La nouvelle mouture calquée sur les propositions du FLN : est-ce la Constitution de Saïdani ?

Les rédacteurs de l’avant-projet de révision de la Constitution ont repris, presque textuellement, les amendements formulés par le FLN et proposés dans le cadre des consultations autour du projet de révision de la Loi fondamentale en juin 2014. On comprend donc mieux pourquoi Amar Saïdani s’est emparé de cette question tout au long de ces derniers mois et se permettait, chaque fois, d’informer l’opinion publique sur l’évolution du projet et sur son contenu. Les 33 propositions contenues dans le document présenté par le FLN ont presque toutes été retenues et reprises parfois à la lettre. Elles vont de l’article 3 bis portant sur le statut de la langue amazighe à l’article 177 relatif aux modalités de révision de la Constitution. Les similitudes entre les deux formulations sont frappantes dans l’amendent de l’article 3 bis, en ce sens que l’avant-projet officiel reproduit jusqu’aux ambiguïtés qui caractérisent l’amendement proposé. Ainsi, le document présenté par le FLN avait proposé notamment la révision de l’article 3 bis dans la forme suivante : «Tamazight, qui est également langue nationale et officielle, constitue, avec la langue arabe, l’héritage culturel et linguistique de tous les Algériens. L'Etat œuvre à la promotion de tamazight et à son développement dans toutes ses variétés linguistiques en usage sur le territoire national.» On trouve la même formulation dans l’amendement proposé dans l’avant-projet final : «Tamazight est également langue nationale et officielle. L’Etat œuvre à sa promotion et à son développement dans toutes ses variétés linguistiques en usage sur le territoire national.» Or, dans la version du FLN, l’article 3 dans l’ancienne Constitution qui stipule que «la langue arabe est la langue nationale et officielle» est demeuré inchangé. Ce qui rend illisible, voire impossible l’officialisation d’une autre langue que l’arabe. Dans la mouture actuelle, les choses deviennent plus compliquées encore, puisqu’il est proposé que «l’arabe demeure la langue officielle de l’Etat». Il y a indiscutablement vice de forme dans la formulation de cette proposition. Pour officialiser tamazight aux côtés de l’arabe, il y a un seul moyen : l’intégrer dans l’article 3. Ce qui n’est pas, ici, le cas. Dans l’explication des «motifs» qui suivent l’énoncé de l’article en question, les rédacteurs du document présenté par le FLN ont écrit : «L’officialisation de tamazight devrait avoir un impact immédiat, plus symbolique que pratique, dès lors qu’il faudra attendre des décennies pour que les efforts de l’Etat pour la promotion de cette langue dans toutes ses variétés linguistiques utilisées en Algérie puissent permettre à la langue amazighe d’exercer son statut de langue officielle.» La mouture actuelle reprend l’essence de la proposition et prévoit la création d’une académie algérienne de la langue amazighe, placée auprès du président de la République. «L’académie qui s’appuie sur les travaux des experts est chargée de réunir les conditions de promotion de tamazight en vue de concrétiser, à terme, son statut de langue officielle.» Les autres suggestions présentées par le FLN concernent des domaines aussi variés que la propriété publique (article 17), la promotion des droits de la femme (article 31), la gratuité de l’enseignement (article 53), la limitation des mandats (article 74), la désignation d’un Premier ministre issu de la majorité parlementaire (article 77), les dispositions régissant les sessions du Parlement (article 118) ou l’indépendance de la justice (article 138). Pour ce dernier article, le FLN avait proposé d’ajouter cette phrase : «L’Etat est garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire.» Dans l’avant-projet retenu, la proposition devient : «Le président de la République est garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire.» La différence est de taille, mais toujours est-il l’idée émane du FLN.
R. Mahmoudi

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