De l’usage des adjectifs
Par Karim Bouali – Les mots ont leur poids chez les partisans du 4e mandat pour Bouteflika. Il n’est pas rare, par exemple, de trouver, presque accolés, les deux termes «spontané» et «indépendant», qui reviennent comme un leitmotiv dans les communiqués et déclarations pro-Bouteflika, émanant d’organisations ou parfois de «collectifs», une notion qui n’est également pas innocente du tout, puisqu’elle permet de mieux occulter le caractère préfabriqué de l’activité destinée à soutenir le président-candidat. En utilisant l’adjectif «spontané», les partisans du 4e mandat veulent prouver que le peuple les «suit naturellement» et «par conviction». Une autre contrainte les oblige à abuser du terme «indépendant». Ils veulent faire croire que Bouteflika n'est rattaché à aucun parti et encore moins à l'administration qui, pourtant, est mobilisée pour en faire le président pour la quatrième fois. Bouteflika est censé avoir répondu «spontanément» et en toute «indépendance» à l’appel de la société civile pour se lancer dans la compétition et briguer encore la magistrature suprême alors qu’il y a moins de deux ans, à Sétif, il avait laissé croire qu’il allait quitter les rênes du pouvoir, accompagné par les autres membres du «système» ainsi que tout le monde l’a compris à travers la formule «tab djenenna» (notre époque est finie). La tâche n’est pas facile, car les faits sont éloquents : côté classe politique, une aile du FLN a proclamé Bouteflika comme le candidat de l’ex-parti unique avant l’annonce par l’intéressé de sa candidature et, côté administration, il n’y a qu’à voir la composition du staff de la campagne électorale du président-candidat pour comprendre à quel point elle est engagée dans cette élection. Mais, visiblement, les choses se corsent et il est à craindre, au lendemain du 17 avril, une escalade entre Benflis et le clan Bouteflika qui déboucherait on ne sait sur quoi exactement, mais qui ne serait pas du tout dans l’intérêt de notre pays.
K. B.
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