Que signifie le déploiement de la Garde républicaine autour de la présidence de la République ?

Le déploiement des éléments de la Garde républicaine, un corps voué à la protection de l’institution présidentielle, à El-Mouradia, dès le départ des policiers protestataires hier soir, intrigue plus d’un. Une telle décision, qui traduit une peur panique en haut lieu, signifie que le pouvoir est prêt à tout pour «mater» cette protestation inédite. Mais le président Bouteflika est-il capable de faire tirer sur les policiers au cas où ils décidaient de se rassembler de nouveau devant le siège de la présidence de la République ? Cette démonstration de force rappelle, en tout cas, celle qu’il avait mise en scène lors de son hospitalisation au Val-de-Grâce, à Paris, lorsqu’il s’était filmé en compagnie du chef d’état-major de l’ANP, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd-Salah, pour signifier à ses éventuels détracteurs qu’il était toujours aux commandes et qu’il était appuyé par l’armée. Exhiber des membres de la Garde républicaine l’arme en bandoulière est la maladresse de trop qui risque d’envenimer la situation. Et, alors que la protesta ne faiblit pas – au contraire –, le directeur général de la Sûreté nationale, dont les policiers réclament le départ en des termes crus, se rend à Tébessa pour y simuler une visite «ordinaire» qui s’assimile à un pied de nez aux centaines, voire aux milliers de policiers qui sont sortis dans la rue dans plusieurs wilayas du pays pour réclamer sa démission. Evidemment, le pouvoir en place ne cédera jamais à ce qu’il considère comme un chantage et ne reculera devant rien pour faire valoir ses décisions qu’il estime indiscutables. Envoyé en pompier, hier soir, pour discuter avec les représentants des policiers protestataires, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a voulu jouer l’apaisement en promettant de prendre en charge les doléances des agents de la DGSN, mais en excluant de fait certaines de leurs revendications, sans le dire ouvertement. Si le gouvernement s’est dit prêt à négocier certains points qui peuvent être réglés dans les semaines à venir, tels que les primes et le droit à des quotas de logements qui seront retirés à d’autres bénéficiaires pour être réaffectés rapidement à la DGSN, pour calmer le jeu momentanément, la revendication principale des policiers a été passée sous silence par Abdelmalek Sellal. Ce nouvel épisode – inédit – dans la série des contestations des différentes couches de la société, qui réclament toutes leur part de la rente pétrolière que le pouvoir distribue à volonté, sans égard aucun aux conséquences que cette gabegie risque d’entraîner en cas de crise financière, a mis le président de la République et son proche entourage dos au mur. Il vient d’ordonner le déploiement de la Garde républicaine – le corps même que dirigeait l’actuel directeur général de la Sûreté nationale – et d’élargir, par là même, le fossé qui existait entre Abdelghani Hamel et les hommes en bleu depuis le premier jour de sa désignation à la tête de la police nationale. Jusqu’où ira le pouvoir dans son entêtement à n’écouter que son écho ?
M. Aït Amara
 

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