Haro sur le nucléaire iranien : pourquoi l’Occident bombarde par procuration

missiles Iran
Les missiles iraniens ont prouvé leur efficacité. D. R.

Par A. Boumezrag – Alors que les frappes israéliennes se multiplient sur les sites nucléaires iraniens, l’Occident observe, soutient, et, surtout, ne dit mot. Derrière le vacarme des missiles, un silence diplomatique assourdissant : celui d’une guerre menée sans déclaration, sans uniforme, et sans drapeau occidental visible. Israël frappe, mais ce sont les intérêts stratégiques de Washington et de ses alliés qui s’imposent. Bienvenue dans l’ère du bombardement par procuration.

Le conflit entre l’Iran et Israël n’est plus une tension larvée, mais un affrontement réel, à coups de frappes ciblées et de sabotages répétés. Pourtant, derrière les drones, les bombes et les communiqués de presse ambigus se dessine l’ombre portante d’une stratégie occidentale assumée : frapper sans apparaître, contenir sans se salir, imposer par procuration. En première ligne de cette guerre indirecte, Israël assume le rôle d’exécutant, pendant que Washington orchestre en coulisses.

Le programme nucléaire iranien, depuis sa relance à plein régime en 2023, est redevenu une ligne rouge pour les puissances occidentales. Mais alors que les opinions publiques américaines et européennes rejettent toute nouvelle aventure militaire directe au Moyen-Orient, la stratégie a changé : l’intervention n’est plus frontale, elle est externalisée. Israël, partenaire de longue date et puissance militaire indépendante, devient le bras armé d’une volonté occidentale de non-prolifération. La Maison-Blanche ferme les yeux sur les opérations israéliennes et, parfois, les facilite en termes de renseignement, de logistique ou de couverture diplomatique.

Ce bombardement par procuration n’est pas nouveau. Il s’inscrit dans une longue tradition de «plausible deniability», où l’on agit sans assumer, où l’on frappe sans parler. Il permet aux chancelleries occidentales de conserver leur posture officielle de paix, tout en laissant faire le travail de containment par un allié plus audacieux. La France, le Royaume-Uni et l’Allemagne, pourtant signataires de l’Accord de Vienne, émettent des communiqués vagues, soulignant leur «inquiétude» sans jamais condamner clairement les opérations israéliennes.

Les régimes arabes du Golfe, eux, collaborent par omission. L’Arabie saoudite, les Emirats, la Jordanie et même le Qatar ouvrent leur espace aérien, partagent des renseignements ou ferment simplement les yeux sur le survol de leurs territoires. Chacun redoute un Iran nucléarisé, chiite et hégémonique. Tous savent qu’en laissant Israël agir, ils contiennent leur voisin sans se compromettre.

Pourquoi l’Occident bombarde-t-il par procuration ? Parce que c’est stratégiquement efficace, politiquement discret et diplomatiquement gérable. Parce que la guerre directe n’est plus acceptable, mais que la dissuasion reste nécessaire. Parce qu’en 2025 les conflits ne s’annoncent plus, ils s’externalisent.

Cette nouvelle forme de guerre offre un confort moral : le sang est versé ailleurs, la responsabilité diluée, les objectifs atteints sans engager de troupes occidentales. Mais elle pose aussi une question démocratique majeure : jusqu’à quel point peut-on mener une guerre sans la déclarer, sans la voter, sans même la nommer ?

Israël bombarde, mais ce n’est pas qu’une guerre israélo-iranienne. C’est une guerre délocalisée dont les architectes siègent bien plus au nord. En 2025, l’Occident ne combat plus avec des soldats, mais avec des vassaux. Et l’Iran, en défiant ce système, est devenu la cible exemplaire d’un ordre mondial où la puissance frappe sans apparaître.

«Les guerres d’aujourd’hui ne sont plus déclarées ; elles s’installent dans le silence.» (Jean Giraudoux.)

A. B.

Comment (4)

    On dit que la démocratie est l’antithèse de la dictature. Or, dans les faits, on ne peut que constater que sous le paravent de la démocratie occidentale se cache en fait un côté dictatorial.
    La démocrature à l’occidental impose sa vision au monde à coup de bombes. Bienvenu dans le réel !

    Hamma
    21 juin 2025 - 13 h 44 min

    Tout simplement parce que la Chine et la Russie (comme l’immense majorité des pays à l’exception notable de … l’Algerie) ne réagissent qu’en fonction de leur propre intérêt.
    La Russie est assez occupée avec sa guerre en Ukraine et n’a pas les moyens d’intervenir sur un 2e front (on la bien vu avec la Syrie). Quant à la Chine elle aurait bien trop à perdre économiquement à se mettre l’occident (ses clients) à dos. Il est probable en revanche qu’elle s’active en coulisse pour un cessez le feu (moins visiblement et sûrement plus efficacement que les Européens…).

    Anonyme
    21 juin 2025 - 13 h 27 min

    Vous avez totalement raison,les russes et les chinois ne sont qu’une bande de faux cul et on l’a vu avec la Syrie qu’ils ont laché. Il poussent les nations à les rejoindre dans les brics sans aucune protection.

    Dalmou steinberg
    21 juin 2025 - 12 h 34 min

    Rien d’étonnant et surtout de surprenant ! L’agression de l’Iran par les USA et l’OTAN via l’état criminel d’Israël n’est en rien une surprise . Ça été planifié et organisé au su du monde entier depuis 1979 avec la chute du criminel et vassal des USA , le Shah D’Iran .
    Si les USA agressent actuellement l’Iran dont ils veulent la destruction complète avec le consentement des pays occidentaux, celà est dans l’ordre des choses. C’est dans la logique de domination et de contrôle dans l’impunité rendue possible par UNE ALLIANCE MILITAIRE NUCLEAIRE que tout le monde connaît sous le sigle de l’OTAN . Ce n’est pas nouveau .
    Par contre le silence le plus gênant le us lâche j’allais dire c’est le silence complice de la Russie et de la Chine . Pouvaient-ils empêcher l’agression de l’Iran? Oui ! L’ont-ils fait ? Non !
    C’est bien beau d’intégrer au sein des BRICS un grand et brillant pays comme l’Iran en connaissant son immense potentiel économique, ses ressources scientifiques et intelectuel , son immense bassin gazier et surtout sa position geostrategique par le détroit d’Ormuz qui contrôle 30 % du transitoire gazier mondial . Mais lorsque l’Iran se trouve agressé de toute part , poutine et Xi baissent le pantalon . Ils ne seront jamais crédibles, ils ne seront jamais des hommes tant qu’ils ne décident pas enfin de mettre leurs culottes et fonder une ALLIANCE MILITAIRE NUCLEAIRE pour la défense de tout le Sud global. Tant cette volonté de protéger les pays du Sud contre les velléités criminelles de l’occident , la Russie et la Chine ne seront elles aussi que des pays prédateurs.

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