Nomination de Mazouzi à la tête de Sonatrach : un signal positif à l’adresse des investisseurs sérieux
Amine Mazouzi arrive à la tête du groupe Sonatrach dans une conjoncture particulièrement difficile. Les prix du pétrole et du gaz au plus bas depuis plus d’une décennie annoncent de sombres perspectives pour cette plus grande entreprise en Algérie et en Afrique. Cette nomination intervient aussi dans un contexte marqué par les procès sur les graves scandales de corruption qui ont écorché l’image de Sonatrach aussi bien au niveau national qu’international. Redorer le blason de ce groupe, qui représente les poumons de l’économie nationale en ce sens qu’il génère l’essentiel des revenus de l’Algérie, n’est donc pas chose aisée. Sonatrach souffre aussi des stigmates de la gestion chaotique de l’ère de l’ex-ministre de l’Energie, Chakib Khelil, dont tout le monde dit qu’il était le vrai PDG du Groupe. Une mission titanesque qui nécessite compétence, sacrifice et persévérance. La conjoncture est telle qu’il est impératif de faire appel à des managers compétents pour y faire face. A titre illustratif de cette situation difficile et complexe, il y a lieu de relever l’urgence d’aller vers la transition énergétique que tous les experts en la matière jugent indispensable pour l’avenir. Car 96% de l’électricité consommée est produite en Algérie à partir du gaz naturel, 3% à partir du diesel et 1% à partir de l'eau. La chute des prix du pétrole et les perspectives peu prometteuses du secteur à moyen et long termes semblent avoir convaincu le gouvernement à changer de cap et à revoir sa stratégie sectorielle en matière d’énergie. Ainsi, la nomination du nouveau PDG de Sonatrach entre dans cette stratégie pour une transition énergétique maîtrisable autour de quatre axes privilégiant un bouquet énergétique axé sur le transfert de savoir-faire managérial et technologique dans le cadre de partenariats gagnant-gagnant. Les besoins de l'Algérie en gaz naturel seront de 75 milliards de mètres cubes en 2030. La consommation de gaz naturel représente 34% de la production totale en Algérie et la demande interne est en forte croissance (12,4% de 2011 à 2012). La progression de la consommation interne est en rapport avec la croissance de l’activité économique du pays, passant de 14 milliards de mètres cubes en 2003 à 24 milliards en 2013 (les centrales électriques ont consommé 14 milliards de m3 en 2013 contre 9 milliards 2003). Cette croissance est appelée à augmenter davantage avec la stimulation de l’investissement privé. Il y a donc nécessité de valoriser les ressources gazières de l’Algérie. Pour améliorer sa production en hydrocarbures, Sonatrach doit exécuter un important plan d’investissement d’ici 2019 qui vaut 100 milliards de dollars. Sonatrach a retenu, entre autres, la réalisation de trois grandes raffineries à Tiaret, à Biskra et à Hassi Messaoud, en plus du lancement du mégaprojet de vapocraquage d'éthane, en suspens depuis plusieurs années. Baptisé «CP3K», ce projet sera réalisé à Skikda et devra créer 25 000 emplois durant la phase de sa construction, et 2 500 emplois permanents une fois entré en production. CP3K est considéré, selon des observateurs, comme un projet prioritaire et stratégique pour l'Algérie, car idéalement situé pour desservir les marchés européen et asiatique en polymères et en produits pétrochimiques en général. Pour diversifier ses sources de revenus, Sonatrach doit renforcer sa présence au niveau africain, notamment en Mauritanie, au Niger, au Mozambique et au Kenya. Un défi que doit relever le nouveau PDG de Sonatrach. Mettre au point un plan pour le redéploiement au niveau international n’est possible que si l’on valorise la compétence au sein du Groupe. Un message qui semble avoir été lancé à travers ce changement. Amine Mazouzi, fils du moudjahid Mohamed-Saïd Mazouzi, est connu au sein de Sonatrach pour ses compétences avérées et son intégrité. Sa nomination est un signal positif à l'adresse des investisseurs sérieux.
Rafik Meddour