L’Algérien Mustapha Chérif écrit au peuple américain sur la Palestine

Le philosophe et professeur des Universités Mustapha Chérif envoie au peuple américain une lettre ouverte bien dosée sur la Palestine. «Qui arrêtera le massacre ? Nous ne pouvons pas croire que vous êtes indifférents au génocide qui a lieu en direct à Ghaza, aux souffrances du peuple palestinien, plaie politique ouverte depuis plus de 60 ans», écrit d’emblée ce lauréat 2013 du prix Unesco du dialogue des cultures. Titillant leur fierté, en rappelant notamment la grandeur de leur pays, Mustapha Chérif demande au peuple américain d’agir afin de mettre un terme au massacre de la population de Ghaza. «L’intérêt des Etats-Unis est de démontrer qu’ils sont dignes du statut de leader et non de laisser faire l’injustice, les crimes de guerre et ceux contre l’humanité. Sachez que le sentiment légitime de révolte sourde, face à la répression barbare des Palestiniens, démunis, s’étend partout dans le monde», souligne-t-il, dénonçant le fait que l’on mette au même niveau l’agresseur et l’agressé. «Citoyens américains, poursuit-il, admettez avec tous les êtres objectifs de ce monde, comme les six prix Nobel de la Paix, dont l’Américaine Jody Williams, que l’on ne peut pas mettre au même niveau l’oppressé et l’oppresseur, l’agressé et l’agresseur, le colonisé et le colonisateur.» Mustapha Chérif, homme de dialogue réputé dans le monde pour avoir notamment rencontré le Pape, exprime dans la même lettre sa profonde déception quant à la gestion du dossier palestinien par l’Administration Obama. «Malgré le discours du Caire de votre président en 2009 où il affirmait : "Le cycle de méfiance et de discorde doit s’achever", la haine contre les musulmans s’amplifie», avertit-il, craignant le pire car, selon lui, «la direction que prend le monde n’est pas la bonne». D’un ton parfois acéré, ce philosophe s’interroge sur l’utilité de «dénoncer les atteintes des droits de l’Homme aux quatre coins de la planète si ces principes sont bafoués dès qu’il s’agit d’Israël, un Etat hors norme, au-dessus des lois». Pour ce spécialiste des religions, auteur de plusieurs livres, la question palestinienne est «politique». «Le peuple palestinien a été spolié de sa terre, dépossédé de tous ses droits, vit un blocus qui crée une situation d’extrême pauvreté et du désespoir. Il subit quotidiennement les humiliations, le plus souvent en résistant pacifiquement», rappelle-t-il, précisant dans ce sillage que «tous les processus de négociations sont vidés de leur substance par la puissance occupante et les accords reniés». Il est donc à ses yeux presque impossible de «vivre en paix avec ses voisins quand l’égalité des droits est bafouée». Mustapha Chérif rassure que les musulmans ne sont pas anti-américains. «Citoyens américains, dit-il, sachez que les musulmans ne ressentent aucune haine contre l’Amérique et quiconque d’autre. Au contraire, ils aspirent à l’amitié et savent que dans notre village planétaire le devenir est commun. Ils ont simplement le droit d’être en "colère" face à la politique génocidaire en Palestine.» Ces mêmes musulmans, affirme-t-il, comptent beaucoup sur le peuple américain pour mettre fin au massacre. «Face à la tragédie palestinienne, les musulmans sont convaincus que les paroles ne suffisent pas, ce sont les actes qui font la différence. Les Américains, attachés à la démocratie, universelle, dans l’intérêt général, dans l’intérêt des Etats-Unis et pour la paix dans le monde, devraient imposer l’arrêt de l’agression, l’évacuation des territoires occupés et la création de l’Etat de Palestine, au côté d’Israël», demande-t-il, décrivant ainsi l’Amérique que les musulmans respectent. «Celle, précise-t-il, que les Pères fondateurs avaient initiée pour viser l’universel juste et non l’arbitraire. L’avenir du monde se joue en Palestine.» Mustapha Chérif a saisi l’occasion pour dénoncer l’immobilisme des régimes arabes. Un immobilisme aggravé par «leur duplicité, et les réactions irrationnelles et chaotiques des radicaux». «Les musulmans ne doivent pas oublier ce qui reste à faire pour que le monde arabo-musulman ne prête pas le flanc et tienne sa digne place dans le monde», soutient-il, espérant que son cri soit entendu de l’autre côté de l’Atlantique.
Rafik M.
 

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