Face à la baisse des prix du pétrole : Sellal annonce à demi-mot la fin du financement public démesuré

En visitant jeudi le chantier de la nouvelle aérogare d'Alger dont les travaux de réalisation ont été confiés à une entreprise chinoise, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a annoncé que le projet sera financé sur les fonds propres de la Société de gestion des services et infrastructures aéroportuaires (SGSIA) et par des crédits bancaires remboursables sur vingt ans. Certes, les médias, de manière générale, n’ont pas donné d’importance à cette information. Il s’agit pourtant là d’un message on ne peut plus clair qui renseigne sur les orientations futures de la politique d’investissement public. Et c’est une première. En effet, faisant fi de toutes les recommandations de certains experts financiers, à commencer par les conseils de l’ancien ministre des Finances, Abdelatif Benachenhou, proche parmi les proches du président Bouteflika, le gouvernement algérien a fait le choix depuis le début de financer les projets de reconstruction des infrastructures publiques en puisant dans la manne provenant des exportations des hydrocarbures. Avec la déclaration de Sellal, on sent que quelque chose est en train de changer sous l’impulsion, sans aucun doute, de la conjoncture économique difficile et la chute des cours du pétrole qui assurait jusque-là au pays l’argent frais pour financer les grands chantiers. Le gouvernement a-t-il finalement compris, au prix d’un énorme gâchis, que la politique d’investissement basée presque exclusivement sur les financements publics ne pouvait perdurer ? Si l’orientation se confirme, il faut dire que l’Algérie va renouer avec l’orthodoxie financière qui libérera les initiatives privées et donnera une impulsion à l’investissement autrement que par les finances publiques. Une telle démarche avait ses adeptes parmi les personnes les plus proches de Bouteflika, mais ce dernier a préféré, depuis son intronisation au pouvoir, puiser dans le Trésor public pour financer les grands chantiers engagés. Abdelatif Benachenhou était, pourrait-on dire, à l’avant-garde de cette opposition à la démarche populiste de Bouteflika. Ce qui lui a valu bien des inimitiés avec ce dernier. Le président était même allé, en 2005, jusqu’à le rabrouer en pleine réunion à la présidence de la République, consacrée au financement de l’autoroute Est-Ouest. Et c’était le début de la fin pour l’économiste en chef de Bouteflika. Sauf qu’aujourd’hui, l’aisance financière dans laquelle se prélassait le pays commence à tarir et l’inquiétude gagne le sommet du pouvoir qui avait toujours misé sur la rente pétrolière pour gérer le pays comme bon lui semble. Et c’est sans aucun doute cela qui a dicté ce virage dans la politique d’investissement. Permettre, en effet, à l’entreprise algéro-française de gestion de l’aéroport d’Alger d’engager des investissements sur ses fonds propres et crédits bancaires pour agrandir l’enceinte constitue une orientation nouvelle dans la politique gouvernementale. Le gouvernement semble avoir fini par comprendre que sa démarche était suicidaire. Aujourd’hui, avec le recul des cours du pétrole, il sait qu’il est bien contraint de serrer la ceinture.
Amine Sadek

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