Omar Brouksy à Algeriepatriotique : «Le régime monarchique entrave la modernisation du Maroc»

Algeriepatriotique : Vous vous apprêtez à publier en France un livre sur le roi du Maroc. De quoi parle-t-il ?

Algeriepatriotique : Vous vous apprêtez à publier en France un livre sur le roi du Maroc. De quoi parle-t-il ?
Omar Brouksy : Le livre évoque quinze années de règne du roi Mohammed VI et met l’accent, à travers un certain nombre de faits, connus et moins connus, sur les problèmes – liés notamment à la nature du régime monarchique – qui entravent la modernisation politique et sociale du Maroc. Il évoque plusieurs aspects du règne de Mohammed VI : de son itinéraire depuis qu’il était prince héritier à ses décisions les plus marquantes en passant par les relations entre certaines puissances, notamment la France.
D’autres Marocains, avant vous, ont écrit sur la famille royale – un sujet tabou au Maroc – et ont été inquiétés. Avez-vous reçu des menaces ?
Mon livre n’est pas un livre sur la famille royale, mais sur le roi et son système, sur le roi en tant qu’acteur politique déterminant et non sur sa personne. Je n’ai jamais reçu de menace et j’ai toujours vécu dans mon pays, le Maroc, et je continue de vivre dans l’appartement et dans le quartier où je suis né, Mabella, à Rabat.
Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre ?
Il est normal qu’un journaliste qui a travaillé pendant près de 15 ans (au magazine Le Journal puis à l’AFP) sur les questions politiques écrive un livre. C’est donc un livre de journaliste et non un travail universitaire, même si je suis aussi professeur de science politique au Maroc. Il est le résultat d’un travail d’enquête et de recherche qui a duré plus de quatre ans, entrecoupé par le Printemps arabe qui est une période courte, mais très marquante dans l’histoire récente de mon pays.
Le Makhzen vend une image d’un régime démocratique, d’une économie dynamique, etc., alors que les voyants sont au rouge. Comment décririez-vous la situation politique, économique et sociale au Maroc aujourd’hui ?
La situation politique et économique aurait pu être meilleure si le régime politique marocain avait choisi dès le début l’option démocratique, difficile, certes, mais qui suppose une justice indépendance, une presse libre et dynamique et une répartition plus égalitaire, et surtout transparente, des richesses. La démocratie suppose surtout la responsabilisation politique de ceux qui dirigent effectivement le pays à travers des mécanismes pacifiques (élections et sanction politique par le vote populaire). Ces mécanismes sont très limités au Maroc, car le roi règne et gouverne, et il est «intouchable». Le gouvernement, lui, fait de la figuration.
Les relations entre le Maroc et l’Algérie traversent une période délicate. Pensez-vous que le problème du Sahara Occidental en soit la seule raison ? Autrement dit, sans ce conflit, les relations algéro-marocaines auraient-elles été meilleures ou, au contraire, seraient-elles aussi perturbées que maintenant ?
Il faut reconnaître que le Maroc, par le biais du roi lui-même, ne cesse d’appeler à la réouverture de la frontière terrestre entre les deux pays voisins. Si la fermeture de cette frontière pouvait s’expliquer il y a vingt ou dix ans, elle paraît aujourd’hui absurde et totalement contreproductive. Un gâchis. Au lieu de cela, les dirigeants algériens préfèrent un statu quo qui favorise un climat de tension permanent. Pour répondre à votre question, je ne pense pas que le dossier du Sahara Occidental soit le seul problème. Pour le peuple algérien, et ça je l’ai constaté lors de ma visite à Alger en 2007, ce dossier est tout à fait secondaire, voire à peine connu et il ne devrait, en principe, constituer aucun enjeu entre les deux pays. Il faut dire que les deux peuples algérien et marocain, loin des petits calculs politiciens des dirigeants des deux pays, sont favorables à une décrispation et un rapprochement. Le gâchis est astronomique. Mais comme les deux Etats ne sont pas démocratiques, les peuples ne sont pas souverains.
Y a-t-il des voix qui appellent de l’intérieur du Maroc à l’instauration d’un régime républicain ?
Je ne suis pas particulièrement favorable à un régime républicain. Je suis pour une monarchie parlementaire, à l’espagnole, dans laquelle le roi règne et ne gouverne pas, et où la souveraineté émane du peuple. Je suis tout simplement pour un Maroc démocratique.
Propos recueillis par Mohamed El-Ghazi
 

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