Le président de l’APN à la rescousse du secrétaire général du FLN en mauvaise posture

Un communiqué de moins de trois lignes, mis sur le site web du FLN, nous apprend que le président de l’APN, Mohamed Larbi Ould Khelifa, a été «reçu» par Amar Saïdani au siège du FLN, sans donner l’objet précis de leur rencontre. Les discussions «ont porté sur les questions d'actualité», selon ce communiqué. Qu'est allé faire le président de l’APN chez le président d'un parti, fût-il le sien ? Est-ce qu’il s’est invité ou a-t-il été convoqué par son chef de parti ? Que cache cette démarche inédite ? De quels sujets les deux hommes ont-ils discuté ? Pourquoi le FLN communique-t-il sur une rencontre entre deux membres du parti ? Ce ne sont pas les interrogations qui manquent autour de cette rencontre, mais, en replaçant ce fait dans son contexte politique actuel, il n’y a pas beaucoup de lectures à en faire. La plus plaisante est celle qui prête à Amar Saïdani le désir de se montrer dans une posture de chef d’Etat, un message destiné surtout aux militants du FLN et accessoirement à ceux de l’«allié» RND, l’opinion publique étant loin, très loin, de ces considérations. A ce propos, on imagine mal Ahmed Ouyahia recevoir, en tant que chef du RND, son militant Abdelkader Bensalah, président du Sénat et l’annoncer ensuite, en quelques lignes, avec photo à l’appui, sur le site du parti. L’explication de la démarche du FLN est sans doute dans la perte de terrain par ce parti qui n’a pas réussi à créer la nouvelle alliance présidentielle annoncée par l’initiative de Saïdani de ratisser plus large que l’espace occupé par les formations politiques qui soutiennent Bouteflika. On sait qu’entre Saïdani et Ouyahia, l’entente n’est pas parfaite et on peut même ajouter que la cohabitation FLN-RND dans l’alliance présidentielle est conjoncturelle et motivée plus par l’opportunisme des dirigeants de ces deux partis que par une quelconque convergence. On sait aussi que, durant de longs mois, le bruit a couru avec persistance au sujet de la promotion d’Amar Saïdani au rang de deuxième personnage de l’Etat en le hissant au perchoir du Sénat pour remplacer Abdelkader Bensalah qui se remet d’une opération chirurgicale, mais surtout qui est présenté comme peu fiable au cas où le poste de président de la République devenait subitement vacant et qu’il fallait organiser une élection présidentielle anticipée. Enfin, Amar Saïdani sait pertinemment qu’il n’est pas immunisé contre une action de redressement et qu’il «sauterait» de son poste si le groupe des nouveaux décideurs s’entendait sur sa tête. Il veut faire croire qu’il conserve une forte influence sur le président Bouteflika et que c’est le FLN qui oriente les options du pouvoir. Il cite la modification de l’article 51 du projet de révision constitutionnelle, à propos de la limitation de l’accession des binationaux à «certains postes», et prétend aussi que c’est sur proposition du FLN que tamazight a été classée langue nationale et officielle dans le projet de nouvelle Constitution. Le problème, aujourd’hui, est que c’est toute l’opposition qui risque de boycotter le vote au Parlement, et pas seulement les plus grands partis ou les plus en vue, comme le FFS, le RCD et le PT, sans compter le MSP. En face, en faveur du projet présidentiel, il reste seulement le FLN et le RND auxquels sont associés le MPA et l’ANR. Les écueils immédiats rencontrés par le pouvoir s’inscrivent dans un contexte national dont le tableau économique est plus que préoccupant. L’Algérie retourne à une situation de déficit de sa balance commerciale, estimé à 13,71 milliards de dollars durant l'année 2015, contre un excédent de 4,306 milliards de dollars en 2014, selon les chiffres officiels qui indiquent que les exportations ont chuté de 40% en valeur alors que les importations n’ont baissé que de 12%. Le prix du pétrole continue de baisser et se trouve maintenant sous la valeur de référence prise par la loi de Finances 2015 pour le calcul du budget. Cette conjoncture est appelée à durer, selon des experts qui ne sont pourtant ni portés vers le pessimisme ni acquis aux thèses de l’opposition. En 2017, l’an prochain, les élections locales et législatives se dérouleront en pleine crise économique provoquée par l’état des finances du pays et avec un mécontentement social à son paroxysme entraîné par la cherté de la vie et les multiples augmentations : tarifs de l’électricité, du gaz et des carburants, déjà en hausse, en attendant celle de l’eau fortement envisagée, alors que des voix s’élèvent pour supprimer des subventions qui aident actuellement de larges couches de la population à accéder à des produits et services de première nécessité. En 2017, il n’est pas sûr que le FLN et le RND, même aidés par les autres petits partis qui sont dans l’alliance présidentielle, gardent la majorité. Le nouveau paysage des assemblées élues, locales et nationale, aura évidemment un impact décisif sur l’élection présidentielle de 2019. On devine la panique de Saïdani qui pourrait être éjecté de son poste pour laisser place à un dirigeant plus «qualifié» pour affronter les tempêtes qui sont prévues.
Houari Achouri
 

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