Bourgi sur les rapports entre Paris et l’Afrique : «La Françafrique est plus présente que jamais !»

Robert Bourgi dit connaître la majorité des chefs d’Etat africains
Nicolas Sarkozy et Robert Bourgi à Franceville, au Gabon, en février 2010. D. R.

Par Sadek Sahraoui – Robert Bourgi, l’avocat français dont le nom est lié à la Françafrique, fait des révélations inédites sur les relations entre la France et les dirigeants africains dans un long entretien accordé cette semaine au magazine Newafrican. Avant toute chose, il prévient que la Françafrique n’a pas du tout disparue. Selon lui, elle est même plus présente que jamais. Autrement dit, de nombreux dirigeants africains continuent toujours de graisser généreusement la patte à la classe politique française pour se maintenant au pouvoir. Les hommes politiques français profitent, quant à eux, de cette manne financière providentielle pour s’enrichir et faire tourner leurs partis. «La Françafrique est plus présente que jamais ! Regardez la présence militaire de la France en Afrique, elle est énorme ! Qu’ont fait les militaires français en Centrafrique ? Ils ont calmé les choses ? La situation est pire qu’avant !», fait remarquer Robert Bourgi, qui dit connaître la majorité des chefs d’Etat africains.

Dans cet entretien explosif, celui que la presse française a souvent présenté comme l’héritier de Jacques Foccart, le fondateur de la Françafrique, rappelle que d’anciens hauts responsables politiques français ont perçu de l’argent sale de pays africains et qu’il a souvent servi d’intermédiaire entre les deux parties. A la question de savoir à quel moment il a plongé dans la Françafrique, Robert Bourgi se contente de dire qu’elle existait bien avant lui. «L’exécuteur testamentaire de Mitterrand l’a dit lui-même dans ses mémoires. Je ne pense pas qu’elle a pu exister du temps du général De Gaulle. Je pense que la Françafrique a commencé du temps de Pompidou, dès les années 1970», a indiqué l’avocat français né à Dakar, tout en concédant tout de même qu’il a commencé à s’occuper de l’Afrique «dans les années 1980, vers la fin du pouvoir de Giscard et l’avènement de la période Mitterrand et Chirac…». Il évalue à 20 millions de dollars le montant des dessous de table donnés par les leaders africains aux responsables français. Des observateurs pensent qu’il y lieu de rajouter au moins un zéro au chiffre qui est avancé par celui qui est surnommé le porteur de valises.

Robert Bourgi ne s’arrête pas là. Il fait aussi un certain nombre de révélations qui risquent de mettre le feu aux poudres dans certains pays du continent. Il soutient, par exemple, que c’est Nicolas Sarkozy qui a détruit Laurent Gbagbo, l’ancien président ivoirien. A propos de la crise ivoirienne, l’avocat français se dit convaincu que «Laurent Gbagbo n’a pas perdu les élections». Cette révélation veut tout simplement dire que c’est Paris qui a placé Alassane Ouattara au pouvoir.

S’agissant de la crise libyenne, Robert Bourgui révèle qu’en 2011, «Bernard Henri-Levy a fait le siège de Sarkozy pour abattre le régime de Kadhafi» et qu’il s’était «fortement opposé à cette action contre la Libye». «D’ailleurs, le président de (la commission de) l’Union africaine, Jean Ping, et des chefs d’Etat africains avaient exprimé leur opposition (à l’agression contre la Libye) auprès de Nicolas Sarkozy. Bien qu’il ait obtenu le mandat de l’ONU, aidé par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, cette action contre Kadhafi est à porter au déficit de Sarkozy. Regardez le résultat aujourd’hui ! Toutes les armes d’Aqmi et des terroristes proviennent de l’arsenal militaire libyen…», lance Robert Bourgi à propos de son ami Sarkozy, auquel il dit en vouloir beaucoup.

Qui a assassiné Mouammar Kadhafi ? «Je le dis avec prudence. Lorsque Kadhafi fuyait dans le désert avec quelques pick-up et une cinquantaine d’hommes, ce serait les Français qui auraient indiqué aux rebelles libyens le lieu où il se cachait. C’est ce que j’ai lu», soutient Robert Bourgi, qui ne dit, cependant, pas où il a lu cette information.

S. S.

Commentaires

    Anonyme
    2 février 2018 - 14 h 12 min

    Maittre Bourgi ne fait que décrire la realité que n’importe qui peut constater ,cependant la nouveauté avec Macron, c’est son contact direct avec la population et surtout avec la jeunesse africaine pour exprimer ou réaffirmer la tutelle de son pays sur un continent qui n’arrive pas à s’émanciper.

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