«Céder pour vaincre» contre la technique du statu quo

L’ardeur d’en découdre et d’en finir avec le régime politique en place envahit une large frange de la société. Pourtant, à y regarder de près, l’on est bien forcé d’admettre que tout concourt au maintien du statu quo. L’exigence de changement de régime semble, particulièrement dans notre pays, hors de portée. Le régime cède, pendant les périodes électorales, beaucoup plus pour déséquilibrer ses adversaires et reprendre toute son autorité après avoir jaugé sa puissance. La «majorité» des Algériens qui continuent à voter n’ont pas conscience d’exercer un acte de citoyenneté, mais un acte de soumission au tuteur, autorité dont la capacité la met naturellement en position de pouvoir décider seule de ce qui convient pour la collectivité. Cette attitude ne relève pas d’un choix politique, mais d’une composante sociétale et culturelle de l’individu. Les résultats des élections pendant la période du «FIS» confirment cet état d’esprit. Les jeunes savent que l’autorité ne reconnaît pas l’opposition officielle : en barricadant les rues, le wali demande à voir deux ou trois protestataires, pas les politiques. Cette logique tutélaire n’accepte pas le changement rapide. Les Algériens savent que le pouvoir politique n’est pas exercé par les institutions : le Parlement n’a pas le pouvoir de légiférer, la justice n’est pas autonome et le pouvoir d’un ministre s’exerce devant la télé. Ils savent que le pouvoir effectif est dans les institutions informelles. Dans leur esprit, les citoyens pensent que la conduite des affaires politiques n’est possible et effective que par l’autorité militaire, naturellement plus légitime pour s’acquitter d’une telle tâche (les meilleurs universitaires s’engagent dans les institutions d’autorité). Les votants estiment la force des «partis de l’opposition» aléatoire par rapport au pouvoir en place, qui assure leurs conditions de vie (par la manne) et par sa faiblesse à maîtriser les situations dans l’informel qui est une autre source de leur revenu. Ces «partis d’opposition» réagissent aux événements par des récriminations, et n’ont jamais créé d’événements qui mobilisent ; seule la réunion de Sant’Egidio a déstabilisé le pouvoir de cette période. Ils restent soumis au discours du pouvoir sur la stabilité, car incapables de se présenter comme l’alternance. En lisant les contributions et les prises de position de personnalités, nous vivons actuellement une conjoncture favorable à la création d’une force qui puisse mettre en défaut le pouvoir en place, dans le cadre de la logique tutélaire, car la majorité ne veut pas de cet idéal sans des conditions de sécurité de leur avenir immédiat. Il ne suffit pas de se donner des institutions solides avec comme principe «la loi au-dessus de tous», encore faut-il que les normes de comportements changent. Le discours populaire et non populiste doit être celui des jeunes et des solutions pour tout de suite. Ce discours doit transmettre une vision et une image à brève échéance, car ces jeunes ont perdu beaucoup de temps à chercher la réussite par la violence. Le discours politique (sur le programme) n’est pas une priorité dans l’immédiat.
Beni Caïd
 

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