Smaïl Hamdani : «Dire que les islamistes vont gagner relève de la spéculation»

L’ancien chef du gouvernement, Smaïl Hamdani, ne croit pas à la victoire des islamistes lors des prochaines élections législatives. Invité, aujourd’hui samedi, de l’émission «100% politique» de la Radio internationale, M. Hamdani considère infondés les pronostics selon lesquels les partis d’obédience islamiste ont la cote plus que les autres. «Dire que tel parti va gagner et tel autre parti va perdre est pour moi de la spéculation», a-t-il répondu à une question relative à la montée des islamistes au pouvoir en Tunisie, en Egypte et au Maroc. Pourquoi pas l’Algérie ? Pour M. Hamdani, la raison se trouve dans le passé récent qu’a vécu notre pays et le souvenir de cette tragédie qu’ont encore les Algériens en tête. «C’est vrai qu’il y a une vague verte qui a touché les pays voisins. Mais l’électeur algérien ne vote pas en tant que Tunisien, Marocain ou Egyptien, mais comme Algérien. Il connaît la situation de son pays et sait ce qu’a vécu l’Algérie il y a vingt ans. On est dans une situation totalement différente de celle de ces pays», a estimé l’ancien chef du gouvernement. L’invité de la Radio internationale a dénoncé, dans ce sillage, l’instrumentalisation de la religion à des fins politiques. «Il faut laisser l’islam comme étant le patrimoine de tous. Il n’est pas le patrimoine de tel ou tel parti. Nous sommes tous musulmans depuis 14 siècles. Et aucun ne peut se targuer d’avoir le monopole de l’islam. L’article 42 de la Constitution le dit nettement», a-t-il souligné. M. Hamdani critique, dans ce contexte, implicitement M. Mokri, vice-président du MSP, qui avait déclaré récemment que si les islamistes ne sortiraient pas vainqueurs des prochaines élections, cela voudrait dire qu’il y aurait eu fraude. «Que des partis prétendent au succès, c’est normal. Mais là où je ne suis pas d’accord, c’est quand on dit si tel n’est pas élu, cela veut dire qu’il y a eu fraude. Ce n’est pas sérieux. A ces personnes je dis : engagez-vous d’abord dans la bataille, apportez votre contribution, exposez votre programme, faites campagne, adressez-vous aux électeurs et gagnez les élections», a-t-il dénoncé. Poursuivant dans le même ordre d’idées, M. Hamdani se demande sur quelle base des politiciens ou autres peuvent être affirmatifs sur une telle question aussi importante que la représentation des courants politiques en Algérie. «Nous n’avons pas d’instituts de sondage. Comment peut-on être aussi affirmatif ?», s’est-il interrogé. Revenant sur la question de l’abstention, M. Hamdani a appelé au vote, car il y va de l’avenir de tout un pays. «Je ne sais pas si les électeurs iront aux urnes. Je crois qu’il est de leur devoir d’y aller. Il y va de la sécurité générale du pays. C’est mon opinion. En tout cas, moi j’y irai. J’ai un bulletin de vote, je l’utilise, car il me permet d’exprimer mon opinion et d’éviter d’autres méthodes d’expression violentes», a-t-il indiqué. Par la même, il a estimé que la participation dépendra des capacités des partis politiques à remobiliser les électeurs. «La participation aux élections est une question de culture. Nous restons quand même une jeune démocratie. Nous débutons dans la démocratie. Nous avons dans la démocratie certains aspects, mais nous n’avons pas encore la culture de la démocratie, c’est-à-dire la culture du droit. Nous avons encore la culture des rapports de force. Cela existe encore ailleurs, même dans les pays démocratiques, mais encore plus chez nous où nous ne sommes pas encore dans la culture de la démocratie», a-t-il argué. Selon lui, la culture démocratique n’est pas seulement le gouvernement et les partis, mais c’est toute la société. M. Hamdani a précisé, cependant, que l’abstention, qui existe même dans les pays très démocratiques, ne change rien légalement. «Son importance est beaucoup plus politique», a-t-il expliqué. Il reste tout de même convaincu que «le fait de s’abstenir n’a plus de sens, car le pluralisme est là, instauré depuis deux décennies. Mais les électeurs n’ont toujours pas confiance en l’administration organisatrice de ces élections». Comment convaincre ces derniers ? Pour lui, il y a suffisamment de garanties. «Les magistrats, la commission de surveillance des élections dirigée par les partis eux-mêmes, les P.-V. remis aux représentants des partis, les urnes transparentes, les observateurs européens en grand nombre. Qu’est-ce qu’il faut de plus que cela ?» s’est-il demandé, attestant qu’«au niveau du sommet de l’Etat, les instructions sont fermes pour éviter la fraude». Aussi, cette élection est, d’après lui, très importante dans  le sens où elle dessinera la nouvelle carte politique.
Sofiane Benslimane
 

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