Révision de la Constitution : la lettre de Benflis à Ouyahia

L’ancien chef de gouvernement et candidat malheureux à la présidentielle du 17 avril dernier, Ali Benflis, répond par écrit à l’invitation d’Ahmed Ouyahia pour participer aux consultations sur la révision de la Constitution. Après les formules de politesse d’usage, Ali Benflis explique les raisons de son refus de prendre part aux consultations annoncées pour le mois de juin prochain. Selon lui, l’Algérie vit actuellement une crise de légitimité majeure qui déteint sur le fonctionnement de l’Etat. «De la base au sommet, les institutions républicaines accusent un manque de légitimité irrécusable. Ces mêmes institutions sont frappées d’immobilisme pour une raison connue de tous. Le manque de légitimité est source de crise d’autorité et de confiance», relève-t-il dans sa missive adressée au chef de cabinet du président de la République. Des institutions nationales à l’arrêt induisent une accumulation des retards politiques, économiques et sociaux, affirme-t-il, ce qui est préjudiciable à l’Algérie qui vise dans deux environnements régionaux et mondiaux marqués par une accélération des mutations. «Alors que nous stagnons», fait-il remarquer, insistant sur le fait que le choix démocratique demeure chez nous l’objet de bien de contrariétés et d’entraves. Il fait également référence aux droits et aux libertés naturellement attachés à la citoyenneté qui «demeurent le domaine de prédilection des négations et des dénis». Benflis souligne dans sa lettre à Ouyahia que les propositions de révision constitutionnelles «suscitent, à l’analyse, des sentiments de surprise et de frustration tant par la démarche adoptée et par la méthode utilisée que par leur contenu intrinsèque». En sa qualité de juriste, Benflis livre ainsi son analyse sans complaisance de cette mouture fortement critiquée par l’opposition. «Ces propositions ne sont pas une réponse à l’aspiration démocratique qui s’est enracinée dans notre société. Elles ne vont pas dans le sens de l’édification d’un Etat de droit. Elles ne s’assignent pas l’objectif d’élargissement des espaces de droits et de libertés. Et, par-dessus tout, elles éludent la crise de régime véritable à laquelle le pays est confronté», résume-t-il, tout en précisant qu’elles occultent plus la crise qu’elles ne la traitent. «Pour respectables et dignes d’intérêt que soient la variété de sujets dont les propositions traitent, il n’en demeure pas moins, qu’ils sont loin de revêtir la même importance ou le même degré d’urgence que les données et les réalités constitutives de cette crise de régime», soutient-il, considérant de ce fait que sa contribution «manquerait de sincérité et de franchise» si elle devait s’inscrire dans une perspective dont il ne partageait «ni les analyses, ni les méthodes, ni les buts». Benflis conclut en affirmant à Ouyahia l’impossibilité politique dans laquelle il se trouve de répondre favorablement à son invitation. Benflis et le Pôle des forces du changement, tout comme la Coordination pour les libertés et la transition démocratique, ont déjà annoncé leur non-participation aux consultations sur cette révision constitutionnelle qui ne semble emballer personne.
S. Baker
 

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