«Divorce à la musulmane…» ou l’immigration sur fond de racisme et de lutte antiterroriste

L’écrivain algérien d’expression arabe et italienne Amara Lakhous explore, dans son deuxième roman qu’il a intitulé Divorce à la musulmane a viale Marconi, l’univers des immigrés dans la ville de Rome (Italie) dans un contexte de lutte antiterroriste et de montée du racisme et de l’extrémisme religieux.

L’écrivain algérien d’expression arabe et italienne Amara Lakhous explore, dans son deuxième roman qu’il a intitulé Divorce à la musulmane a viale Marconi, l’univers des immigrés dans la ville de Rome (Italie) dans un contexte de lutte antiterroriste et de montée du racisme et de l’extrémisme religieux.
Pour la version française, le livre traduit de l’italien est coédité par Barzakh (Algérie) et Actes Sud (France). L’anthropologue et romancier croise les histoires de Christian Mazzari, un interprète italien arabophone engagé par les services secrets italiens pour surveiller les activités d’immigrés de confession musulmane (Egyptiens, Marocains, Bengalais…) soupçonnés de liens avec le terrorisme international.
Les personnages gravitent autour de «Little Cario» (Petit Caire), un taxiphone qui leur sert de lieu de vie et de débat, et de Safia, une jeune maman égyptienne installée à Rome doublement victime, du racisme à cause de son voile et de l’enfermement imposé par son époux, Saïd, un extrémiste religieux qui finira par la répudier.
En alternant les monologues des deux principaux personnages, Amara Lakhous dépeint, à partir de deux points de vue différents, la vie des travailleurs immigrés de culture musulmane, en butte à la précarité et à la prégnance d’un discours politico-religieux, en partie porté par le rejet de l’intervention américaine en Irak en 2003 et adossé aux chaînes satellitaires arabes les plus influentes.
Une occasion aussi pour le romancier de mettre à mal les clichés qui sévissent de part et d’autre (Italiens et immigrés), par le biais de l’ironie de Safia, rebaptisée Sofia, et de situations burlesques vécues par Christian, devenu Issa l’immigré tunisien, infiltré dans la communauté de «Little Cairo» pour déjouer un projet d’attentat terroriste dont le propriétaire du taxiphone serait l’instigateur.
Autre cliché exploré par Amar Lakhous, le mythe de «l’Eldorado» européen très présent dans les mentalités des candidats à l’immigration et de leurs familles.
«C’est très difficile d’être sincère et de raconter les choses telles qu’elles sont. Les immigrés préfèrent mentir à leur famille quand ils sont au chômage, exploités dans leur travail, malmenés par la police», dit Safia à propos des conversations avec sa famille restée en Egypte. L’écrivain trouve l’occasion de critiquer le fondamentalisme religieux, très répandu chez ses personnages et qui a des conséquences fâcheuses, surtout pour les femmes dont le personnage de Safia est l’archétype.
Les tentations de repli identitaire apparaissent dans ce roman comme la réaction au racisme dont sont victimes les immigrés de confession musulmane.
«Avec le temps, je deviens solidaire de mon voile (…) C’est vrai qu’au début je n’ai pas eu le choix, mais maintenant il est le symbole de mon identité, il est ma deuxième peau», réagit Sofia face à une agression raciste.
Divorce à la musulmane a viale Marconi (Divorce à la musulmane à l’avenue Marconi) est aussi un hommage au cinéma italien des années 1960, le titre du roman se voulant un clin d’œil au film Divorce à l’italienne de Pietro Germi dans lequel l’acteur italien Marcello Mastroianni tente par tous les moyens de détourner la loi italienne, interdisant alors le divorce, en poussant son épouse à l’adultère…
Né en 1970 à Alger, Amara Lakhous vit en Italie depuis 1995. Son premier roman Choc des civilisations pour un ascenseur Piazza Vittorio a été salué par la critique italienne et a reçu plusieurs prix dont le Prix des libraires algériens en 2006.
R. C.
 

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