Célébration du Printemps berbère : qui veut pousser à l’embrasement de la Kabylie ?

Les militants du RCD en Kabylie vivent une atmosphère des plus tendues à la veille de la commémoration du 36e anniversaire du Printemps berbère. Les échos provenant de certaines régions, notamment Bouira, où l’on se plaint de nombreuses interdictions et d’une série d’arrestations de militants par les forces de police, attisent la colère. Dans un communiqué rendu public mardi soir, le bureau régional de Bouira accuse le pouvoir de «provocation» et considère que «la vulgarisation de la conscience citoyenne par RCD qui a toujours su contrecarrer politiquement et pacifiquement les tromperies du pouvoir semble être la raison de cette panique générale devant la mobilisation des militants du Rassemblement». D’aucuns ont relevé cette escalade soudaine et sans précédent contre un parti qui a toujours célébré cette date dans un cadre pacifique et organisé. Selon l’analyse d’un observateur averti de la scène politique nationale, le pouvoir «booste indirectement le RCD, par une répression ciblée, pour l'aider à ravir la vedette au MAK». Car, d’après lui, la hantise principale pour le pouvoir reste le mouvement autonomiste. D’ailleurs, le Premier ministre Abdelmalek Sellal a lancé un sérieux avertissement aux militants de ce mouvement qui a intensifié ses activités depuis quelques semaines, en perspective des deux manifestations qu’ils ont programmées pour ce mercredi à Béjaïa et Tizi Ouzou. Par ailleurs, le RCD a choisi de radicaliser son discours sur la question identitaire, en faisant parfois dans la surenchère, à ce moment précis où le mouvement autonomiste mène une offensive dans les milieux qui constituaient d’habitude un gisement pour le RCD, comme l’université, les lycées et l’émigration. Dans cet élan de radicalisation tactique, le parti de Saïd Sadi pousse à la confrontation avec le pouvoir. Des observateurs ont relevé la similitude entre le slogan du FIS dissous «âlayha nahya wa âlayha namût !» et celui du RCD remis au goût du jour, «fellas tudert, fellas lmut !», qui est la traduction littérale de la devise islamiste. A cette différence près que le FIS parle de la charia et le RCD de tamazight. Pour notre interlocuteur, ce n'est pas un hasard si ce slogan ressurgit maintenant que Saïd Sadi flirte ouvertement avec le FIS, au même moment qu’il s’acharne, comme dans sa dernière conférence à Tizi Ouzou, contre l’arabisation et la langue arabe qu’il qualifie de «prison pour notre jeunesse», sans en sentir la moindre contradiction. A cette agitation intra-muros viennent se greffer des gesticulations à partir de France, où Ferhat Mehenni multiplie les interventions, notamment sur France 24, la chaîne du Quai d’Orsay. Une sorte d’alliance semble se constituer entre plusieurs acteurs connus pour leur proximité avec les officines étrangères, dont notamment Hichem Aboud qui parle de «gouvernement algérien» par opposition au «gouvernement kabyle» dans un entretien avec ce séparatiste installé à Paris, qu’il vient de publier sur son blog, le tout relayé par des tribunes proches du MAK et de la DGSE. Mais il y a peu de chances que la Kabylie cède au chant des sirènes, l’écrasante majorité des citoyens de cette région renvoyant le pouvoir et l’opposition dos à dos. Le FFS, quant à lui, semble se tenir à l’écart de ce grouillement.
Karim Bouali

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