Entre trahisons et alliances : la survie du trône seule et unique priorité au Maroc
Par A. Boumezrag – Depuis sa toujours, le trône marocain a mené une danse fumeuse entre loyauté de façade et opportunisme, entre fausse solidarité régionale et intérêts personnels. Entre alliances inattendues et choix controversés, on pourrait presque croire que la devise du royaume est : «Toujours protéger le trône, peu importe le prix payé par les peuples.»
Le trône marocain n’est pas tombé du ciel : il a été consolidé par les puissances coloniales. La France et l’Espagne ont structuré le royaume pour qu’il serve leurs intérêts, légitimant le roi à la fois comme symbole religieux et instrument de contrôle politique. Dès 1956, la monarchie a hérité de ce rôle double : gardien de la nation et allié tacite des puissances étrangères. Cette dualité a jeté les bases d’une diplomatie où la survie du trône prime sur l’intérêt des peuples.
Sous Hassan II, le Maroc a compromis l’unité maghrébine. La question de l’occupation illégale du Sahara Occidental a montré une priorité claire : consolider le pouvoir central plutôt que favoriser une solidarité régionale. Sur la scène arabe, le roi n’a pas hésité à suivre des lignes diplomatiques machiavéliques, au détriment des causes palestinienne et arabe. Le maintien d’une stabilité interne et l’alliance avec les puissances occidentales ont façonné un modèle où loyauté et opportunisme se confondent.
Avec Mohammed VI, la monarchie poursuit cette logique de survie politique. Dans le calcul du palais, les Accords d’Abraham, officialisant des relations avec Israël sont censés sécuriser la légitimité internationale et protéger le trône contre toute instabilité interne. La diplomatie marocaine apparaît comme un subtil mélange d’opportunisme, de complicité avec les puissants et de rationalisation des trahisons historiques.
L’ombre de la complicité plane également sur l’économie et la géopolitique. La question sahraouie illustre parfaitement ce dilemme : le pillage des ressources naturelles et l’exploitation de territoires colonisés se sont faits au prix de la dépossession d’un peuple. La monarchie s’inscrit ici dans une logique classique des Etats colonisateurs, alliés aux puissances économiques et militaires, mais annihilant sa légitimité morale.
Dans le cas marocain, il ne s’agit pas uniquement de trahison, mais également d’un calcul politique : comment préserver un trône dans un environnement postcolonial, régionalement instable et globalement soumis aux puissances extérieures ? Chaque alliance, chaque compromis diplomatique ou économique peut être lu comme une trahison ou comme un instrument de survie monarchique. Entre ces deux visions se joue la perception publique et historique de la monarchie marocaine.
L’histoire du trône marocain, depuis l’héritage colonial jusqu’aux alliances contemporaines avec Israël et certaines puissances occidentales, est celle d’une monarchie qui a toujours placé sa survie au-dessus des idéaux collectifs. Trahison des peuples, complicité avec les puissants, contrôle des ressources et diplomatie calculée : chaque acte de la monarchie s’inscrit dans un équilibre fragile entre légitimité interne et stratégies externes. Entre calcul et morale, la monarchie marocaine reste un exemple vivant des dilemmes du pouvoir : préserver le trône, même au prix de la conscience historique et de la solidarité régionale.
Le pouvoir marocain, pour survivre, a préféré la complicité aux principes, la sécurité du trône aux espoirs des peuples, traçant une ligne fragile entre trahison et rouerie.
Au final, le roi reste fidèle à une seule «cause» : celle de son propre trône. Solidarité arabe, unité maghrébine, droits sahraouis ou palestiniens : autant d’idéaux que l’histoire rangera dans les tiroirs, à côté des alliances opportunes et des calculs géopolitiques. Après tout, qui a besoin de loyauté quand on peut avoir la pérennité d’un pouvoir acquis ad vitam ad aeternam ?
A. B.