Une contribution de Rabah Boucetta – Nordine Aït Hamouda : le dernier des Mohicans

La virulence de Nordine Aït Hamouda n’épargne personne, dès lors qu’il s’agit de défendre le RCD. Un jour, en évoquant ces coups de gueule récurrents, Saïd Sadi me confia : «Je suis le seul à savoir ce que Nordine a perdu à cause de son engagement avec nous. Il pouvait prendre la moitié de l’Algérie, mais il y a toujours renoncé.» Dans la dédicace qu’il lui a réservée dans son livre sur le colonel Amirouche, Saïd Sadi écrivait : «A Nordine Aït Hamouda, dont la douleur a accouché d’une colère qui a éclairé des zones obscures de notre histoire.» Mais il a suffi à Nordine de s’opposer au candidat choisi par le président réel, et non pas fantoche, du RCD aux dernières sénatoriales pour que la machine du parti se mette en branle afin de broyer le dernier des Mohicans. Ce rouleau compresseur, mis en place depuis la création du parti, a écrasé des centaines de militantes et de militants sincères, et pas des moindres. Le fils du colonel Amirouche a toujours été membre de la direction nationale, deux fois député et à deux reprises vice-président à l’Assemblée populaire nationale. Soudain, il devient infréquentable ! Heureusement que les militants, et ce, pour la première fois, n’ont pas cédé aux chants des sirènes. Par le passé, les militants se rangeaient systématiquement du côté de l’appareil et relayaient aveuglément les insultes et les propos injurieux proférés à l’égard de ces indomptables militants et cadres dissidents. Aujourd’hui, ce que nous observons est inédit ! Nous constatons une retenue exemplaire. Cet état de fait nous renseigne sur l’état d’esprit de ces quelques militants qui restent dans le parti, croyant, naïvement, que le RCD pourrait rebondir un jour. Le seul à avoir compris que le parti ne pèse rien sur l’échiquier politique, c’est son ex-président, le président réel en fait. Et c’est la raison principale de son retrait tactique lors du dernier congrès, tout en continuant à tirer les ficelles derrière le rideau, en attendant des jours meilleurs. Cependant, les journaux de la presse privée continuent à réserver à Saïd Sadi une place importante et participent d’une stratégie qui brouille, à tort ou à raison, la visibilité politique dans un pays où il n’existe pratiquement pas d’organismes de sondage qui nous permettraient de connaître le poids de cet imposteur dans la société.
Aujourd’hui, les militants veulent connaître, et c’est de leur droit, les raisons objectives qui ont accouché de cette situation. Afin de mieux comprendre, je rappelle les propos du président du parti à la veille du congrès de mars 2012. Il disait : «Maintenant que je me suis débarrassé des Lounaouci, Mira, Ferdjellah et Brahimi, je peux m’en aller tranquillement et vous laisser le parti.» Complices que nous étions, nous avions tous applaudi cette «sage décision», mais nous ne nous sommes rendu compte que lorsque l’injustice nous a frappés à notre tour. Tous les cadres du parti étaient complices de Saïd Sadi quand ils étaient dans sa proximité. Il a utilisé feu Mustapha Bacha pour exclure Aït Larbi Mokrane, Amara Benyounès pour écarter Ferhat Mehenni, Djamel Ferdjellah pour éliminer Amara Benyounès, et pour ma part, j’ai servi de fer de lance pour éliminer les Ferdjellah, Mira et Brahimi, avant que je ne sois sacrifié, à mon tour, pour le règne absolu d’un Mohcine Bellabas. Ce dernier mettrait fin à l’épopée Saïd Sadi. Le mobile des exclusions n’est jamais celui évoqué dans les dossiers disciplinaires. Les vraies raisons sont celles que partage le président avec ses proches collaborateurs de la conjoncture. Donc, que reproche-t-on, réellement, à Nordine Aït Hamouda ? Ayant été à la tête du département de l’organique pendant plus d’une dizaine d’années, je pense que je dispose d’un minimum de légitimité afin de produire une analyse pertinente de cette situation. En effet, le parti réagit toujours avec les mêmes procédés. Comme d’habitude, l’appareil actionnera sa machine de propagande pour inventer des histoires à dormir debout. La première étant de qualifier le dissident d’agent du DRS. Ce n’est un secret pour personne que Nordine Aït Hamouda, en tant que chef des patriotes, travaillait sous la responsabilité de cette institution. En décidant de lâcher le fils du colonel Amirouche, Saïd Sadi envoie des signes et propose, en réalité, ses services au président de la République. Sauf que ce dernier n’est, certainement, pas prêt à oublier la manière avec laquelle Sadi l’avait abandonné en 2001. Sacrifiant rituellement des êtres humains en les donnant en offrande aux dieux, les empereurs aztèque, maya et inca expient ainsi leurs péchés. Par le sang des autres, ils appellent les divinités afin de perpétuer leur pouvoir et leur puissance. Mais le sang versé à satiété n’a ni prévenu ni arrêté la marche inexorable des Espagnols qui, en dernière instance, vont étêter les monarques et s’emparer de leurs richesses. Tout a été englouti, corps et biens. Tel est le sort funeste réservé aux sacrificateurs. Avec les temps modernes, dans nos partis dédiés à la gloire de l’ego, les réflexes sont identiques, sauf que la mort est symbolique. Heureusement !
Rabah Boucetta
 

Pas de commentaires! Soyez le premier.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.