Protesta des policiers : le suspense reste entier sur le sort du général-major Abdelghani Hamel

Sur leur première exigence, le départ du général-major Abdelghani Hamel, directeur général de la Sûreté nationale (DGSN), les policiers frondeurs n’ont rien obtenu, mais sur le reste, c’est-à-dire les revendications socioprofessionnelles, ils ont eu gain de cause sur tous les points, y compris pour la constitution d’un syndicat autonome. Ceux qui connaissent bien le mode de traitement réservé par le pouvoir aux mouvements revendicatifs quand ils portent sur le départ d’un responsable ne sont pas surpris en constatant que le sort du DGSN n’a pas été encore tranché publiquement, et ils savent qu’il quittera son poste, si telle est la décision du président de la République, qui a cette prérogative, bien après que les choses se soient tassées, c'est-à-dire une fois que tout le monde aura oublié que c’est essentiellement pour cette raison que les policiers ont osé franchir le Rubicon. En tout cas, pour le moment, rien, selon les informations disponibles, n’indique que le général-major Hamel fera exception à cette règle. Il pourrait rester à son poste le temps qu’il faudra pour que son départ éventuel n’apparaisse pas comme le signe que le pouvoir a cédé à une revendication exprimée par la rue. La manifestation spectaculaire des policiers en tenue a été une «première» dans l’histoire du pays, mais elle ne changera pas les pratiques du pouvoir qui n’a jamais démis quelqu’un de son poste de responsabilité sous la pression exercée à partir de la rue. Or, dans ce cas, il ne s’agit pas d’un «simple» DG d’une entreprise publique ou d’une administration centrale quelconques, mais d’un élément dont la nomination, dit-on, répond au fameux critère de l’équilibre des forces entre les clans du pouvoir. On comprend pourquoi le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, n'a pas abordé, dans son point de presse, après la séance de négociations avec les représentants des policiers frondeurs, le premier point dans la plateforme de revendications des protestataires qui consiste en la démission de Hamel. La question est donc toujours posée : quid de Hamel dont les policiers demandent le départ ? Va-t-il démissionner ? Sur cette question aussi, il n’est pas dans les habitudes des responsables, à ce niveau, de démissionner, sauf s’ils y sont poussés par le chef hiérarchique, dans ce cas, non pas par le ministre de l’Intérieur dont Hamel dépend pourtant, mais par le président Bouteflika. On ne peut oublier que le DGSN a toujours été un élément essentiel du dispositif du pouvoir. L’hypothèse forte est que le gouvernement va temporiser avant de le désigner à une autre fonction pour ne pas paraître comme ayant cédé à un chantage. Mais si Hamel n'est pas limogé immédiatement, les protestataires vont-ils se contenter des acquis matériels annoncés par Belaïz et confirmés par Sellal ? Accepteront-ils qu’un sursis soit accordé au DGSN ? Dans son point de presse, le Premier ministre a laissé entendre que des sanctions seraient prises contre les responsables au sein de l’administration de la police, auteurs de «dépassements» contre leurs subordonnés si les enquêtes le prouvent. Mais rien ne laisse penser que cette promesse de Sellal concerne le sort de Hamel. Cela dit, on ne sait pas ce qui est reproché au DGSN par ses détracteurs et on ne sait pas aussi si cette revendication fait l’unanimité au sein de tout le corps de la police. Certains parlent des mesures prises par Hamel pour «normaliser» et moderniser la police et surtout la soumettre aux exigences du respect des droits de l’Homme dans le traitement des personnes interpellées. Il semble que la charge de travail qui a été imposée, spécialement, aux unités d’intervention, ne soit pas étrangère à leur ras-le-bol. Déployés dans la rue pour des durées indéterminées, le plus souvent pour réprimer les manifestations de citoyens mécontents – comme eux en ce moment – ou pour assurer le service d’ordre d’activités, qui sont plus inspirées par des lubies des autorités civiles locales que pour répondre à des besoins réels, il leur est arrivé de rester dans leurs bus toute une journée sans intervenir parce que les organisateurs de la manifestation ont décidé de changer de lieu ou de l’annuler. Il est évident que si les libertés étaient plus largement respectées et si les administrations prenaient correctement en charge les revendications des populations et des travailleurs, les policiers auraient moins de raisons d’intervenir et ne le feraient que dans les cas réels de trouble à l'ordre public.
Houari Achouri
 

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