Des réponses évasives du Quai d’Orsay sur l’Algérie : y a-t-il un accord secret entre Alger et Paris ?

Le silence de Paris face aux événements qui se précipitent en Algérie intrigue les médias français. «On n’a pas beaucoup entendu la France», a relevé un journaliste français lors d’un point de presse animé par le porte-parole du Quai d’Orsay, Romain Nadal, ce vendredi à Paris. La question concerne les manifestations interdites et la censure de la télévision privée Atlas TV. La réponse du porte-parole est laconique, diplomatique et générale, signe que Paris est gêné par ce qui se passe en Algérie et qu’il hésite à trop se focaliser sur notre pays, de peur de commettre une autre bourde, après la «blague» de Hollande : «Partout dans le monde, la France défend la démocratie, les libertés fondamentales et le respect de ces principes dans l’organisation des scrutins électoraux.» Une réponse bateau qui a fait réagir un autre journaliste : «Des manifestations ont été réprimées.» Romain Nadal perd son calme : «Je n’ai pas de commentaires supplémentaires à faire.» Mais il tente une seconde esquive : «Nous souhaitons que la liberté de la presse et la liberté d’expression soient respectées en Algérie comme partout ailleurs dans le monde (…) Le droit à manifester pacifiquement fait partie des libertés fondamentales, dont nous souhaitons le respect en Algérie comme partout dans le monde. Cela fait partie des libertés démocratiques.» Les journalistes, peu convaincus, acculent le porte-parole de Laurent Fabius : «Appelez-vous le gouvernement algérien à faire preuve de retenue ?» Romain Nadal ne se laisse pas entraîner sur le terrain risqué d’une indésirable brouille avec Alger : «Je viens de vous répondre [que] nous sommes attachés à la démocratie et au respect des libertés fondamentales en Algérie comme partout dans le monde.» Les journalistes n’en démordent pas. Ils veulent arracher une condamnation. Mais le conférencier résiste face à ses interrogateurs : «Avez-vous le sentiment que l’élection présidentielle se prépare dans des conditions démocratiques et transparentes ?» Romain Nadal use de tout son talent d’orateur pour répondre sans répondre : «C’est un scrutin important qui doit s’inscrire dans le cadre des institutions algériennes et dans le respect des principes démocratiques. Il appartient aux Algériens d’écrire cette page de leur histoire dans le respect de leurs institutions.» Les journalistes, tenaces, changent de stratégie : faire avouer au porte-parole quelque accointance avec le clan présidentiel en Algérie, à travers une visite qu’aurait effectuée Saïd Bouteflika, le frère du Président, «à Paris, au Quai d’Orsay et à l’Elysée pour rassurer» les autorités françaises «que rien ne changera en Algérie», attribuant cela à «certaines informations» qui circuleraient dans l’Hexagone. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères dit ne pas être en mesure de confirmer cette allégation. Pourquoi Alger devrait-elle rassurer la France que «rien ne changera» ? Cette question du journaliste français est-elle un message codé qu’entre Paris et Alger des accords secrets auraient été passés depuis le long séjour de Bouteflika au Val-de-Grâce ? Si oui, de quoi s’agit-il ? Pourquoi la France, d’habitude si prompte à dénoncer la «répression» des manifestations en Algérie, comme ce fut le cas en janvier 2011, a-t-elle cessé de râler ? Autant de questions qui ne trouveront pas réponse en Algérie où la seule voix audible est celle du président-candidat par le biais du ton monocorde de ses bruyants laudateurs.
M. Aït Amara

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