La première subvention est le taux de change

Le professeur Abdelatif Benachenhou entame son exposé intitulé «Sortir des subventions» au forum de Liberté, le lundi 13 octobre 2014, en disant : «C’est un sujet particulièrement sensible sur lequel j’interpelle plus mes concitoyens que le gouvernement.» Il rappelle la définition de la subvention comme «l’acte par lequel un Etat protège ou renforce le pouvoir d’achat des citoyens ou des entreprises» à travers, dit-il, «le transfert de revenus monétaires. Il donne de l’argent, soit il subventionne les prix, soit il a une politique fiscale favorable au pouvoir d’achat : exonération fiscale, baisse de la fiscalité, etc.». Il y a deux types de subventions en Algérie, il y a celles qui trouvent leurs origines dans la politique budgétaire de l’Etat, il y a des subventions qui viennent des entreprises, chez nous, essentiellement, la Sonatrach et la Sonelgaz, et qui sont des subventions qu’on appelle les subventions implicites, on ne les voit pas , on achète de l’essence, on ne voit pas qu’on est subventionné, on consomme de l’eau, on ne voit pas qu’on consomme une subvention… L’économiste les pointe du doigt. Il insiste et précise : «Les subventions viennent essentiellement de Sonatrach, car la Sonelgaz n’est qu’un point de passage.» Il donne des chiffres et affirme doctement que «la première source de subvention est le taux de change». Le taux de change est surévalué. Cette dernière affirmation, dont je n’ai pas saisi l’importance immédiatement, ramène des questions : pourquoi l’émérite économiste a-t-il entamé son développement par les questions souvent rabâchées et qui ne trouveront de réponse qu’en dehors de sa compétence ? De combien est cette subvention aux changes, Monsieur l’ancien ministre des Finances ? Nous savons tous que l’importation aujourd’hui dépasse largement les 50 milliards de dollars. Elle était de 54,852 en 2013 et, donc, largement au-dessus de tous les chiffres qu’il a avancés. De combien est dans ce cas la subvention aux importateurs privés, car comme l’a rappelé un ancien ministre de l’Agriculture, «le montant des subventions aux produits de première nécessité, qui sont le pain, le lait, le sucre, la semoule et l’huile, ne représente que 1,1% du PIB du pays» ? Si le commun des mortels croit savoir que la rente pétrolière couvre les importations, M. le professeur, lui, affirme qu’elle couvre les subventions. Cette autre façon d’interpréter les chiffres est-elle anodine ? Le scepticisme persiste quand il ajoute que la pension n’est pas une subvention, mais une dette envers les moudjahidine. Est-ce pour faire oublier que le droit à l’enseignement des enfants et adolescents, à la santé gratuite pour la population démunie et à un logement décent, c'est-à-dire équipé de l’eau courante, de l’électricité, du gaz, est la principale dette sacrée que l’Etat a envers ses martyrs ? Soixante années ont-ils été suffisants pour nous la faire oublier ? Je termine par quelques propositions en vrac au professeur pour le remercier de son invitation au débat : oui, il faut en premier exiger l’arrêt des subventions attribuées aux riches, aux importateurs… Pour diminuer les subventions, il faut commencer par stopper le gaspillage de l’Etat et du citoyen. Un exemple de gaspillage de l’Etat : combien, d’après vous, a coûté ce refus de la vérité dite par le moudjahid Mellouk à la justice ? Une vérité qu’il clame depuis 1992 et dont l’écho se fera une énième fois le 9 novembre 2014 au tribunal d’Alger. Pour le gaspillage du citoyen : dans deux domaines au moins, je préconise la gratuité des premières tranches d’eau et d’électricité dans les foyers, tout en augmentant le prix des autres paliers, jusqu’à supprimer toute subvention. Pour que le citoyen ne s’endette pas dans l’achat d’une voiture, il faut encourager le développement du transport public. Pour évaluer les ressources en hydrocarbures, il faut aider Sonatrach à aller crescendo vers la norme internationale dans la recherche. Pour sortir des subventions, il faut d’abord les pointer du doigt comme vous l’avez si bien fait, et j’ajoute à mon humble avis qu’il faut les améliorer jusqu’à se passer un jour de l’Etat et de toute son aide !
Saâdeddine Kouidri
 

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