Louisa Hanoune : «Nous sommes contre la destitution du président Bouteflika»
Par Hani Abdi – La secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune, affiche sa ferme opposition à la destitution du président de la République. Intervenant aujourd’hui sur les ondes de la Chaîne III de la radio algérienne, la première responsable du PT dénonce sans détour les appels à l’Armée de se mobiliser en faveur du changement et à la population de sortir dans la rue.
«Nous sommes contre ces appels parce que, pour nous, d’abord, l’armée a ses missions constitutionnelles et elle doit se limiter exclusivement à l’exercice de ses missions, c’est-à-dire protéger l’intégrité du pays, sa souveraineté, les frontières, etc. Nous avons déjà vécu par le passé des situations similaires et nous pensons que du point de vue de la démocratie, même le ministre de la Défense doit être une personnalité civile, parce que le militaire est une question politique d’abord», affirme Mme Hanoune, selon laquelle «ceux qui appellent l’Armée à intervenir sont en réalité ceux qui veulent être propulsés sur le dos des chars».
La première responsable du PT distingue deux catégories : celle qui demande un coup d’Etat de l’intérieur et celle qui réclame carrément une intervention étrangère. «Il y a ceux qui appellent l’Armée à intervenir de l’intérieur, il y a aussi ceux qui appellent à une intervention étrangère parce qu’ils savent qu’ils n’ont pas de place dans la société, qu’ils n’ont pas une dimension politique nationale et qu’ils n’ont donc aucune chance d’être élus. Une intervention militaire provoquera l’irrémédiable», dénonce-t-elle.
Pour Louisa Hanoune, c’est la même chose pour ceux qui appellent la population à sortir dans la rue. «Très souvent, ce sont des personnes qui ont été au pouvoir. Et quand elles sont éjectées, elles deviennent des opposants, mais alors d’une extrême violence. Pas tous, certes. Il y a ceux qui ont gardé la boussole. Quand on appelle la population à sortir dans la rue et qu’on n’est pas un dirigeant d’un parti politique, c’est-à-dire qu’on n’est pas capable d’encadrer ni de mettre des garde-fous, cela veut dire qu’on peut préparer le terrain au chaos, cela veut dire que c’est le printemps arabe en quelque sorte. Tardif, mais un printemps arabe quand même», prévient-elle.
«Quand j’entends des personnalités qui appellent la population à sortir dans la rue pour l’application de l’article 102, cela soulève moult interrogations. Nous sommes un parti légaliste et nous nous battons pour le respect de la souveraineté du peuple. Si le peuple veut révoquer, que cela se fasse sur le terrain de la démocratie. Mais sinon, ça devient un putsch. De plus, on est à un peu plus d’une année de la présidentielle», soutient-elle, avant d’enchaîner en estimant que «c’est quand même très étrange comme démarche».
«Et en même temps, on appelle les partis politiques de l’opposition à se réunir. De quel droit ? Nous sommes un parti indépendant, souverains dans nos orientations, nos positions. Nous ne permettons à personne de nous dicter quoi que ce soit ni dans les institutions ni à l’extérieur des institutions», lance-t-elle sur un ton ferme, rappelant que «la politique, ce sont des processus que personne ne peut maîtriser».
«Personne ne peut appuyer sur un bouton et dire que demain il y aura une révolution en Algérie. Pour nous, la révolution comme la politique d’une manière générale, ce sont des processus. Nous militons pour une Assemblée constituante. Nous avons vu les élections du 4 mai et la défiance qui s’est exprimée. Nous allons vers des élections de guerre contre le multipartisme et contre la démocratie politique», martèle-t-elle, considérant cette situation comme extrêmement dangereuse «parce que le système en place n’est plus capable de se renouveler ni de s’autoréformer».
Louisa Hanoune estime que la solution de l’Assemblée constituante peut passer par le Président lui-même ou par une dynamique populaire sérieuse et encadrée par des partis patriotiques comme le PT. Ainsi, Louisa Hanoune répond sèchement à Noureddine Boukrouh qui appelle à la fois l’Armée à intervenir et la population à sortir dans la rue, à Soufiane Djilali et trois autres personnalités nationales, à savoir Ahmed-Taleb Ibrahimi, Abdennour Ali-Yahia et Rachid Benyelles, qui demandent l’application de l’article 102 de la Constitution pour destituer le président Bouteflika.
H. A.
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