Les inégalités socioéconomiques sources de discrimination en matière de santé et d’espérance de vie

Par Noureddine Bouderba – L’inaccessibilité aux soins pour les démunis, voilà où mène la marchandisation de la santé prescrite partout dans le monde par le FMI que les néo-libéraux veulent nous imposer ici en Algérie. Deux événements qui se sont déroulés récemment dans deux lieux éloignés de 10 000 km l’un de l’autre et à deux jours d’intervalle illustrent on ne peut mieux mes propos. Le premier qui s’est rapidement transformé en scandale national grâce aux réseaux sociaux s’est déroulé au Mexique et a vu une femme accoucher devant un hôpital qui avait refusé de l’aider. En effet, une mère a accouché seule sur une pelouse à l'entrée d'un hôpital parce que son personnel lui en a interdit l’accès. La mère, en pleine souffrance, est photographiée par un passant et la photo fait le tour du monde.La polémique secoue actuellement le Mexique à cause de cette photographie qui relance le débat sur l'accessibilité des soins médicaux pour les minorités ethniques. Un cliché cru publié en Une du quotidien La Razon et qui fait scandale depuis sa publication. Les réactions se sont multipliées en solidarité avec cette mère de 29 ans, mise à la porte du centre médical de l'Etat d'Oaxaca, par une infirmière alors qu'elle s'apprêtait à mettre son enfant au monde. Pendant que son pauvre époux tentait de persuader l’infirmière de la gravité de l’état de sa femme, la jeune Irma Lopez accouchait à une centaine de mètres pour donner naissance à son troisième enfant. Le deuxième événement, lui aussi en rapport avec la naissance, s’est déroulé, ici, chez nous à Constantine précisément et démontre que les «citoyens» algériens ne sont pas égaux devant les aléas de la vie avant même leur naissance ou lorsqu’ils la donnent. Là aussi le problème a été médiatisé grâce à une vidéo qui s’est répandue sur les réseaux sociaux. Mais cette fois on ne pourra étouffer l’affaire et «traîner en justice ceux qui ont filmé un lieu privé» comme on a coutume de le faire pour la simple raison que la vidéo en question est un reportage de la télévision publique : la «Trois». On découvre un service de maternité du CHU de Constantine dans lequel les femmes et les nouveau-nés s’entassent dans des conditions inhumaines. Jusqu’à quatre femmes avec autant pour les nouveau-nés dans un seul lit. Un service ressemblant plus à un dépotoir qu’à un lieu sanitaire. Des locaux insalubres, du sang partout, y compris sur les murs et des sachets sales emplissent les lieux. Cet exemple n’est que la partie visible de l’iceberg. 1 000 milliards de dollars de dépenses publiques en 15 ans pour arriver à cette situation. 15 ans parsemés d’évasion fiscale et parafiscale quand il ne s’agit pas d’exonération. De détournement quand il ne s’agit pas de dilapidation pour gestion irrationnelle. D’import-import quand il ne s’agit pas de surfacturation et d’import fictif. De choix d’investissement discutables, somptueux et coûteux à l’exemple de la grande mosquée qui coûtera au bas mot 1,5 milliard de dollars (deux fois l’impact annuel de la révision du 87 bis relatif à la redéfinition du SNMG). Ceci au moment où les «oligarques», pour reprendre un terme qui est cher aussi bien à Louisa Hanoune qu’à Ouyahia (mais pour des raisons différentes), sont transférés pour des soins à l’étranger pour le moindre malaise. Qu’on rende publics les dessus des dettes impayées dont font état les hôpitaux de Paris, mais que la Cnas conteste à juste titre. La question de la politique de la santé en Algérie a été abordée dans ma contribution publiée à l'occasion du 1er mai 2015 sous le titre «Contrer l’offensive néolibérale et défendre les acquis des travailleurs» dont je reprends ci-après quelques extraits :
«Les dépenses globales de santé (DGS), c'est-à-dire le montant global que la société dépense pour ses besoins sanitaires s’élève à 439 dollars par habitant et par an contre 4 000 dollars/hab./an pour les pays de l'OCDE (chiffres de la Banque mondiale, 2012). Autrement dit, un citoyen de l'OCDE dépense en moyenne 10 fois plus pour se maintenir en bonne santé qu'un citoyen algérien. Ramenées au PIB, les DGS de l'Algérie représentent 5,3% du PIB contre 6,6 fois le PIB au Maroc et 7 fois le PIB en Tunisie. Ce retard est encore plus accentué pour les populations défavorisées si l'on prend en compte la répartition interne des revenus affectés aux besoins de santé et le favoritisme existant pour l'accès aux services publics de santé. La politique de la marchandisation de la santé suivie cette dernière décennie est caractérisée par une remise en cause graduelle de la médecine gratuite et le désengagement de l’état qui ont eu pour conséquence l'effort insoutenable imposé aux ménages pour financer les coûts liés à la santé. Certains experts affirment que la part des ménages dans le financement des DGS qui était de l'ordre de 10% dans les années 70 et 80’ s'élève aujourd'hui à 35%-40%. La promulgation de la nouvelle loi relative aux mutuelles sociales et le projet de loi relative à la santé s’inscrivent en droite ligne dans cette politique.» Fin de citation.
N. B.

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