Quatre avocats d’Oran en grève de la faim à Alger

Quatre avocats du barreau d’Oran observent une grève de la faim illimitée depuis mercredi 13 mai au siège du Mouvement démocratique et social à Alger. Les grévistes, dont une femme, Me Souad Belkacem-Sadoun, entendent «susciter l’intérêt des pouvoirs publics» pour ce qu’ils estiment être un «arbitraire sans précédent dans la carrière de l’avocat en Algérie». Ces avocats avaient déjà entamé une grève de la grève le 22 avril, mais interrompue trois jours suite à en engagement du président de l’Union nationale des bâtonniers d’Algérie de prendre en charge leurs doléances, et ce, avant le 9 mai 2015. «La promesse n’a pas été tenue. Nous tenons à prendre l’opinion publique à témoin pour ce qui des agissements néfastes à notre encontre du bâtonnier d’Oran, Me Houari Wahrani. Cette personne n’a pas trouvé mieux que de suspendre notre activité ; certains d’entre nous, dont moi-même, étant radiés du corps des avocats», accuse, en guise de rappel, Me Souad Belkacem-Sadoun rencontrée dans la nuit de dimanche 17 mai dans les locaux du MDS, sur les hauteurs d’Alger. L’avocate, très affaiblie par la grève qui est aussi un facteur déclenchant d’hypoglycémies (elle est diabétique), tient à rappeler que son «renvoi» du corps des avocats a été décidé «sur injonction de Me Wahrani», sa robe noire étant suspendue, dit-elle, à vie. La cause ? «J’ignore le motif de la radiation. Mais tout ce que je sais, c’est que je n’ai pas la langue dans la poche pour ce qui est du devenir de la profession. Je crois que mon esprit critique et ma volonté à m’impliquer dans l’amélioration de la dignité de l’avocat y est pour quelque chose», ajouté cette dame ayant 17 ans métier. Quant à Me Djamel Saker, un «vieux» du barreau, ex-directeur de plusieurs établissements pénitentiaires et enseignant à l’Université de formation continue (UFC), son cas relève de l’«irréel». «Wahrani est allé jusqu’à commettre un faux pour me virer de la profession. Il prétend que j’ai rédigé une demande de mise en disponibilité alors que je n’ai aucune connaissance de ce mystérieux document. En tout cas, Wahrani a réussi à m’écarter des tribunaux malgré mon recours à la justice et mes maints appels à exiger une expertise graphologique. En vain. Au niveau de l’instruction, on a décidé de blanchir Wahrani sans juger utile de s’approfondir dans cette rocambolesque affaire», explique le gréviste dont les traits font ressortir une grande fatigue. Pour ce qui est du troisième gréviste, Me Abdelkader Bendaoud, sa mise à l’écart «est dû au fait que le CV [de ce dernier] risquait d’éclipser le "chef"». «Le bâtonnier avait une obsession maladive de me voir ailleurs qu’au tribunal ou dans une cour de justice. Il n’a jamais admis que mon CV puisse mettre en exergue mon statut d’expert attitré dans mon pays, mais aussi au sein de l’Union européenne et de l’ONU. Il en était malade. Il avait peur pour sa place surtout que mes états de service, grâce à l’Etat algérien, font ressortir mon statut de formateur de magistrats et d’avocats de la République arabe sahraouie démocratique et d’expert de l’UNHCR. Je ne vous ai pas cité tout, comme mon statut de membre de l’Association américaine des avocats et des magistrats. Me Wahrani n’admettait pas que je possède ce CV. Il a décidé alors de me virer. Agissant comme dans une république bananière», explique-t-il, dépité. Il y a lieu aussi de citer le cas de Mohamed Boutaleb, un jeune avocat stagiaire, qui serait lui aussi victime lui aussi du bon vouloir de Wahrani. Au lendemain de sa prestation de serment le 9 novembre 2013, en compagnie de 310 autres confrères, il devait poursuivre un stage de deux ans, conformément à la loi 13/07 et son article 36 régissant la profession. Le bâtonnier, selon Boutaleb, avait décidé de réduire le stage à une année, s’inscrivant ainsi en porte-à-faux avec la loi. Selon lui, cette mesure a été prise pour «récompenser» les jeunes stagiaires qui devaient «remplir la salle» d’une AG pour reconduire les instances de l’Ordre des avocats. «Le seul qui a refusé cette mascarade c’était moi. Et, bien entendu, j’ai été puni sans pitié pour cela. On a donc décidé de me fermer la porte de la profession. Je suis interdit d’exercice», explique-t-il. Un avocat de Sidi Bel-Abbès, Me Abdelhak Bénaïssa, 25 ans de métier, et un journaliste free-lance oranais, Mohamed Belbekkouche, ont rejoint le groupe des grévistes de la faim. Le premier cité est radié lui aussi «pour avoir osé demander des comptes à l’union locale des avocats ; le second ayant été agressé par le fils du bâtonnier d’Oran à cause de ses écrits sur ce qui est désormais connu de «l’affaire des avocats grévistes d’Oran».
Rafik Bahri
 

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