Bureaucrates, affairistes et fierté mal placée : ces autres adversaires du peuple
Une contribution de Kaddour Naïmi – En Algérie, les agents et organismes idéologico-politiques qui œuvrent pour la transformation du pays en satellite d’une nation moyen-orientale totalitaire ou du bloc impérialo-néocolonial-sioniste, ces agents sont connus parce qu’ils se déclarent plus ou moins publiquement et disposent d’organisations plus ou moins occultes. Mais les adversaires du peuple algérien se limitent-ils à ces deux catégories ? La réalité montre que le peuple et la nation ont, tout autant, d’autres adversaires, ces derniers aussi discrets que maléfiques. Examinons le problème en Algérie, en sachant que les observations valent plus ou moins pour d’autres pays.
Les bureaucrates
Leurs caractéristiques sont principalement les suivantes.
1- La médiocrité intellectuelle et professionnelle, reconnaissable à l’arrogance avec laquelle ils traitent les citoyens, d’une part, et, d’autre part, la servilité manifestée devant leurs responsables hiérarchiques auxquels ils s’arrangent à présenter la réalité sociale non pas telle qu’elle est mais telle que ces responsables hiérarchiques aimeraient qu’elle soit, portant, ainsi, ces derniers à mal gérer les affaires du peuple.
2- L’égoïsme le plus vil porte ces bureaucrates à déployer toute leur ruse pour s’arranger non pas à servir le peuple, mais à se servir de lui pour s’enrichir de toutes les manières possibles, y compris illégales, avec un mépris non déguisé pour les victimes et la nation. En ce qui concerne cette mentalité corrompue (dire «abjecte» est un pléonasme), le mal a commencé après l’indépendance nationale, pour s’aggraver avec le temps jusqu’à parvenir à l’outrance affichée lors du règne de «fakhamatouhou» (l’ex-président Bouteflika, pour qui l’ignore).
Les affairistes
L’autre adversaire du peuple est cette catégorie d’individus dont l’unique Dieu, plus ou moins avoué, est l’argent à accumuler en se livrant à toute activité, licite ou illicite, au détriment du bien-être du peuple et du développement du pays. Cette catégorie d’individus comprend ce qu’on appelle la caste compradore ; elle trouve son intérêt dans l’activité d’import-export de type parasitaire, qui entrave l’émergence et l’existence d’une capacité productive nationale, laquelle empêcherait tout trafic, donc tout enrichissement réalisé au détriment du développement économique du pays, donc de son indépendance nationale.
La grenouille et le bœuf
Un autre ennemi du peuple est cette caractéristique algérienne, évoquée par certains citoyens – rarement et trop peu – est cette fierté exagérée, tellement exagérée qu’elle dénote un faux complexe de supériorité qui est, en réalité, un réel complexe d’infériorité.
Il est cependant vrai que le peuple algérien s’est distingué par une guerre de libération nationale qui lui a coûté un impressionnant nombre de victimes, tout en montrant un aussi impressionnant nombre de patriotes exemplaires. Cette fierté-là est légitime et doit être manifestée quand nécessaire, mais elle ne peut pas être évoquée pour justifier les carences constatées après l’indépendance nationale, aggravées au fur et à mesure.
Cette sorte de fierté outrancière devrait, au contraire, être tempérée par l’existence de multiples carences, parfois grossières, dans trop de domaines ; elles sont facilement constatables par les esprits lucides de patriotes honnêtes et sans complaisance, lesquels sont généralement accusés… d’antipatriotisme. Classique technique du renversement accusatoire.
Mais qui sont, en réalité, les antipatriotes, autrement dit les adversaires du peuple et de la nation algériens ? Sont-ils les citoyens qui, tout en évoquant les faits positifs, soulignent également les faits négatifs dans le but de leur trouver des solutions bénéfiques au peuple et à la nation, ou ces citoyens qui ignorent ou occultent les faits négatifs et, donc, empêchent d’agir pour les éliminer ?
Le progrès, le développement d’un peuple et d’une nation – donc leur réelle fierté – se réalisent-ils par l’illusion d’une grandeur imaginaire ou par la courageuse et objective constatation de tout ce qui fait réellement cette grandeur, en agissant pour éliminer ce qui l’entrave et favoriser ce qui la consolide ?
Les bureaucrates, les affairistes et la fierté mal placée entravent gravement l’indispensable relation positive, la complémentarité entre citoyens et gouvernants et, par conséquent, rendent le peuple et le pays moins en mesure de neutraliser efficacement les actions hostiles étrangères, de plus en plus menaçantes et proches.
Premiers actes
Les affairistes les plus nocifs et notoires sont en prison et, si l’auteur de ces lignes a bien compris, les bureaucrates ont été dernièrement critiqués par le président Tebboune. Cependant, l’observation empirique montre que se libérer des bureaucrates pour les remplacer par des citoyens professionnellement compétents et éthiquement honnêtes n’est pas une entreprise aisée.
Enfin, les citoyens qui manifestent une fierté mal placée sont persuadés d’être de superpatriotes et, donc, refusent tout sain raisonnement patriotique. Inutile de leur rappeler le proverbe populaire algérien «el-machkour mag’our» (celui qui s’auto-congratule est une coquille vide). Il faudrait évoquer la fierté uniquement là où elle est légitime et, pour le reste, se donner la peine de réaliser les actions qui permettent de faire appel à cette fierté avec raison.
Un voyage commence par un premier pas
A moins d’être naïf ou manipulateur, on constate facilement que les affairistes et les bureaucrates n’ont aucune conscience patriotique : leur nature est de servir le maître du moment, qu’il soit indigène ou étranger, pourvu qu’il permette aux bureaucrates et aux affairistes d’y trouver leur illégitime et vile bénéfice. Quant à la fierté mal placée, de patriotisme elle n’est que le triste simulacre, une aliénation tellement aliénée qu’elle se manifeste à l’insu de son auteur.
Ceci étant dit, il faut trouver les moyens de neutraliser tout ce qui est hostile au bien-être du peuple et de la nation. Aux responsables concernés d’agir, en complémentarité avec les citoyens patriotes.
En sachant que bureaucrates et affairistes agissent de manière aussi destructrice que discrète, ce qui les rend très dangereux. Concernant les affairistes, il s’agit de découvrir et neutraliser leurs complices dans l’administration étatique, qui les soutiennent parce qu’ils en tirent des profits illicites. Pour ce qui est des bureaucrates, l’action de neutralisation est plus difficile. Il faut d’abord disposer de remplaçants, socialement honnêtes et professionnellement compétents.
L’une des difficultés de neutralisation des bureaucrates, des affairistes et des partisans de la fierté mal placée réside dans le fait que, au contraire des politiciens-idéologues, les premiers se reconnaissent avec plus de difficulté car ils ne disposent ni de parti, ni de programme politiques déclarés, ni de leaders auto-proclamés, bien que ces derniers se manifestent de manière plus ou moins affirmée.
Se libérer de ces tares sociales est de longue haleine mais, comme dit le proverbe chinois, un voyage commence par un premier pas. Quand la volonté existe, tant celle des gouvernants que celle des citoyens conscients, les bons résultats se manifesteront. Faut-il préciser que cette volonté doit se concrétiser dans tous les domaines de la vie sociale ? Car les parties forment un tout et s’influencent réciproquement.
Ceci étant dit, attention aux malentendus et aux manœuvres ! En cette période où l’Algérie est menacée parce qu’elle manifeste, dans le domaine international, une indépendance de décision au service de la nation, dont tout patriote est légitimement partie prenante, il faut veiller à ce que toute réflexion et toute action soient constructives, ne fassent jamais le jeu des oligarchies impérialistes-néocoloniales-sionistes, mais sert les réels et légitimes intérêts du peuple algérien, une manière de servir les intérêts de tous les peuples de la planète. C’est dire que la prise de conscience et l’élimination des carences internes font partie de la défense patriotique contre les adversaires, déclarés ou camouflés, membres d’oligarchies externes ou leurs agents harkis indigènes.
K. N.
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