’Etat hébreu.
La France va voir ainsi le Maroc, où elle régnait en maîtresse absolue, devenir une chasse gardée des Emirats arabes unis, d’Israël et des Etats-Unis qui vont se partager le territoire dans une sorte de second Yalta où la France ne gardera que des miettes ou en sera carrément exclue.
C’est pour contrer cette offensive israélo-américaine que Macron a, semble-t-il, décidé de dépêcher une délégation de haut rang en Algérie pour tenter de se racheter auprès de la nouvelle équipe dirigeante après une série de brouilles depuis la déchéance du président Bouteflika, début 2019. «Cette fois-ci sera la bonne et le président français a mis le paquet pour corriger ses bourdes», croient savoir des sources proches du dossier. «La décision d’envoyer des émissaires à Alger remonte à plusieurs semaines, et les deux parties n’attendaient que le retour du président Tebboune de son séjour médical en Allemagne pour rendre effective la visite de responsables politiques de haut rang en Algérie», précisent nos sources.
Les Etats-Unis vont faire du Maroc un nouveau débouché pour leurs armes, tandis qu’Israël et les Emirats vont créer une série de joint-ventures dans plusieurs secteurs pour s’implanter durablement chez nos voisins de l’Ouest où ils comptent prendre des parts importantes dans toutes les affaires, jusque-là propriété exclusive de la famille régnante et de l’aréopage de courtisans proches du Makhzen. Les entreprises israéliennes et émiraties accapareront ensuite la totalité des investissements à venir dans des domaines déjà préétablis, à savoir la pêche, le tourisme, l’industrie et l’agriculture.
«L’Algérie, assurent nos sources, négociera en position de force car tous les arguments économiques et géopolitiques plaident en sa faveur en tant que pays pivot sans lequel aucun effort, ni aucune action visant à garantir un retour de la paix et de la stabilité en Afrique du Nord, dans le Sahel et dans le Bassin méditerranéen n’est possible face à des périls qui vont grandissants.»
N. D.
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