Du tourisme exotique au tourisme lubrique

tourisme
Les richesses touristiques naturelles de l'Algérie n'attirent pas les touristes. D. R.

Par Mesloub Khider – «La terre est une vieille prostituée. Elle se vend partout», a écrit l’écrivain Pierre MacOrlan. Transfigurée par le capital, elle sait mettre en valeur ses charmes naturels, monnayer ses paysages voluptueux, ajouterai-je.

Le tourisme est un phénomène inhérent au monde occidental capitaliste. Dans un univers concentrationnaire où l’homme moderne passe la majeure partie de sa vie enfermé dans les bagnes industriels ou les geôles du tertiaire, cloîtré dans des habitations carcérales bétonnées, cet homme opprimé et stressé éprouve le besoin de s’évader de sa prison urbaine et mentale. En guise de thérapie compensatrice, les voyages lui permettront, pense-t-il, de soigner son affliction existentielle. De s’offrir quelques évasions furtives vers des contrées exotiques. S’accorder quelques moments de pureté loin de son monde urbain pollué, de sa vie quotidienne souillée, de sa famille atomisée, de sa culture originelle lobotomisée.

L’horreur touristique

L’horreur touristique s’abat sur l’ensemble de la planète. Tous les pays sont mis en coupes réglées. Aucun espace n’échappe à la concurrence. Chaque pays investi dans les infrastructures touristiques pour attirer le maximum de clients. A l’instar de la péripatéticienne vantant les agréments de son anatomie lascive et orgastique, chaque pays magnifie les attributs exceptionnels de son territoire : nature luxuriante, mer cristalline, patrimoine culturel exceptionnellement riche… Cette politique touristique participe de la spécialisation des pays, s’intégrant dans la division internationale du travail. Obérant pour les pays du Sud toute diversification productive, pénalisant tout développement économique authentique et pérenne.

En outre, l’industrie du tourisme participe grandement à la destruction de ces contrées dont elle tire profit. Ainsi, elle vend ce qu’elle contribue à détruire, notamment par la destruction écologique, la désagrégation sociale et culturelle, la défiguration des régions entières transmuées en zones spécifiquement touristiques. En outre, par la rapacité mercantile de l’industrie du tourisme, le «monde touristique» est mis en mode «économie productive» : les villes transformées en musées, les campagnes muées en parcs d’attractions rentables, les littoraux métamorphosés en sites bétonnés.

Par ailleurs, les populations «autochtones» sont folklorisées par les protagonistes de leur déculturation, ces Occidentaux ethnocidaires responsables des désordres anthropologiques irréversibles infligés aux peuples longtemps colonisés (introduction de l’argent, de la propriété privée, destruction des modes de production traditionnels, exode rural, etc.). Sans oublier que la majorité de la population locale des pays dits touristiques ne profitent jamais des infrastructures du tourisme (complexes touristiques, hôtels, piscines, plages, divers secteurs de distractions et de loisirs, et autres multiples sites), réservées aux seuls voyageurs occidentaux richement solvables.

Naissance du tourisme

Historiquement, le terme touriste entre dans la langue en 1816 et tourisme en 1841. Mais c’est au XVIIIe siècle que fleurit la mode du tourisme ou plus exactement des voyages. Elle prend naissance en Grande Bretagne, première puissance économique à l’époque. En effet, c’est à cette époque que de jeunes riches et aristocrates anglais commencent à faire leur grand tour de l’Europe. Ils visitent la France, l’Espagne, l’Italie, etc. Ensuite, au cours du XIXe siècle se développe le tourisme bourgeois. Sa consécration se matérialise par la création de la première agence de voyage par Thomas Cook en 1841. Dans le sillage de l’industrialisation et de l’urbanisation de l’Europe se développent parallèlement les premiers moyens de transport modernes, favorisant l’expansion du tourisme Au début, le chemin de fer constitue la principale locomotion mécanique rapide. Ensuite, au XXe siècle l’avion remplacera les chemins de fer comme moyen de navigation aérienne rapide. Plus tard, les premières autoroutes sont créées en Italie (1924) et en Allemagne (1932).

C’est au lendemain de la seconde «boucherie mondiale», au cours des Trente glorieuses, que le tourisme connaît réellement son essor. Le tourisme se démocratise. Se massifie. Se popularise. L’industrie du tourisme se structure, notamment par la création de nombreuses agences de voyages, la publication de guides touristiques, l’invention de clubs, l’élargissement des infrastructures dévolues au tourisme (hôtels, aéroports).

Aujourd’hui, le tourisme est devenu un véritable produit de consommation courante. Il génère des milliards de chiffres d’affaires et de substantiels profits. En matière économique, le tourisme devance les industries pétrolière et automobile. Il est devenu la première activité mondiale, avec plus de 200 millions de salariés employés. Soit quasiment 10% de l’emploi mondial. Le tourisme est en forte croissance. A mesure que le mode de vie occidental se répand, le tourisme se développe.

Exutoire touristique

De façon générale, dans la société capitaliste moderne, le tourisme a pour fonction de procurer, à l’Occidental stressé, immergé dans une atmosphère urbaine polluée, une ambiance temporelle haletante, un rythme de vie trépidant, l’exotisme, la sensation factice de bonheur, le soleil, la détente, un bien-être absent de son quotidien cimenté par le stress. En un mot, un sentiment d’évasion et de dépaysement. Pour ce touriste occidental à la vie accidentée par le travail aliénant, il s’agit de partir savourer la «pureté» de la nature, les sites vierges sauvages écologiques ; découvrir des «peuplades» autochtones folklorisées, infantilisées.

Le tourisme offre au voyageur occidental, en quête de son paradis perdu, un dépaysement garanti par la découverte de paysages féeriques. Plongé dans ces horizons édéniques, le touriste occidental peut communier avec des espaces et horizons fantastiques. Il peut se ressourcer, se régénérer, se purifier, le temps de ce séjour éphémère furtif, avant de regagner l’enfer de son quotidien bétonné d’agressions stressantes protéiformes, barbelé d’activités professionnelles aliénantes, oppressantes, déprimantes.

A notre époque moderne capitaliste mondialisée, le tourisme constitue l’ultime étape de la marchandisation de la société. De fait, les pays du Sud, souvent sous-développés, sont livrés à la perversion du capitalisme. Longtemps épargnées par les rapports marchands, ces régions traditionnelles pauvres ont été infectées par l’introduction du mercantilisme, la «civilisation» capitaliste. Désormais, la cupidité gouverne les mentalités de ces populations périphériques. Le mode de vie de ces sociétés a subi une véritable mutation anthropologique. Ces sociétés traditionnelles, sous l’effet corrosif du tourisme, se décomposent. Victimes des prédateurs touristiques et des spéculateurs immobiliers, ces populations sont expropriées de leurs terres et de leurs villages pour être parquées à la périphérie des villes. Perdant ainsi le lien avec leurs racines, leurs coutumes, leurs traditions. Aussi finissent-elles par se désagréger.

De fait, ce secteur rentable du tourisme, le capitalisme l’a investi avec d’énormes moyens de communication, notamment par le recours effréné à la publicité. Pour l’exploiter de manière optimale, le capitalisme a favorisé le développement de cette industrie du tourisme collectif, le voyage organisé. Le voyageur, devenu consommateur quasi compulsif de produits touristiques, est constamment assailli de propositions de séjours aux tarifs réputés compétitifs et économes en temps. Aussi, les tarifs des séjours sont-ils tirés de plus en plus vers le bas, accompagnés d’une réduction du gaspillage de temps.

Comme au sein du monde de l’entreprise où les gains de productivité et l’optimisation temporel dominent la logique capitaliste, l’industrie du tourisme a intégré ces catégories marchandes capitalistiques dans ses offres de voyages. Le temps de transit est proscrit, car il est considéré comme du temps mort. Désormais, l’objectif principal des voyagistes est donc d’acheminer le touriste aux points de consommation touristiques dans un temps court. Cet objectif est assuré grâce au développement exponentiel des moyens de transport à grande vitesse, comme l’avion et le TGV, et grâce aussi aux réseaux d’autoroutes. Cette croissance des transports s’effectue malheureusement au prix de la pollution de l’écosystème. En effet, toute cette technologie des transports modernes est obtenue moyennant une consommation de ressources énergétiques et d’une pollution grandissante. Ainsi, l’industrie touristique est un vecteur de destruction écologique, sociale et culturelle.

Ironie du sort, la croissance exponentielle des moyens de transport, étendue à l’ensemble des pays, entraîne parallèlement l’aménagement des diverses structures aéroportuaires et urbaines, homogénéisant ainsi les espaces architecturaux. Générant corrélativement une uniformisation urbaine du monde, au point de réduire considérablement la frontière de l’exotisme au fur et à mesure du développement du tourisme. Aujourd’hui, tous les pays, toutes les grandes métropoles sont identiques, uniformes. Aussi, pour savourer réellement les délices du dépaysement, les opérateurs touristiques organisent des séjours dans des contrées de plus en plus reculées, isolées, inhabitées.

Par ailleurs, si certaines sociétés traditionnelles érigent la virginité de la femme en dogme qu’aucune loi humaine ne doit violer au risque de stériliser définitivement la communauté, le capitalisme, quant à lui, n’existe que par la violation permanente des espaces vierges réduits en terrains à exploiter et à féconder financièrement. L’industrie du tourisme ne déroge pas à cette loi du viol des espaces vierges transformés en lieux de valorisation du capital par la colonisation mercantile de ces contrées longtemps demeurées impénétrables, vierges, épargnées de tout contact humain occidental infecté par la civilisation marchande. C’est ainsi que certains sites naturels, comme de nombreux monuments millénaires, épargnés longtemps par l’invasion humaine mercantile, sont aujourd’hui davantage menacés par la fréquentation outrancière des masses touristiques que par les outrages du temps. On peut citer comme exemple le site de Lascaux, qui a failli disparaître sous l’effet du souffle des visiteurs.

Désert touristique algérien

Quant à notre cher pays, l’Algérie, il est en délicatesse avec le tourisme. En effet, en Algérie, le tourisme ne décolle pas. Pourtant, le pays recèle des trésors touristiques splendides. En dépit de ses multiples atouts enchanteurs, l’Algérie n’attire pas les investisseurs dans le secteur du tourisme. Donc les touristes.

Pourvue d’un littoral de 1600 kilomètres, l’Algérie constitue une destination idéale pour le tourisme. Sans oublier d’autres merveilles, tels les vestiges romains, les gravures rupestres, le majestueux désert… Néanmoins, le tourisme sommeille sous le soleil ardent réchauffant et irradiant uniquement les habitants algériens, sous le ciel bleu azur réservé aux seuls citoyens algériens. Et pour cause.

Nombre d’Algériens intéressés déplorent l’absence d’investissements dans le secteur du tourisme. En effet, l’activité touristique en Algérie ne parvient pas à se réveiller de sa léthargique somnolence économique. Et l’activité touristique n’est pas près de décoller. Pour preuve, ces vingt dernières années, l’Algérie n’a attiré que 3 000 touristes par an. Chiffre ridiculement dérisoire comparé aux autres pays voisins. En 2018, le nombre de touristes venus en Algérie n’a pas excédé 2 000 visiteurs. Le secteur du tourisme est négligé depuis maintenant plus de trente ans par les pouvoirs publics. Sur la carte touristique mondiale, l’Algérie demeure inexistante, invisible.

Pourtant, ces dernières années, à la suite de la baisse du prix du pétrole, dans le cadre de la diversification de l’économie algérienne principalement tributaire des hydrocarbures, l’activité touristique a été inscrite dans le programme de réorientation de l’économie. En dépit de la volonté affichée par le pouvoir de promouvoir et de relancer l’activité touristique, on n’assiste à aucun redémarrage de ce secteur déserté par les investisseurs.

A l’indigence de la politique de promotion du tourisme en Algérie vient se greffer le problème de l’obtention du visa algérien pour les nombreux voyageurs désireux visiter l’Algérie.

Aujourd’hui, au plan des infrastructures touristiques, l’Algérie ne dispose que de 50 000 lits en bord de mer. À l’échelle nationale, l’Algérie compte seulement un peu plus de 110 000 lits. En outre, pour des raisons de sécurité, de nombreux sites touristiques, tel le Hoggar, sont fermés aux étrangers. Au reste, l’Algérie demeure parmi les destinations les plus onéreuses d’Afrique du Nord. Juste pour le prix du billet d’avion, le coût du voyage est exorbitant. Sans compter le coût du séjour très élevé comparé aux pays voisins.

Néanmoins, eu égard à notre analyse critique du tourisme en général décrite plus haut, contrairement aux thuriféraires partisans de l’ouverture de l’Algérie au tourisme, on peut conclure que la décision de fermer les frontières au tourisme international dans les années 1980 a été un choix politique légitime. En effet, à la faveur de l’augmentation considérable des recettes pétrolières, dès les années 1980, l’Algérie a tourné le dos au tourisme. Pour promouvoir et investir dans le tourisme interne, destinés aux seuls citoyens algériens. En outre, ce choix de se détourner du tourisme international a été motivé par des raisons de préservation des traditions algériennes susceptibles d’être corrompues par l’invasion des touristes occidentaux porteurs de cultures étrangères dissolvantes.

Cette crainte du saccage du patrimoine culturel algérien par les hordes touristiques occidentales est fondée. De même, la peur de la pollution immorale de l’Algérie par ses multitudes occidentales libidineuses est motivée. L’Algérie a raison de refuser de transformer le pays en dépotoir «déculturatoire» touristique, en bordel des Occidentaux, en contrée exotique exploitée par le capital financier international.

Le tourisme est le colonialisme de l’Occidental pauvre. Qui, l’espace de quelques jours, loin de son exploitation agréée, pétri de relents colonialistes et paternalistes, peut se croire riche dans un pays pauvre, se comporter en territoire conquis par la grâce de ses dollars ou de ses euros.

M. K.

Ndlr : Les opinions exprimées dans cette tribune ouverte aux lecteurs visent à susciter un débat. Elles n’engagent que l’auteur et ne correspondent pas nécessairement à la ligne éditoriale d’Algeriepatriotique.

 

Comment (12)

    Yacoub
    12 mars 2019 - 12 h 09 min

    Le fond du problème c’est le développement du tourisme de masse, et la société d’apparence exacerbée par les réseaux sociaux. Il y a 40 ans tu partais avec un sac à dos en Asie tu ne croisais pas un touriste, maintenant partout où tu vas c’est Disneyland, avec des guignols pointant leur portable partout : une uniformisation des visites, des modes de consommation, et comportements. Dans ce monde globalisé le tourisme n’a de nos jours plus rien à voir avec le voyage. Beaucoup de gens confondent aussi voyage et vacances, partir à la mer à l’autre bout du monde dans un resort est sans intérêt. Une mentalité déviante se développe : le “voyage” est un loisir et plus on un grand palmarès de pays visités grand, plus on est quelqu’un. Le vrai voyage est intellectuel et humain, sans connaître un minimum la langue d’un pays, sa culture et son histoire, y voyager n’a aucun sens.

    Karim
    10 mars 2019 - 7 h 58 min

    excellent article! plein de lucidité!

    Yes
    10 mars 2019 - 0 h 20 min

    Analyse médiocre qui reflète le niveau de notre école. Réduire le tourisme à du bordel , . Franchement c réducteur. Alors pourquoi le gouvernement compte sur les entrées touristiques pour combler la baisse des rentrées du pétrole ?? À voir le nombre d’hôtels en construction dans tous les quartiers d’Alger !!

    Re-Med
    9 mars 2019 - 15 h 35 min

    Excellent travail M. Mesloub.
    J’ajouterai à votre analyse le tourisme sexuel. Le touriste sexuel occidental (homme ou femme), ne pouvant accéder à la « marchandise » locale car ne disposant pas de moyens financiers suffisants pour l’acquérir, s’en va se servir dans d’autres contrées où les coûts sont de loin plus abordables. Sans oublier les cas pathologiques et criminels d’abus sexuels sur les mineurs (filles et garçons).
    Quant à l’Algérie, c’est effectivement le désert absolu pour les Algériens eux-mêmes. Il n’y a pas que les lits qui manquent, il y a tout le reste (transports, gastronomie, activités culturelles, cinémas etc.).

    Missoum
    9 mars 2019 - 15 h 14 min

    Félicitations pour votre analyse
    Les implications du capitalisme mondialisé dans la destruction materielle et morale (cultures, environnement ) de la planète sont manifestes. Il est vrai que la morale et la justice ne sont pas cotées en bourse …Le grand Hugo Chavez avait dit en 2009 《 Si le climat était une banque les pays riches l’auraient déjà sauvé 》

    lhadi
    9 mars 2019 - 13 h 30 min

    La terre est une mère nourricière !!!

    Fraternelllement lhadi
    ([email protected])

    timour
    8 mars 2019 - 15 h 10 min

    Alors que la jeunesse algérienne, depuis plus d’une semaine déjà, fracasse les chaînes morales et intellectuelles qui liaient à une époque révolue, leur intelligence , leur enthousiasme, leur désir de vivre, cette contribution sur le tourisme en général, et en Algérie en particulier, laisse perplexe.
    Affirmer que « la décision de fermer les frontières au tourisme international dans les années 1980 a été un choix politique légitime ». Légitime en quoi, en vérité ? Pour promouvoir et investir dans le tourisme interne, destiné aux seuls citoyens algériens ?
    Le résultat est que quelques 3.5 millions d’Algériens quittent chaque année le territoire nationale dans le cadre de leurs vacances pour se rendre à l’étranger. Et selon des économistes, ce sont quelques 3 milliards de $ US qui sont dépensés pour ces vacances, à l’étranger ! En ces temps difficiles pour notre économie, ces milliards, s’ils étaient restés ici, auraient été les biens venus.
    Comme le souligne le contributeur, alors que notre pays regorge de merveilles autres que les plages, tels « les vestiges romains, les gravures rupestres, le majestueux désert… » malgré cela, les touristes algériens partent ailleurs, en Tunisie principalement, mais aussi en Egypte, en Turquie et en Europe. Quelles en sont donc les raisons ?
    En vérité il est de notoriété publique que nos compatriotes (ceux qui le peuvent) vont à l’étranger pour plusieurs raisons. D’abord pour « changer d’air » et quitter cette chape de plomb religieuse qui nous tombe dessus dès qu’on arrive en Algérie. Et puis se sentir en vacances, libres de s’habiller comme il est normal, libre de boire une gazouze à la terrasse d’un café avec son épouse et ses enfants, libre de se baigner en maillot de bain pour celles qui en ont envi sans se faire insulter …et voir autour de soi des gens décontractés et paraissant heureux de vivre, ce sont des raisons respectables.
    Nos compatriotes recherchent aussi des services de qualité car malheureusement notre structure touristique manque de lits mais aussi de professionnalisme et de culture touristique. Il est aussi à remarquer que pour un service équivalent, le touriste algérien paie bien moins cher à l’étranger qu’ici.
    Et l’on peut aussi penser que la population dans son ensemble semble indifférente à la qualité des sites historiques et préhistoriques qui jalonnent notre pays. Il n’est que visiter ces sites pour constater que leur mise en valeur ou tout simplement leur protection n’est pas pris en compte par les autorités de ce pays.
    Chaque année, les journaux se font l’écho des problèmes que rencontrent nos concitoyens au moment des vacances. Chaque année, il est question de plages livrées à la saleté et même à l’insécurité. A une époque, on en était arrivé même à ce que des voyous gèrent certaines plages. Nous avons tous en mémoire ce père de famille tué à coup de couteau par un soi-disant plagiste devant ses enfants et son épouse l’an dernier. Ce tableau peu reluisant du tourisme intérieur que l’on fait avec tristesse reflète le manque de civisme et d’éducation de notre société mais surtout prouve le désintérêt des autorités pour les conditions de vie des citoyens ordinaires.
    Si certains craignent que le patrimoine culturel algérien soit saccagé par » les hordes de touristes occidentaux », il n’en demeure pas moins que ces hordes ne sont pas présentes en Algérie mais que, malgré tout, le patrimoine historique, architectural, folklorique, artistique, paysager,… part à vau de l’eau, se trouve en danger et est parfois perdu à jamais. Il nous suffit d’observer notre environnement immédiat, à l’intérieur de nos villes, à l’extérieur, au bord des routes, dans les oueds, sur les plages (malgré les dispositifs de nettoyage mis en place par les autorités) on constate que les déchets jonchent partout le sol ou que des maisons typiques et immeubles tombent en ruine. Qui n’a pas constaté l’état de la plage à la fin d’une journée alors que des poubelles sont installées et bien visibles ?
    Oui, les gravures rupestres du Sahara sont des joyaux de notre patrimoine national mais je ne crois pas qu’ils soient victimes actuellement de ces fameuses hordes occidentales. Je pense au site archéologique de Taghit qui a subi de graves actes de vandalisme. Tant et si bien qu’il a été nécessaire de mener une campagne de sensibilisation de trois jours l’an dernier à cette même époque. Et d’autres lieux moins prestigieux ont aussi été dégradés.
    Et que dire de cette information hallucinante à propos de ces touristes algériens chassé justement de l’oasis de Taghit lors de la fête du Nouvel an 2018 parce que l’imam du coin avait lancé une fatwa décrétant haram cette fête. Ou bien que penser de ces individus qu’on déclare « fous » et qui dégradent une statue d’une femme au nom de la religion.
    En définitive, ces quelques exemples montrent que nous sommes capables nous-mêmes de saccager notre patrimoine. Ils montrent aussi que nous n’avons pas de « culture touristique » ni artistique d’ailleurs et que nous n’avons pas conscience de leur importance et de leur beauté.
    Voir en tout étranger, et touriste de surcroit, un prédateur sexuel capable de transformer le pays en dépotoir déculturatoire ( ?) touristique, en bordel des Occidentaux c’est nous enfermer dans une sorte de grande prison comme au temps de certains régimes politique européens du XX° siècle. Ce repliement sur soi qui est préconisé, témoigne d’un manque de confiance en sa propre estime, en sa propre culture et trahit un sentiment d’infériorité. Répandre cette peur de l’autre a toujours été le moyen de rendre serviles les citoyens.
    Alors que nous devrions être fiers de montrer les richesses de notre beau pays et d’en tirer des avantages pécuniaires comme moraux, nous les gardons pour nous seuls, sans les voir et surtout en les ignorants. Avoir une politique touristique c’est faire à la fois de la pédagogie et de l’éducation tout en s’inscrivant dans une vision économique comme créer des emplois. Cela demande évidemment des capitaux, des compétences, une excellente organisation et beaucoup de professionnalisme. Et de l’imagination. Et cela n’a jamais été entrepris dans le passé. Toutes les nations du monde qui ont développé le tourisme dans leur pays en ont tiré des avantages pour leurs habitants en termes de revenu et d’emplois. Elles ne sont pas tombées dans la perversion, n’ont pas été infectées par une quelconque maladie et n’ont pas été victime d’une destruction écologique, sociale et culturelle pour autant.
    Des dérives existent dans toutes activités humaines, et partant dans toute société, mais l’Etat doit assumer son rôle régulateur en établissant des règles administratives et environnementales strictes et cohérentes. Notre pays a tout à gagner sans que nos traditions soient corrompues. Et comme écrivait un touriste ayant visité l’Algérie l’an dernier : « Durant mon séjour parmi vous, je n’ai pas bénéficié d’un service touristique digne de ce nom mais ce critère n’est pas essentiel à côté des paysages extraordinaires que j’ai découverts et surtout devant l’accueil et l’hospitalité des habitants de votre pays, du moindre douar à la ville…Votre pays est généreux et digne ; cette rencontre avec ses habitants comme ces visions des djebels, du désert, de la côte à toute heure du jour restera pour moi un souvenir inoubliable.

    El pueblo
    8 mars 2019 - 8 h 10 min

    Dieu du ciel qu’elle était belle cette Algérie au milieu des années 70 où l’environnement était intact et n’était pas pollué comme de nos jours, même le désert subit les affres d’un tourisme sauvage et les méfaits se font déjà sentir: bouteilles et sachets plasiques au fin fond même des hamadas les plus inhospitalières
    Boumediene Allah yarhmou n’avait pas tort d’interdire les 4/4 aux particuliers

    Noureddine
    8 mars 2019 - 7 h 29 min

    Excellent article bravo
    Effectivement le tourisme qu’il soit interne ou externe détruit tout sur son passage et comme disait E. Green:
    Le tourisme m’apparaît comme une forme moderne de la peste, s’abattant sur un lieu et s’attaquant sans distinction à toute espèce de vie.
    Ce phénomène commence à prendre de l’ampleur chez nous mettant en peril des écosystèmes tres fragiles surtout au Sahara

    africus
    7 mars 2019 - 21 h 12 min

    on peut résumer l’article aux deux derniers paragraphes tellement hauts en objectivité que j’en ai la nausée. pardon

    Elephant Man
    7 mars 2019 - 5 h 40 min

    Excellente contribution Mr Mesloub Khider.
    Le capitalisme est mortifère.

    Anonyme
    6 mars 2019 - 22 h 34 min

    Certains arrêtez de voir le capitalisme comme un mal.
    Si le capitalisme comme toute doctrine doit être régulé comme pour la religion, (ce qu’il n’est plus et là est toute la cause de nos maux actuels), on a pas trouver mieux actuellement (ceux qui se disent non capitalistes n’êtes-vous pas propriétaires d’un logement ou d’une voiture, laissez-vous votre voisin vous voler votre nourriture que vous venez d’acheter au supermarché du coin ou laissez-vous les fruits de votre jardin à la disposition du premier venu, le capitalisme c’est la liberté de posséder un capital, la liberté d’accéder à la propriété et la liberté d’entreprendre, le communisme on sait ce que ça a donner, une économie planifiée et même la Chine s’en éloigne en glissant vers le capitalisme au point d’être devenue le royaume du capitalisme, Lénine lui même disait que tout n’était pas à jeter dans le capitalisme et qu’on ne pourrait s’en passer en attendant de trouver mieux), les problèmes de société en occident sont liés à la politique nationale et internationale (les deux sont liées) menée par les pays, pas le modèle économique, le capitalisme fait peur en Algérie car le FLN perdra le contrôle du pays au moment où la moindre liberté surgira, à commencer par la liberté économique quoique entre-nous, il l’a déjà perdu depuis que les manifestations ont commencées.

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