Contribution d’Ali Bouziane – Non, colonel Baud, il n’y a pas de «spécificité terroriste algérienne» !

La Suisse est peuplée d’abord de gens de bon sens, ensuite d’experts en terrorisme… algérien. Il s’en trouve dans tous les milieux. Surtout parmi la gent pensante ; celle qui façonne l’opinion publique et inspire les médias. Ah, la bien-pensance européenne ! Dans les années 1990, elle a ouvert toutes les portes à la cohorte islamiste déconfite en Algérie, venue plaider la noirceur de l’armée algérienne. Beaucoup de ses ténors ont fait, depuis, amende honorable. L’effondrement des tours jumelles les a réveillés en sursaut. Ils se sont mis sur le tard à étudier la géopolitique terroriste. Mieux vaut tard que jamais ! Comment le colonel Baud peut-il ignorer que l’offensive islamiste en Algérie faisait partie d’un plan général concocté par les fins stratèges américains attelés à remodeler le monde arabe et musulman selon leurs intérêts, avec la complicité de certains pays riches du Golfe ? Comment peut-il ignorer que les Frères musulmans et leurs adeptes, partout dans l’aire arabe, ont été les agents objectifs de la politique américaine ? L’armée soviétique en Afghanistan a été combattue par les fidèles de l’idéologie des Frères musulmans et de ses dérivés, appelés en renfort, payés, entraînés, armés, organisés, encadrés par des agents des services spéciaux américains. On se souvient comment Shah Messaoud a été transformé en héros sans peur et sans reproche par la chaîne américaine CNN et les grands médias occidentaux en général. Ceux qui ont mis le feu dans les villes et les villages algériens, avant même la décennie 1990, ont fait leurs armes à Kandahar et Peshawar. L’Algérie n’a pas combattu un parti d’opposition interne, mais une Internationale islamiste décidée à abolir toute trace «d’algérianité» du pays pour instaurer un «califat» constitué d’entités tribales, articulées comme des sectes et sécrétant des milices aux mains de seigneurs de la guerre. Le drame syrien est un cas d’école. C’est à cette tragédie que l’Algérie a échappé. Parler d’une spécificité algérienne, c’est feindre d’ignorer la nature transfrontière du terrorisme islamiste ; c’est feindre d’ignorer que la violence salafo-djihadiste est inspirée par la même idéologie wahhabite, argentée par les mêmes pétromonarchies du Golfe, utilisant le même mode opératoire, instrumentée par la même puissance outre-Atlantique désireuse, à travers la plateforme algérienne, d’affaiblir l’Europe en y exportant le terrorisme et les migrants. Que serait devenue l’Europe, déjà assaillie par des vagues ininterrompues de migrants et par des tueurs djihadistes, si l’Algérie était tombée ? L’histoire a donné raison à l’Algérie. Le colonel Baud ne veut pas reconnaître ces vérités. Il ne veut pas reconnaître l’erreur de ses compatriotes qui ont été trompés par des gens comme Mourad D’hina, l’homme qui fabriquait, pour le compte des GIA, des détonateurs dans un laboratoire suisse. Reconnaître l’erreur, c’est avouer que son pays s’est rendu complice de l’assassinat des villageois algériens. L’improbable exercice de «saute-mouton», tenté par le colonel Baud, prétend démontrer que le terrorisme islamiste est partout détestable sauf en Algérie, parce que, là, il aurait eu des raisons morales pour sévir ; parce que, là, l’atteinte au principe démocratique de l’urne a conduit un mouvement «politique» à recourir à la «résistance» armée. La catégorisation des contextes est une vieille antienne. Selon le colonel Baud, «l’agenda du FIS» (une façon d’éviter de parler de violence terroriste ?) s’inscrivait dans le cadre d’une politique intérieure algérienne. C’est sans doute ce qui a autorisé la Suisse, abusée par des ONG militantes ou instrumentées par des milieux qui ont des comptes à régler avec l’Algérie, à devenir une base arrière des GIA, un podium médiatique pour ses sponsors et un tribunal pour ceux qui ont résisté à leurs offensives. En réalité, le colonel Baud ne veut pas reconnaître que son pays s’est ouvert comme un havre de paix pour les ONG et les associations «humanitaires» pour des raisons qui n’ont rien avoir avec les droits de l’Homme. Grattons-nous la tête ! Devinons ! Eloigner le spectre d’un autre Louxor ? Empêcher la migration vers d’autres Panama des milliards de pétrodollars entreposés dans les bunkers blindés de Zurich ? Ou bien encore – et certains mauvais esprits algériens n’étaient pas loin de le penser – les procédures engagées par des magistrats suisses contre ceux qui ont défait l’intégrisme ne sont qu’une opération «mains blanches» qui convient parfaitement aux politiciens suisses ? Le sacro-saint secret bancaire n’a été levé (en partie) que lorsque l’équipe hollandaise chargée de retrouver les traces des fortunes juives «oubliées» par les banquiers suisses au fond de leurs registres secrets a transmis les résultats de ses investigations au Congrès américain. Le tollé soulevé par le scandale avait forcé les imperturbables sphinx zurichois à faire amende honorable. Les grands principes suisses de défense des droits de l’Homme, que nous rappelle incidemment le colonel Baud, sont agités comme un spray magique censé rendre inodores les émanations nauséabondes qui suintent des bas de laine orphelins des victimes du nazisme. La Suisse, par tous ses banquiers, par tous ses magistrats et par tous ses colonels, est vraiment au-dessus de tout soupçon.
Ali Bouziane

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