Des travel warnings à l’enlèvement d’un «touriste» : la mise en scène de la menace terroriste en Algérie

A l’annonce de l’enlèvement du «touriste» français dans les montagnes de Kabylie, Paris a aussitôt émis, comme première mesure, un avertissement à l’adresse de ses ressortissants, leur demandant d’observer la plus grande vigilance lorsqu’ils se rendent dans une trentaine de pays, citant notamment le Moyen-Orient et le Maghreb. Cette décision a-t-elle été prise pour réagir à ce premier cas d’enlèvement en Algérie, ou était-ce calculé à l’avance, puisque les autorités françaises évoquent les menaces lancées par le groupe terroriste dit «Etat islamique en Irak et au Levant», lesquelles menaces sont antérieures au kidnapping du ressortissant français ? Dans les deux cas, ce premier «travel warning» lancé par la France est venu conforter l’hypothèse selon laquelle les avis émis de façon périodique par des capitales occidentales à l’adresse de leurs ressortissants désirant se rendre en Algérie ou résidant dans notre pays trouveraient là, enfin dirait-on, leur pleine signification. Cette persistance de la part du département d’Etat américain à prévenir les citoyens américains était souvent jugée soit décalée par rapport à la réalité, au motif que le terrorisme en Algérie ne constituait plus une menace qui justifie une telle alerte, soit soumise à une logique de pression sur Alger. Les Français étaient, eux, les derniers à s’en alarmer, du moins officiellement. Durant le mois d’août dernier, le département d'Etat américain et le ministère italien des Affaires étrangères ont, en l’espace de quelques jours, lancé des «travel warnings» étrangement alarmistes à l’adresse de leurs ressortissants respectifs en Algérie, alors que rien, en apparence, ne justifiait de telles dispositions qui, à la longue, ternissent l’image de l’Algérie. Ce qui a amené, pour une fois, le ministère algérien des Affaires étrangères algérien à réagir et à considérer ces «travel warnings», globalement et dans le détail, comme un «non-événement», en arguant de la situation «normale» que connaît le pays. En effet, aucun ressortissant étranger n’a été, jusque-là, victime d’un acte terroriste. D’ailleurs, les autorités algériennes sont régulièrement les premières à s’en soucier, puisqu’elles veillent scrupuleusement à la sécurité des touristes et autres coopérants étrangers, notamment occidentaux. Comment ce «touriste» français kidnappé à Tikjda ce dimanche s’est-il laissé entraîner dans une zone montagneuse réputée pour abriter des groupuscules terroristes jusqu’à se faire enlever par des terroristes ? N’a-t-il pas reçu des consignes de l’ambassade de son pays ? Probable. N’était-il pas conscient des périls auxquels il était confronté en allant en villégiature au cœur du fief d’Aqmi en Kabylie ? Peu probable, puisque ce «touriste» serait plutôt un ami des journalistes, voire même un journaliste déguisé en touriste. Il aurait même, selon des témoins, effectué une visite au siège d'un quotidien algérois. Trop d’indices suspects font qu’il est difficile de croire, à ce stade, à une simple coïncidence. C’est pourquoi il faut craindre aujourd’hui le pire pour l’Algérie : d’abord que le pays soit transformé en laboratoire de lutte contre ce monstre providentiel qu’est Daech, auquel Paris – pour un obscur agenda – a déclaré une guerre mondiale. Au sens où la propagande française a déjà réussi, à moindres frais, à faire apparaître une présence de ce «groupe ennemi» en Algérie. Ensuite, si dans une situation normale les capitales occidentales n’avaient jamais cessé de lancer des «travel warnings» pour leurs citoyens en voyage en Algérie, à quoi faudrait-il s’attendre après l’enlèvement, de surcroît «revendiqué», de cet étrange «touriste» français ?
R. Mahmoudi
       

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