La rue est ailleurs
Par Kamel Moulfi – Alors que le Conseil de la nation votait, hier à l’unanimité – en présence du ministre du secteur, Abderrahmane Raouya, qui s’en est félicité – une loi de finances déjà adoptée avec une majorité écrasante par l’Assemblée populaire nationale (APN), la rue, partout en Algérie, avait la tête ailleurs. L’objet central de la loi de finances 2018 – le recours à la planche à billets – qui avait déclenché d’interminables débats, n’a plus passionné personne depuis que chacun a compris que cette machine serait, quoi qu’on fasse, débloquée pour cinq bonnes années. Les pouvoirs publics ont beau rajouter la précision «en cas de nécessité», elle ne convainc pas grand-monde, beaucoup d’ailleurs pensent, à tort ou à raison, que c’est déjà fait.
Le marché a anticipé sur la mise en route de la planche à billets en installant durablement une affiche de prix qui traduit une tendance haussière qui ne surprend plus les consommateurs. L’érosion du pouvoir d’achat de la grande masse de la population n’est naturellement pas étrangère à son mécontentement à l’égard de la politique menée par le gouvernement.
Fait aggravant, l’absence de communication institutionnelle reste incompréhensible. Habituellement forts en initiatives d’actions à caractère de propagande, les pouvoirs publics semblent réticents à engager le débat avec la population. Celle-ci s’est déjà exprimée par son message électoral en boudant, dans une bonne majorité, les deux scrutins de cette année : celui du 4 mai pour le choix des députés, et celui du 23 novembre, pour renouveler les Assemblées populaires communales et de wilaya. Le gouvernement n’a pas réagi à ce message. Le vide en communication institutionnelle est comblé par les contenus apportés par les réseaux sociaux et véhiculés à grande vitesse grâce aux prouesses de la technologie.
De leur côté, les organisations autonomes qui ne répondent à aucune logique partisane ou officielle ne restent pas inactives, comme le prouvent l’agitation qui secoue la Kabylie et celle qui s’annonce ailleurs dans le pays.
K. M.
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