Sellal se rendra à Paris en décembre prochain : la France veut-elle fourguer ses Rafale à l’Algérie ?

Dans l’incapacité de se rendre lui-même en France dans le cadre de ce qui s’apparente à une visite d’Etat, le président Bouteflika déléguera son Premier ministre pour poursuivre les discussions entamées à Alger par Laurent Fabius et ses interlocuteurs. «Le Premier ministre algérien sera en France à l’invitation de son homologue soit fin décembre, soit début janvier». C’est le ministre français des Affaires étrangères qui a fait cette annonce lors de la conférence de presse conjointe qu’il a animée hier avec Ramtane Lamamra. Laurent Fabius a fait allusion à deux domaines stratégiques : l’énergie, qu’il a qualifiée de «grand champ de coopération» et – une première – l’aéronautique ; «un champ nouveau», selon le chef de la diplomatie française : «Il va falloir travailler les questions de l’aéronautique – qu’[elles] soient civiles ou militaires – où il y a des perspectives qui s’ouvrent.» De quelles perspectives Laurent Fabius parle-t-il ? La France, qui peine à vendre son avion de guerre, le Rafale, va-t-elle (enfin) décrocher le marché qu’elle cherche depuis longtemps auprès des principaux acheteurs d’armes ? Jugé peu efficace comparé au Mig et au Sukhoï russes, le Rafale français pêche par son prix excessif, si bien que l’armée française est une des seules au monde à utiliser ce genre d’appareil, par pur «patriotisme économique». Dans les années 1980, suite à la visite de François Mitterrand en Algérie, le président de l’époque, Chadli Bendjedid, était à deux doigts de donner son accord pour un gigantesque contrat militaire portant sur un système de surveillance radar dénommé Craac (Compagnie radar anti-aérienne côtière). Mais le projet ne verra pas le jour en raison des réticences de hauts gradés de l’ANP qui avaient estimé que le coût d’un tel dispositif était excessif, remettant en cause jusqu’à son utilité pour les forces armées algériennes. En outre, l’aboutissement de ce contrat (douteux) aurait nécessité un recours à l’expertise française à long terme en dépit de la sensibilité des relations en dents de scie entre les deux pays. Hollande réussira-t-il là où Mitterrand a échoué ? Quoi qu’il en soit, même si la vente du Rafale n’est pas acquise, l’autre «champ» évoqué par Laurent Fabius a tout l’air d’avancer dans le sens voulu par Paris. Défendue avec un acharnement suspect par le gouvernement, l’exploitation du gaz de schiste sera confiée en partie aux compagnies françaises. Cela semble de plus en plus évident. La course à la production de cette énergie non conventionnelle sur le sol algérien entre les Etats-Unis et la France ne fait que commencer. Et il faudra s’attendre à une rude bataille entre ces deux puissances étrangères pour tirer profit de cette richesse nationale. Laurent Fabius a annoncé, lors de sa conférence de presse, qu’il reviendrait en Algérie en novembre prochain, soit à la veille de la visite officielle qu’Abdelmalek Sellal devra effectuer en France. Le déplacement de Laurent Fabius servira à finaliser les dossiers avant leur officialisation à Paris. «Cela permettra de préparer utilement la réunion de nos deux Premiers ministres», explique, en effet, Laurent Fabius. Hormis les accords énergétiques, la France compte profiter également de la faiblesse de notre industrie pour s’imposer comme principal partenaire dans les domaines de l’agroalimentaire et du tourisme, entre autres, «d’autant que l’Algérie a décidé de présenter un plan quinquennal qui fixe les orientations pour les années qui viennent». En somme, la France, à travers la visite de son ministre des Affaires étrangères, est venue prendre sa part du gâteau qu’elle ne compte pas lâcher de sitôt face à une concurrence chinoise coriace. Et elle peut compter sur la pleine et entière compréhension du président Bouteflika, dont «l’alacrité d’esprit est totale (…) quels que soient les éléments physiques que l’on connaît», s’est exclamé un Laurent Fabius «frappé» par la «pertinence» et la «mémoire» de son hôte qu’il a pu rencontrer «une heure et demie je crois». Il ne s’en souvient pas.
M. Aït Amara

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