Cent travailleurs bangladais privés de salaire et de nourriture à Alger

Des Bangladais employés dans des chantiers d’une entreprise chinoise chargée de la réalisation de logements LPP se trouvent dans une situation extrêmement grave. Privés depuis six mois de leurs salaires, ces employés, 100 au total, n’ont ni nourriture ni gîte. Ils vivent dans des conditions tellement déplorables que la société de placement de main-d’œuvre basée au Bangladesh se voit contrainte de faire appel à un cabinet d’avocats algérien en vue de réclamer à l’entreprise chinoise les droits de ces employés, garantis par le Code du travail algérien. La société d’avocats Goussanem et Aloui, chargée de défendre ces employés bangladais, parle de «cas humanitaires» vu «la situation lamentable» dans laquelle se trouvent ces travailleurs. Contacté par Algeriepatriotique, Me Khaled Goussanem qualifie leur situation de «très préoccupante», en ce sens qu’ils sont «à la merci de la société chinoise sachant qu’ils sont tous de condition très modeste». L’entreprise chinoise mise en cause n’est autre que Zhejiang Construction Investement Group Co Ltd (ZGIGC). Cette société est mise en demeure de respecter ses engagements contractuels envers les employés bangladais, notamment le paiement des salaires et les conditions de vie, comme convenu dans le contrat signé entre les deux parties, précise l’avocat selon lequel cette affaire remonte au mois de novembre 2013 quand la société ZCIGC chargée de projets LLP pour le compte du ministère de l’Habitat a fait une demande à une société bangladaise pour l’envoi de 700 ouvriers qualifiés en bâtiment. Après un long processus pour l’obtention des autorisations nécessaires (environ une année), un premier contingent d’employés (86) est arrivé en Algérie fin 2014, munis de leur visa de travail, explique l’avocat qui rappelle les conditions du contrat, à savoir un salaire, une prise en charge de la nourriture, de l’hébergement, de l’assurance santé et du déplacement de ces ouvriers. Ce que la société chinoise a accepté en signant un contrat en bonne et due forme avec l’entreprise de placement bangladaise. A leur arrivée en Algérie, les travailleurs ont été scindés en deux groupes : le premier de 49 travailleurs dirigés vers le site de la société à Oued Tlelat (Oran), le second (37) vers un site à Rouiba pour le compte d’une autre société chinoise, en l’occurrence Sarl Constructiuon et Engeneering de Dong Yang Zhe Jiang (Sarl Ceddy), «d’une façon obscure», dénonce le cabinet d’avocat. Et après trois mois de travail, la situation a commencé à se détériorer en raison du non-respect du salaire convenu. Ainsi, contrairement aux termes du contrat, la société chinoise ponctionnait du salaire mensuel fixe prévu chaque jour non travaillé à cause des conditions climatiques. A cela s’ajoutent les mauvaises conditions de vie. «Les ouvriers dorment sur des cartons, ont des toilettes communes, une nourriture non conforme aux préceptes de l’islam, sont victimes d’un traitement inhumain, etc.», précise l’avocat, qui affirme que pour beaucoup de Chinois, «les Bangladais sont des esclaves». Pour protester contre ces conditions épouvantables, les employés bangladais ont cessé de travailler. La société chinoise refuse toute négociation avec eux et décide de ne plus leur fournir de nourriture. Ces travailleurs vivent depuis des dons de la population oranaise et algéroise. Le cabinet d’avocats tente ainsi d’alerter l’opinion publique non pas sur les salaires et le contrat, mais sur la situation dramatique de ces expatriés. «En notre qualité d’avocats, nous avons déjà entamé les démarches légales nécessaires, mais vu que c’est un processus assez long, les employés étant toujours sur les sites de la société chinoise, la situation peut devenir encore plus pénible», prévient Khaled Goussanem. «Les sociétés chinoises refusent, selon ce cabinet d’avocats, de verser les salaires, de prendre en charge les ouvriers notamment sur le plan médical, de leur restituer leurs passeports et de terminer la procédure d’obtention du permis de travail pour qu’ils puissent être embauchés par une entreprise algérienne», dénonce-t-il. Deux employés présents sur le site de Rouiba sont gravement malades, relève l’avocat qui craint pour leur vie. Le pire, ajoute-t-il, est que la société chinoise en question refuse même de payer les billets d’avion pour leur permettre un retour à leur pays. Cela en dépit du fait que le contrat signé entre les deux parties oblige l’entreprise chinoise à payer les frais du transport. Le litige est dans une impasse. Les démarches au niveau de la justice prennent du temps, alors que la situation de ces employés se dégrade de jour en jour et risque de les emporter. Il s’agit de cas que les pouvoirs publics doivent prendre en charge rapidement, le cahier des charges liant la société chinoise et l’Etat algérien stipulant clairement que les ouvriers sont recrutés conformément aux dispositions de la législation algérienne. Nos tentatives de joindre la société chinoise pour avoir sa version des faits se sont avérées vaines.
Rafik Meddour
 

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