Du crétinisme parlementaire à l’idiotisme citoyenniste

citoyen
Les Gilets jaunes persistent dans leur mouvement de protestation. D. R.

Par Mesloub Khider – «Le seul référendum que nous acceptons est celui que nous organiserons et qui décidera de supprimer l’Etat des milliardaires. Tout autre vote ne serait qu’une comédie du pouvoir !» (Commentaire d’un Gilet jaune).

Le mouvement Gilets jaunes nous réserve bien des surprises politiques. Des surprises mouvementées sont encore en réserve sous le gilet désormais politiquement à jeun. Avec le mouvement Gilets jaunes, nous sommes passés du micmac revendicatif social insurrectionnel au ric-rac politique consensuel. De la confusion populaire dans la lutte totale à la fusion citoyenne au sein du corruptif capital. De la méfiance des institutions étatiques à la confiance extatique des institutions. Du rejet des organisations politiques par la lutte subversive à la politique de l’organisation de la lutte pacifique.

Du projet de destruction institutionnelle parlementaire à l’institutionnalisation d’une construction référendaire citoyenne. Du combat salvateur contre tous les vices des idéologies politiques traditionnelles au traditionnel débat sur les vertus de l’idéologie politique citoyenniste. De l’espace public populaire propice à l’affrontement de classes au spacieux palais privé parlementaire réputé pour son désamorçage des conflits sociaux. De la parole publique revendicative et délibérative à la parlote privée poliment consultative et restrictive.

De la dissidence conflictuelle sociale animée de l’aspiration à l’établissement d’une société débarrassée des imposantes inégalités dues au capital, au rétablissement de la bonne conscience citoyenne tolérant les disparités sociales imposées par le capital. Du processus insurrectionnel au consensus institutionnel. De l’accès de colère collective exprimé en public à l’excès électoral privatif exercé dans l’isoloir. De l’expression de la parole collective libérée à la prononciation électoraliste du citoyen atomisé. De la détestation de la classe politique officielle à la proclamation officielle d’intégrer la crasse politique institutionnelle.

De l’affirmation du discours populaire dépourvu de tout respect du légalisme dominant à la phraséologie consensuelle prônant une morale de «bonne conduite citoyenne». De l’aspiration au dépassement du capitalisme par sa destruction à la construction idéologique d’un projet d’harmonisation du capitalisme pour façonner la paix sociale. De la résolution de braquer les briques de la finance pour les socialement partager au réaménagement des bric-à-brac politiciens financiers pour les privativement protéger.

De la discréditation des instances intermédiaires dénoncées pour leur vicieuse corruption condamnable à la revalorisation des corps médiateurs étatiques soudainement redevenus vertueusement fréquentables et recommandables. De la condamnation des profits et des clivages de classes au classement des clivages de classes en pertes et profits. De la mobilisation radicale pour réclamer du Fric à la démobilisation amicale par la réclame pour le RIC. De l’action mobile collective en faveur du pouvoir d’achat à l’achat par le pouvoir des faveurs des collectifs immobilisés. De la détermination de conquérir la dignité socialement à la socialisation de l’indignité par le partage des miettes monétaires.

De la contestation populaire subversive de toute forme de compromission avec le pouvoir au compromis incontestable formalisé avec le pouvoir par la négociation obséquieusement révérencieuse. De la radicale position à décapiter la démocratie représentative financière à la française à la capitularde disposition d’instituer une démocratie bancaire directe à la suisse où le ric est périodiquement convoqué dans ce pays à fric. De l’exigence d’une transformation sociale par la rue à la déformation des exigences sociales de la rue. De l’initiative populaire à s’auto-organiser sur son territoire de lutte contre le pouvoir à la déterritorialisation de l’organisation populaire sur l’initiative du pouvoir pour éradiquer la lutte.

De la volonté de mener le combat politique contre la crise par le bas dirigé par le peuple à la sortie de la crise par un captieux débat politicien piloté par le haut du pouvoir. De la révocation de la politique spectacle, incarnée par les acteurs du capital à l’invention spectaculaire de la fiction du référendum révocatoire au sein du capital. Du combat viril populaire contre la précarité des conditions de vie à la survivance des conditions de la précarité grâce au débat stérile citoyen. Du désir luxueux de changer le monde à l’immonde luxure de changer juste les désirs.

De l’opiniâtreté à abattre la royauté macronienne en signant pour l’histoire sa mort avec le populaire stylo Bic à la manipulation idéologique de l’opinion pour préserver stylistiquement l’empire capitaliste à coup de Ric. De la révolte contre la misère à la misère de la révolte. Du souffle de la révolution au bout du combat au combat à bout de souffle révolutionnaire.

Enfin, avec le fourvoiement du mouvement sur l’échiquier de la politique des bourgeoises anachroniques doléances, nous lui souhaiterions, hélas, bientôt nos populaires regrettables condoléances.

M. K.

Comment (4)

    Zaatar
    1 janvier 2019 - 12 h 42 min

    Finalement, un peuple d’en bas est et restera un peuple d’en bas sans relativiser. Qu’on soit en Afrique, en Europe ou ailleurs. On comprend mieux, et ca confirme, que malaxer l’esprit d’un peuple est un exercice assez simple pour ceux supposes etre des elites. La seule crainte est lorsque trop de lests est lache et qui peut conduire a des situations delicates et c’est ce que l’on constate avec les gilets jaunes en France. On peut alors expliquer d’une facon rationnelle l’histoire de notre humanite.

    Anonyme
    31 décembre 2018 - 23 h 21 min

    Article très clair et très bien écrit.

    Scannéro
    31 décembre 2018 - 17 h 01 min

    Combien de joints il faut fumer et combien de fois il faut secouer une cervelle pour écrire une « tchatche » qui ne décrit rien et, pire encore, n’explique rien ?

      Die Kunst ein Mensch zu sein
      31 décembre 2018 - 21 h 29 min

      Aucun.

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