Le leurre d’un discours

La campagne électorale du président sortant et réélu pour un autre mandat présidentiel de cinq ans a été basée essentiellement sur deux choses : la sécurité et la stabilité. On nous a, durant trois semaines, presque perforé les tympans avec ces deux mots. Dans le programme politique du candidat susmentionné abstraction a été faite pour tout ce qui concerne les autres domaines et particulièrement l’économie qui, qu’on le veuille ou non, doit être le moteur principal de toute campagne électorale. Un pays qui dépend, pour nourrir ses habitants, pour les habiller, pour les éduquer, pour leur assurer le strict minimum, en un mot pour sa survie, à 98% de ses importations d’hydrocarbures ne peut se targuer d’avoir une économie. Les Algériens attendent beaucoup de ce côté-là, ils veulent en finir avec l’économie de bazar, ils veulent voir leur pays s’engager véritablement dans une économie qui ne soit pas de rente, mais une économie productive de biens finis. Or, jusqu’à maintenant, cinquante ans après l’indépendance, force est d’admettre que nous importons tout. Les chinoiseries ont envahi nos souks et nos espaces commerciaux. Il n’est pas un seul commerce où le «made in Algeria» attire le regard de la ménagère ou du bon père de famille. Les seuls qui en tirent bénéfice, ce sont ces importateurs qui accumulent des richesses sans «mouiller le maillot». Qu’ils investissent au moins leur surplus, ne serait-ce que dans des briqueteries et des clouteries. Cela en guise de préambule.
Car, en vérité, là où je veux en venir, c’est à cette tragédie, survenue le lendemain de la proclamation des résultats de cette mascarade électorale, qui vient contredire tout ce qui a été avancé comme argument massue en faveur de la réélection d’A. Bouteflika. Cette embuscade qui a coûté la vie à une quinzaine de nos soldats (qui sont des enfants du peuple) vient nous rappeler, douloureusement, que la sécurité dont on nous a largement abreuvé durant cette campagne électorale n’est qu’une simple vue de l’esprit. Le terrorisme est toujours là. Tapis dans les maquis de la Kabylie ou d’ailleurs et n’attend que son heure pour agir. Il n’a pas encore épuisé son «quart d’heure résiduel» pour reprendre l’expression d’un commis de l’Etat qui, après avoir été évincé comme un pestiféré du premier cercle du pouvoir, est revenu, toute honte bue, pour faire la promotion du candidat malade. De ce fait, la vigilance devrait être toujours de mise. Il est vrai que sur le plan sécuritaire, on est plus dans les années 90, mais de là à dire que le pays est sécurisé à 100% grâce à la politique de réconciliation de fakahmatouhou, je crois que c’est un leurre. Sur ce plan-là, il reste encore beaucoup de chemin à faire. Alors, qu’y a-t-il lieu de faire, me diriez-vous ? Relancer le «tout sécuritaire» ? Revoir la politique de la réconciliation nationale ? Fermer les yeux et faire comme si de rien n’était ? Apparemment, nous sommes devant une équation difficile à résoudre. Toujours est-il que cela fait beaucoup de peine de savoir que de jeunes soldats ont été fauchés au printemps de leur vie par la main criminelle d’un terrorisme qui aux yeux des partisans du 4e mandat n’est qu’un vague et douloureux souvenir. Ces gens-là ont berné le peuple algérien qui leur a donné le quitus de poursuivre leur «grandiose œuvre», il leur appartient donc, à eux, de trouver la solution pour que, dorénavant, nulle mère, nul père ne pleureront leur enfant déchiqueté par une bombe artisanale ou par l’obus d’un hebheb.
Quant à la stabilité, on a beau la chercher, on ne voit que vaguement ses contours. Ghardaïa n’a pas encore mis de l’ordre intra-muros, les voitures calcinées juchent toujours ses trottoirs, voilà qu’au nord, en Kabylie, le printemps berbère s’annonce des plus chauds.
Abdelaziz Ghedia
 

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