Monique Hervo : témoignage poignant d’une militante au service de la cause algérienne

Telle une mémoire ambulante, l’octogénaire se rappelle des moindres gestes et faits de ces familles algériennes dont elle a fini par partager le militantisme, au point de faire partie des milliers de personnes sorties le 17 octobre 1961 manifester contre le couvre-feu discriminatoire qui leur a été imposé par Maurice Papon, alors préfet de police de Paris. Racontant comment elle s’est retrouvée de «ce côté-là», Monique, qui travaillait au service civil international d'un chantier de jeunes qui retapaient des taudis, dit se souvenir de cette année 1959 lorsqu’elle fut alertée, avec un groupe de jeunes, pour intervenir dans un bidonville à Nanterre suite à un incendie. «C’est là que j’ai eu mon premier contact avec la population algérienne, alors que, jeune Parisienne à l’époque, j’ignorais l’existence même de tels baraquements à la périphérie de la capitale française», témoigne-t-elle, ajoutant qu’elle avait depuis choisi de rester auprès de ces marginalisés qui l’avaient reçue «à bras ouverts». Pour la militante humaniste, son engagement avec la population algérienne «n’a rien de similaire, comme parfois rapporté, avec celui d’un porteur de valises». «C’était un partage avec une population que je voulais visible et pas clandestin», précise-t-elle. De son action, elle se rappelle avoir été le «facilitateur» auprès d’immigrés algériens qui avaient du mal à faire venir leurs familles en France. «Je leur confectionnais de faux papiers de travail, justificatifs qu’ils présentaient pour faire venir épouses et enfants, souvent parqués dans des camps de regroupement familial», confie Monique Même si elle affirme que son combat était «apolitique», elle admet avoir été approchée par le FLN. «J’étais sollicitée notamment après les massacres d’octobre 1961. Le FLN me demandait, avec d’autres filles engagées, à aller rassurer les femmes du bidonville dont les époux ou frères ont été interpellés suite à la marche qui a été réprimée dans le sang», témoigne la militante. Elle se rappelle avoir vu ce jour du 17 octobre 1961 le bidonville de la Folie se vider. Son témoignage concernant cette séquence de sa vie de militante est repris dans le film de Panijel, Octobre noir, sorti enfin en salle en 2011.
«C’était la panique générale. Les casques bleus commençaient à tirer sur les marcheurs à leur arrivée au pont de Neuilly. Ceux-ci se sont dispersés et ont tenté un retour vers le bidonville par Puteaux», relate Monique, qui se rappelle d’un bidonville qui avait au soir pris les allures d’un « hôpital de campagne». «Blessés par milliers, tabassés ou torturés, ceux qui ont eu la chance d’être relâchés rentraient directement au bidonville, évitant l’hôpital départemental de crainte d’être mis en taule», témoigne-t-elle, se rappelant avoir vu des milliers de personnes portant des traces de sévices.
R. C.

 

 
 

Pas de commentaires! Soyez le premier.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.