Les Algériens de France à Marion Maréchal-Le Pen : «Vous avez une obsession malsaine !»

«Qui n’a pas vibré au sacre de Reims n’est pas vraiment français.» Madame, nous vous rappelons charitablement que, depuis des siècles, des valeurs communes sont à la base du «vivre ensemble» en France. Ce sont ces valeurs qui ont généré de nouveaux modèles de coexistence. Savez-vous, madame, que la France actuelle est née d’une exigence d’ouverture vers le monde, qui a permis à son histoire de composer avec des groupes ethniques différents par langue, confession, culture et tradition. Il en découle naturellement que «la fille aînée de l’Eglise», dont vous ne maîtrisez que superficiellement l’histoire, n’est pas fondée sur la descendance et les liens du sang, mais sur une volonté d’appartenance. La diversité de sa population a depuis longtemps été un élément constitutif de l’identité de son peuple. Marion Maréchal-Le Pen, ne ridiculisez donc pas avec vous ceux qui seraient tentés de vous croire. Votre soif du pouvoir n’excuse pas votre mépris de la vérité et de l’honnêteté en politique. Apprenez à respecter l’art de la politique qui exige que la solution aux problèmes de la société doit toujours être pragmatique et non purement idéologique. Cet art, pour être exercé avec talent, consiste à s’investir honnêtement afin de désamorcer les conflits et trouver des réponses communes, sachant que les électeurs auront toujours le dernier mot. Sans aucune prétention ni volonté de préciser le niveau de votre quotient intellectuel, vous confondez allègrement l’idée de la patrie (terre où l’on naît et grandit) et le lieu d’origine (terre des ancêtres). En ce sens et à vos yeux, «qui n’a pas vibré au sacre de Reims n’est pas vraiment français» le citoyen de la République qui vit des identités multiples. Génétiquement passéiste, vous qui aspirez à diriger une grande région française et peut-être demain la France, ignorez-vous, madame, que du fait de l’accélération du phénomène de la mondialisation, un citoyen peut naître à un endroit, vivre et travailler à un autre et pouvoir se référer à la terre de ses ancêtres comme à une «patrie», tout en vivant ailleurs et en respectant les devoirs inhérents à sa citoyenneté. Vous avez une obsession malsaine lorsque vous affirmez «qui n’a pas vibré au sacre de Reims n’est pas vraiment français». Vous voulez tirer politiquement à vue sur tout ce qui est musulman en France. Pour cela, vous vous appropriez l’histoire de France et les valeurs chrétiennes, les proclamant politiquement comme les seules valeurs qui méritent d’être arborées et proclamées. En réalité, vous les instrumentalisez contre une composante nationale que vous désignez impunément comme ennemi potentiel, au prétexte que ses membres sont renvoyés à la confession musulmane, pour être systématiquement stigmatisés. Vous n’avez rien inventé puisque vous avez été à la bonne école. Les paroles de votre chanson sont trop anciennes. Elles sont usées. Vous vous échinez à les réadapter pour la consommation politique du moment. Pour ce faire, vous cherchez un effet d’identification entre la catholique que vous prétendez être et la femme politique du Front national qui instrumentalise des valeurs religieuses pour «défendre les traditions chrétiennes», sans pour autant les comprendre, comme le font le pape et certains dignitaires de l’épiscopat français. Une chose est certaine, à vous écouter «parloter» vous n’avez pas les moyens intellectuels d’en relever le défi. Vous tentez avec le Front national, en région Paca, mais aussi en France, de convaincre politiquement que la meilleure façon de défendre le christianisme est de limiter la citoyenneté des Français de confession musulmane, restreindre leurs droits et leurs libertés, en exploitant la haine comme ciment pour construire des murs entre tous les habitants de la France. En agissant ainsi, ignorez-vous que vous êtes en train de réhabiliter le discours du régime de Vichy ? Marion Maréchal-Le Pen, sachez que dans la religion chrétienne dont vous voulez être, sans mandat religieux, le porte-drapeau politique, comme dans les autres religions monothéistes, on prescrit d’aimer l’étranger «comme soi-même». Pour vous rafraîchir la mémoire ou éventuellement compléter votre culture, nous citons le Deutéronome 24,17-22 : «Tu ne feras pas dévier le droit de l’immigré ni celui de l’orphelin, et tu ne feras pas saisir comme gage le manteau de la veuve. Souviens-toi que tu as été esclave en Egypte et que le Seigneur ton Dieu t’a racheté. Voilà pourquoi je te donne ce commandement. Lorsque tu feras ta moisson, si tu oublies une gerbe dans ton champ, tu ne retourneras pas la chercher. Laisse-la pour l’immigré, l’orphelin et la veuve, afin que le Seigneur ton Dieu te bénisse dans tous tes travaux.» Le Lévitique 19, 33-34 est encore plus précis : «Quand un immigré résidera avec vous dans votre pays, vous ne l’exploiterez pas. L’immigré qui réside avec vous sera parmi vous comme un israélite de souche, et tu l’aimeras comme toi-même, car vous-mêmes avez été immigrés au pays d’Egypte. Je suis le Seigneur votre Dieu.» Votre foi religieuse affichée est politisée. Vous ne pouvez pas concevoir que la coexistence se fonde certes sur des valeurs, des normes et des attitudes partagées, mais qu’en même temps, il nous faut reconnaître les différences et rechercher le dialogue.
Pour nous musulmans, ouverts sur le monde, les différences ne doivent pas séparer les populations, mais doivent être une opportunité de rencontre. Pour nous musulmans, ouverts sur le monde, la promotion du dialogue et une confrontation positive sont indispensables pour reconnaître un ensemble de valeurs humanistes communes, sur lesquelles nous pourrions nous appuyer pour nous respecter mutuellement. Vous, Marion Maréchal-Le Pen, vous voulez conquérir le pouvoir en divisant les composantes et les familles spirituelles de la société française. Vous refusez la coexistence pacifique en distribuant gratuitement la potion magique de la peur. Vous excellez avec votre parti dans le zèle de la désinformation pour développer une réaction de défense chez certains Français au lieu d’encourager chez eux l’esprit d’hospitalité dont ils se prévalent dans le monde. Pis, Marion Maréchal-Le Pen, pour satisfaire votre soif de reconnaissance, vous préférez les subjuguer de manière sournoise en leur dérobant leur conscience humaine et citoyenne, l’histoire de leur pays et peut-être même leur culture.
L’Alliance des associations des Algériens de France
 

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