Dossier – Le groupe Daech : une multinationale terroriste au service des économies occidentales

La création du mouvement terroriste Etat Islamique (Daech) ne répond pas qu’à des objectifs géopolitiques, notent des observateurs sollicités par Algeriepatriotique. «La création de ce mouvement sanguinaire visait aussi à s’emparer des raffineries de pétrole et mettre en place tout un système de vente au noir de cette énergie à des prix extrêmement bas.» Ces experts confirment que le baril est cédé à six dollars, soit dix fois moins que les cours actuels. «Le marché parallèle du pétrole a grandement contribué à l’effondrement des prix, mais il faut savoir que cette stratégie diabolique est intervenue à une période où le baril du pétrole atteignait allègrement les 140 dollars», rappellent-ils. Greffée aux graves problèmes financiers qui ont secoué les Etats-Unis et l’Europe de l’Ouest suite à la crise des subprimes de 2007, cette montée des prix a freiné la croissance et creusé les déficits dans ces pays. Selon des négociants en pétrole, la guerre déclenchée par la France et la Grande-Bretagne en Libye représentait un enjeu considérable. La chute du régime de Kadhafi, et son assassinat commandité – et peut-être même exécuté – par les services secrets étrangers, a été suivie d’une opération d’accaparement des richesses à travers l’ouverture de négociations avec les milices formées et armées par Paris et Londres et appuyées par plusieurs armées occidentales, dont celle des Etats-Unis. Ces négociants avouent avoir été en contact avec les rebelles dans une Libye chaotique et ne pas s’embarrasser de scrupules lorsqu’il s’agit de «se faire de l’argent». Le pétrole écoulé au marché noir passe par des intermédiaires qui le revendent aux Etats par des voies détournées. Ces Etats tirent ainsi les ficelles et gagnent sur plusieurs plans : ils achètent du pétrole au rabais clandestinement et sans aucune traçabilité ; ils créent un mouvement terroriste barbare et lui assurent une couverture médiatique démesurée pour donner l’impression d’une menace mondiale, justifiant ainsi la vente de nouvelles armes ; ils essaiment ces groupes terroristes sans foi ni loi dans les pays qui leur tiennent tête, provoquant des guerres civiles meurtrières sans y prendre part directement. Des négociants ont expliqué, d’ailleurs, que la guerre qui faisait rage en Libye n’a pas empêché les traders de faire du business, les uns à Benghazi, les autres à Tripoli, en faisant fi des tendances politiques et idéologiques des belligérants. Le négoce nécessitant une logistique lourde, des banques interviennent pour financer ces opérations de spoliation des richesses des pays ravagés par des guerres civiles programmées, notamment l’Irak et la Libye. Les scandales à répétition qui éclaboussent la place financière genevoise confirment cette complicité rendue possible par le fameux secret bancaire. Mais des scandales qui seront étouffés, car impliquant des Etats dans une action immorale menée par des sociétés de négoce toutes basées en Suisse.
Faux califat, vrai business
Le groupe terroriste Daech vient de prendre le contrôle de deux champs pétroliers situés dans le centre de la Libye. Les champs en question sont Al-Bahi et Al-Mabrouk, à 200 km au sud de Syrte. Les terroristes comptent s’emparer d’un troisième champ, celui d’Al-Dahra, après que les forces gouvernementales s’en sont retirées. Avant la Libye, les éléments de ce groupe issu d’une branche d’Al-Qaïda ont pris possession des principaux champs pétroliers et gaziers en Irak et en Syrie. Cette organisation terroriste qui avait annoncé l’établissement d’un califat sur les territoires conquis à cheval entre l’Irak et la Syrie détient 20 champs pétroliers en tout : treize en Irak et sept en Syrie, ce qui représente 60% de la production pétrolière syrienne et au moins 10% de la production irakienne. Il y a quelques mois, le groupe Daech avait publié sur des sites internet lui appartenant la carte géographique qui engloberait tous les territoires de ce qu’il appelle le califat. Cette carte comprendrait, entre autres, l’Irak, la Syrie, l’Egypte, le Kurdistan, le Kazakhstan, les pays du Golfe, le Yémen, le Caucase, le Maghreb, l’Anatolie, l’Ethiopie et toute la corne d’Afrique. Pourquoi les créateurs de ce groupe terroriste lui ont- il fixé cette feuille de route ? Pourquoi ces pays précisément ? Le dénominateur commun de tous ces pays ce sont leurs ressources naturelles, principalement le pétrole et le gaz. En effet, le Caucase est une région qui commande l’accès au pétrole de la mer Caspienne, l’une des principales réserves avérées. Sur des réserves pétrolières de 143 milliards de barils en Irak, quelque 43,5 milliards se trouvent au Kurdistan, en plus de 25,5 milliards de barils de réserves supposées et de 3 000 à 6 000 milliards de mètres cubes de gaz. Les réserves de brut prouvées du Yémen sont de plus de quatre milliards de barils, soit 640 000 000 de mètres cubes. Celles du Kazakhstan sont estimées à 30 000 000 000 de barils. Le Maghreb regorge de réserves de pétrole et de gaz prouvées, conventionnelles et non conventionnelles. L’objectif réel des pays qui ont donné naissance à cette organisation terroriste est loin d’être uniquement géopolitique. La politique expansionniste programmée du groupe Daech vise non pas à l’établissement d’un califat, comme le prétend leur chef, mais à s’emparer des réserves de pétrole de toute la région du Moyen-Orient et du Maghreb.
Comment Daech exporte-t-il le pétrole ?
L’organisation terroriste Daech dispose d’une fortune estimée à 2 milliards de dollars. Suite à l’exploitation des puits de pétrole qu’ils détiennent, les terroristes de Daech engrangent de 2 à 3 millions de dollars de revenus par jour. Selon l’ex-gouverneur de la Banque centrale d’Irak, 15% du PIB de l’Irak est aux mains de Daech ainsi que 40% de la production nationale de blé et 53% de la production d’orge. Il détient aussi une partie du PIB syrien. Les revenus annuels du ce groupe sont évalués à 2,9 milliards de dollars, tirés de sources de financement diverses. 82% de ce financement provient des ressources qui sont sous son contrôle. Le pétrole représente 1 095 milliards de dollars, soit 38% de ses revenus, et le gaz 489 millions de dollars (17%). Les revenus tirés des rançons et extorsions s’élèvent à 480 millions de dollars (16%). Daech perçoit 800 dollars sur l’entrée en Irak de camions en provenance de Jordanie et de Syrie. Ses revenus provenant du ciment représentent 10% des recettes, soit 292 millions de dollars, contre 10% de son exploitation du phosphate, soit 300 millions de dollars. Cette organisation vend son pétrole à des prix dérisoires, 10 fois moins que le cours actuel, pour le vendre rapidement. Pour l’exporter, elle utilise des réseaux de contrebande kurdes, jordaniens et turcs. Ces derniers dissimulent le pétrole dans les exportations officielles à destination de l’Occident. Il ne peut y avoir de traçabilité une fois que le pétrole arrive en Turquie pour y être raffiné. Aussi, il est impossible d’identifier ceux qui jouent les intermédiaires dans les transactions internationales effectuées par vingt-quatre banques irakiennes et syriennes contrôlées par Daech. Il est aisé de deviner l’impact positif de la vente du pétrole par cette organisation terroriste au marché noir sur les économies occidentales.
Karim Bouali et Mohamed El-Ghazi
 

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