Le Makhzen diffuse un article insultant envers l’Algérie et l’attribue aux Emiratis
Par Belhouari Bouziane – Il est désormais établi que les outils issus de la révolution des technologies de l’information et de la communication, en particulier ceux accessibles à tous, tels que les téléphones portables, ont considérablement réduit les distances sur les autoroutes de l’information, leur conférant une fluidité sans précédent. Cependant, ces moyens engendrent également des défis majeurs, notamment en matière de mésinformation, de malinformation, et même de désinformation, accompagnés de leur cortège de fausses nouvelles et d’infox.
Dans cette nébuleuse informationnelle, l’Unesco s’est distinguée par la clarté de son éclairage, en apportant des définitions précises à ces phénomènes qui gangrènent l’espace numérique. L’organisation onusienne distingue ainsi la désinformation, entendue comme une fabrication délibérée de contrevérités visant à nuire à une personne, un groupe, une institution ou une nation ; la mésinformation, constituée d’erreurs diffusées sans volonté malveillante et, enfin, la malinformation, qui repose sur des faits véridiques, mais instrumentalisés dans une finalité nuisible.
Dans notre contexte national, les contenus circulant sur les réseaux sociaux et les médias dits «alternatifs» ne sont pas épargnés par ces trois fléaux, largement décriés par les instances internationales du secteur de la communication. Pas plus tard que cette semaine, un article fallacieux, entièrement fabriqué, a été diffusé dans le seul dessein de ternir l’image de l’Algérie. Ce texte, virulent et calomnieux, attribué à tort au journal émirati El-Bayane, s’apparente à un acte manifeste de désinformation.
Rédigé sur la base d’un tissu de mensonges et de falsifications historiques, l’article emprunte les accents diffamatoires de certaines publications électroniques issues de la sphère makhzenienne, coutumière de mots-clés venimeux destinés à attiser la haine contre l’Algérie, modus operandi aujourd’hui largement décodé par les observateurs algériens. Sa parution ne relève d’ailleurs pas du hasard. Elle coïncide étrangement avec le débat national sur le discours de haine et sur la négation de certaines composantes essentielles de l’identité algérienne, attisé récemment par le dérapage éditorial de Sky News, ayant donné la parole à un pseudo-historien tristement célèbre pour son autophobie militante.
Simultanément, cette offensive médiatique s’inscrit dans un climat de tension entretenue par certains cercles étrangers, hostiles à l’Algérie, qui n’ont eu de cesse de recourir à des campagnes insidieuses pour en saper la stabilité. Dans cette entreprise, un quarteron de youtubeurs expatriés s’illustre par une virulence constante, relayée par une cohorte d’«influenceurs» autoproclamés, qui s’évertuent à éroder la confiance des citoyens envers leurs institutions. Ces artisans de la malveillance numérique, aux obédiences multiples et parfois même antagonistes, convergent cependant vers un dessein commun : saper la cohésion sociale et miner les fondements de l’Etat. Dans leur ligne de mire récente : le ministre de la Communication, cible d’attaques ad hominem depuis qu’il a plaidé pour la constitution d’un front médiatique uni, en rappelant les origines héroïques de la presse algérienne, née dans le feu sacré de la guerre de Libération.
L’évocation d’une «presse de résistance» semble, à elle seule, avoir ravivé de vieilles rancunes. Lorsque le ministre fit référence aux treize points de progression obtenus par la presse algérienne dans le classement de Reporters sans frontières (RSF), il ne cherchait nullement à légitimer une organisation que l’on sait, en partie, acquise à une certaine vision française, peu amène à l’endroit de l’Algérie. Il soulignait simplement une avancée objective, telle que reconnue, fût-ce à contrecœur, dans un rapport annuel d’une instance notoirement critique.
Fin diplomate, le Dr Mohamed Meziane n’ignore pas, pour paraphraser Alfred Capus – journaliste et dramaturge au verbe acéré – que «le journalisme est l’école primaire de la diplomatie». Il sait parfaitement à quels intérêts obéit RSF, et combien les imprécations de tel ou tel youtubeur, coutumier des outrances, relèvent moins d’un acte journalistique que d’une entreprise de harcèlement savamment orchestrée. Ces épisodes récents, qui illustrent à quel point la désinformation s’est professionnalisée dans nos environnements numériques, rendent d’autant plus pressante une intervention législative adaptée. Il devient urgent de réfléchir à des dispositifs capables de neutraliser les contenus malveillants, de freiner la propagation de l’intoxication numérique et de réhabiliter une parole médiatique responsable.
La lutte contre ces maux ne saurait être reléguée à un simple vœu pieux. Bien des démocraties réputées mûres ont d’ores et déjà légiféré contre les fake news, adoptant des chartes éthiques spécifiques pour encadrer les contenus numériques. Autant de pistes à méditer pour qu’à l’ère de la viralité, la vérité retrouve son droit de cité.
B. B.
Spécialiste de la communication institutionnelle, Université d’Oran
Ndlr : Le titre est de la rédaction. Titre originel : Flux de fake news sur le net : par quel bout contenir le mensonge ?
Comment (5)