L’Algérie dans quinze ans : pays émergent ou pays sous-développé ?

Que sera l’Algérie à l’horizon 2025/2030 avec une population qui approchera les 50 millions d’habitants ? Telle est la question qui m’a été posée par des étudiants en magister en ce mois de mars 2015. Gouverner c’est prévoir, il s’agit d’envisager la réalité sans passion, si amère soit-elle. D’où l’objet de cette contribution.

Que sera l’Algérie à l’horizon 2025/2030 avec une population qui approchera les 50 millions d’habitants ? Telle est la question qui m’a été posée par des étudiants en magister en ce mois de mars 2015. Gouverner c’est prévoir, il s’agit d’envisager la réalité sans passion, si amère soit-elle. D’où l’objet de cette contribution.
La première hypothèse porte, selon le statu quo, sur la dépense sans compter pour une paix sociale fictive et éphémère. L'âge moyen de mes étudiants étant d'environ 22 ans en 2015, ils auront alors 37 ans et, entretemps, ils auront pour exigences, comme tout Algérien, un emploi, un logement, se marier et avoir des enfants, donc, une demande sociale croissante. Ceux qui travaillent actuellement âgés de 45 ans auront 60 ans et seront en âge de partir à la retraite. Qu'en sera-t-il des caisses de retraite alimentées en grande partie par la rente des hydrocarbures, directement ou indirectement, alors qu’aucune réforme n'est actuellement envisagée : ne risquent-elles pas l'implosion ? Dans le cadre de cette hypothèse, il y a une forte probabilité d'épuisement des réserves de pétrole et du gaz traditionnel, et ce, bien avant 2030, les réserves se calculant selon le couple évolution du vecteur prix international, coût, concurrence d'autres formes d'énergie, et par là des réserves de change en baisse. Parallèlement, nous aurons des besoins croissants (la demande additionnelle d'emplois varierait entre 350 000 et 400 000 annuellement sans compter le taux de chômage au temps To) et plus de devises pour importer avec une crise d'endettement en cas où la relève des segments hors hydrocarbures ne se serait pas réalisée. Comme conséquence, pas d'attrait de l'investissement tant local qu'étranger, suppression des subventions, chômage croissant, des tensions sociales et une instabilité politique, à l'instar des pays les plus pauvres, et la diplomatie algérienne en berne, sans parler des risques d'intervention de puissances étrangères. La deuxième hypothèse est optimiste. Elle se base sur les conditions favorables de développement de l'Algérie qui a d'importantes potentialités pour surmonter la crise multidimensionnelle à laquelle elle est confrontée pour peu que l'on ait une vision stratégique tenant compte des nouvelles réalités géostratégiques mondiales. Le développement serait fondé sur les piliers de la bonne gouvernance prenant en compte les nouveaux défis, tels que la revalorisation du savoir et l'Etat de droit, par la réhabilitation du management stratégique de l'entreprise et des institutions, et par une libéralisation maîtrisée grâce au rôle central de l'Etat régulateur, la promotion des segments hors hydrocarbures en réhabilitant l'entreprise créatrice de richesses locale ou étrangère, dans un environnement concurrentiel, loin de tout monopole, dans le cadre des avantages comparatifs mondiaux, car évoluant au sein d' une économie mondiale de plus en plus ouverte. Devant éviter les débats stériles, on devrait s'orienter vers la mise en place d'un nouveau modèle de consommation énergétique reposant sur un Mix énergétique, et l'on mettrait fin à l'instabilité juridique, le manque de cohérence et de visibilité dans la politique socioéconomique, la corruption qui s'est socialisée , démobilisant toute énergie créatrice, avec l'intégration de la sphère informelle produit de la bureaucratie et de la logique rentière, évitant la concentration excessive du revenu national au profit de rentes spéculatives destructrices de richesses. On favoriserait le dialogue politique, économique et social productif, renforçant le front social intérieur, personne n'ayant le monopole de la vérité ni du nationalisme. En bref, espérons pour nos enfants que le second scénario se réalise. Dans ce monde interdépendant, turbulent et instable où toute nation qui n’avance pas recule, en refusant les solutions utopiques, il s’agira de privilégier les intérêts supérieurs de l’Algérie, loin des intérêts individuels, l’objectif stratégique étant le renforcement du processus démocratique tenant compte de notre anthropologie culturelle. L’Algérie de 2030 sera ce que les Algériens voudront qu’elle soit, un pays émergent ou un pays éternellement sous-développé.
Abderrahmane Mebtoul
 

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