Ghaza : un ancien fonctionnaire international algérien écrit au Premier ministre du Canada

A l’attention du Premier ministre du Canada,

A l’attention du Premier ministre du Canada,
Je jouis depuis 38 ans de l’immense privilège d’être citoyen canadien. Et c’est à ce titre que je vous interpelle sur un sujet brûlant, c’est le cas de le dire, celui de votre prise de position sur les récents développements meurtriers qui ont endeuillé des familles palestiniennes et israéliennes ces derniers jours. Un bref décompte du bilan humain actuel et provisoire nous indique que les pertes en vies humaines du côté palestinien s’élèvent à plus de 200 et un millier de blessés. Ajoutons que Ghaza n’est plus qu’un amas de ruines, sa population se terre, fuit au Liban ou en Jordanie, rejoignant ceux qui y sont depuis cinq, dix, quinze, vingt ou cinquante-cinq ans, selon le calendrier des attaques de l’armée israélienne. Ces populations sont donc sous la tente et dans l’attente de leur Messie… Herr Harper, veuillez excuser le «Herr», mais étant polyglotte, ONU oblige, et ne pouvant me résoudre à vous donner du Monsieur, vous avez donc en tant que Premier ministre de notre pays, le Canada, exprimé, affirmé et martelé, sans équivoque, votre totale solidarité avec toutes les actions entreprises par l’armée israélienne contre les Territoires palestiniens et leurs habitants. Il me faut ajouter, avant d’aller plus loin, que les entreprises du Hamas, qui jugule et fanatise la portion de la Palestine sous son joug, sont condamnées à l’unanimité par le monde dit «arabo-musulman» et sa diaspora. Votre parti pris et votre qualification de «terroriste» de toute entreprise palestinienne, de quelque tendance qu’elle soit, vous font placer, de par votre titre et vos fonctions, parmi les alliés inconditionnels d’un pays moult fois condamné par les instances internationales, dont les Nations unies, et une écrasante majorité de l’opinion mondiale. Parlant de terrorisme, condamné par l’univers entier qui en souffre, et sans vouloir faire de parallèle, je vous rappellerai, pour l’anecdote, l’attentat de l’hôtel King David à Tel-Aviv perpétré par la Hagana. Cet acte a fait des centaines de victimes parmi les administrateurs britanniques alors mandataires de la Palestine. Citons aussi la destruction de la présidence palestinienne, pardonnez-moi le titre que je lui donne, gestes qui, si on suit votre logique et celle de votre ami et allié Benyamin Netanyahu, ne sont nullement des actes terroristes, mais des glorieux faits d’armes et de légitime défense. Le massacre de Sabra et Chatila, concocté par Herr Sharon et les milices chrétiennes du Liban en est, si besoin est, un autre triste exemple. Personne ne remettra en question le droit inaliénable de tout citoyen canadien d’exprimer sa propre opinion à titre individuel ; cependant, je serais enclin à émettre des réserves quant à vos prises de position partiales, et à la limite du mépris, pour l’autre partie, la Palestine, que vous déclarez systématiquement coupable de tous les maux dans ce conflit qu’elle endure depuis près de 60 ans. Ce rappel de déontologie et d’éthique doit, à mon sens, s’exercer au plus haut niveau de notre société. Car vous avez été élu par un système démocratique, un des plus transparents au monde. L’écoute de la vox populi aurait dû se refléter dans l’expression de votre sentiment sur ce drame abominable, qui endeuille au même titre les mères palestiniennes et israéliennes. Vos condoléances tardives aux Palestiniens meurtris, éplorés, choqués me font vous dire que les musulmans enterrent leurs morts dans les vingt-quatre heures d’un décès, qu’il soit naturel, accidentel ou criminel. Une réaction plus spontanée aurait aidé à panser ces terribles blessures. Finalement, ce conflit ne prendra fin que lorsque la volonté politique et la détermination d’hommes de bonne volonté de tous bords entreront dans l’arène de la médiation sincère.
Khaled Khali
Fonctionnaire international en retraite, professeur d'université

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