Benflis : «Le gouvernement craint que le peuple exige des comptes»

Le coordinateur du Pôle des forces du changement, Ali Benflis, a brossé un tableau noir de la situation politique générale, dénonçant la poursuite de l’improvisation et du bricolage face à une crise qui ne dit pas son nom. Intervenant lors de la réunion du conseil national du parti de l’Union des forces démocratiques et sociales, l’ancien candidat à la magistrature suprême considère que l’Algérie a raté une occasion inouïe de construire une économie productive et se montre plutôt pessimiste quant à l’avenir à cause de l’actuelle politique d’«un système politique préoccupé par sa survie». Benflis estime que la crise énergétique actuelle a le mérite d’avoir contribué à «discréditer certaines assertions dénuées de tout fondement et de mettre à nu l’état déplorable auquel notre économie a été vouée». Il est revenu sur la crise de système «aiguë» que vit notre pays que «le pouvoir politique en place a tenté vainement d’occulter en provoquant un effet de diversion, et en usant et abusant de la manne financière générée par une situation énergétique favorable et ce, dans le seul but de garantir, non la paix sociale comme il le prétend, mais sa durabilité et sa pérennité». Et voilà que la crise énergétique lui ôte un moyen privilégié pour assurer sa survie. Il est convaincu que «la crise énergétique produira inévitablement des répliques et aura immanquablement des implications qui ne manqueront pas d’approfondir la crise de système à laquelle notre pays est confronté». Le plus inquiétant, selon Ali Benflis, est que l’Algérie n’est pas dans une situation favorable pour affronter et dépasser les conséquences de cette crise au moindre coût que ce soit du point de vue politique, économique ou social». Il souligne que du point de vue politique, le traitement des grandes crises nécessite une direction politique forte qui possède une vision précise de la démarche à suivre et qui est capable de mobiliser pour la mettre en œuvre, estimant ainsi que «la direction politique qui répond à ces caractéristiques et qui possède cette capacité n’existe pas dans notre pays aujourd’hui». Pour lui, les dix années d’aisance financière ont fait perdre à notre pays «le sens de la rigueur, de la prudence et de l’efficacité». Ali Benflis craint pour l’Algérie, affirme-t-il, en ce sens que «notre pays est dans une situation très fragile et précaire pour pouvoir affronter une crise énergétique extrêmement dangereuse». Le pire, regrette-t-il, est que «le gouvernement n’a pas le courage d’assumer cette vérité devant le peuple, pour la simple raison qu’il craint sa réaction et qu’il appréhende par-dessus tout que ce dernier lui pose ces questions qui tombent sous le sens : où est passé l’argent ? Comment a-t-il été dépensé ?» «La gabegie, les détournements et la corruption ne comptent-ils pas parmi les principales causes de ces échecs ? Que fait le gouvernement pour remettre l’économie nationale sur de bons rails ?» se demande Benflis pour lequel la peur de devoir rendre des comptes a plongé les autorités politiques dans un état de profond désarroi». Il dénonce le choix de la facilité du gouvernement et pointe du doigt l’ampleur de l’évasion fiscale qui aurait atteint, selon lui, plus de 4 000 milliards de dinars (40 milliards d’euros). A cela s’ajoute la fuite des capitaux que des organismes internationaux spécialisés ont évaluée, entre 2004 et 2012, à 18 milliards de dollars (Global Financial Integrity). Il rappelle la nature rentière de notre économie. Une caractéristique qui s’est accentuée au cours de cette dernière décennie, particulièrement marquée par une abondance sans égale des ressources financières.
Rafik Meddour
 

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